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L’abbé Dominique Spina, condamné en appel en 2006 pour le viol commis sur un mineur de 16 ans au Pays Basque, fait son retour au diocèse de Toulouse en qualité de chancelier et délégué épiscopal à la pastorale des mariages. Une nomination qui choque la communauté catholique. L’archevêque Mgr Guy de Kérimel justifie ce choix : « J’ai pris le parti de la miséricorde ».

« Ce qu’il y a d’offusquant c’est qu’il s’agit d’un prêtre qui a été condamné pour viol sur mineur. C’est inadmissible ». À l’image de ce Toulousain, qui a appris la nouvelle sur le site internet du diocèse de Toulouse, plusieurs messages de la communauté catholique s’inquiètent de la nomination, le 4 juin dernier, de l’abbé Dominique Spina, condamné en appel en 2006 par la cour d’assises de Tarbes (Hautes-Pyrénées) pour le viol commis sur un mineur de 16 ans au Pays Basque au milieu des années 1990. Il avait écopé d’une peine de cinq ans d’emprisonnement dont un avec sursis.

L’abbé Spina déjà évincé de la pastorale des enfants

En 2016, ce religieux, dont les faits ont largement été relatés par la presse, avait été relevé de ses fonctions de la paroisse de Fronton, « à sa demande ». L’archevêque de Toulouse de l’époque, Mgr Le Gall, avait accepté cette demande confiant, lors d’une conférence de presse, que l’abbé Spina n’avait « plus aucun contact direct ou indirect avec des jeunes ». L’archevêché avait reconnu que le prêtre officiait seul depuis 2009 comme responsable de l’ensemble paroissial de Fronton-Bouloc-Castelnau, près de Toulouse.

« En choisissant de nommer l’abbé Spina chancelier de la curie diocésaine, j’ai pris le parti de la miséricorde », a déclaré dans un communiqué l’archevêque et évêque de Toulouse. Et Mgr Guy de Kérimel, qui n’a pas souhaité s’exprimer de vive voix, de justifier ses choix :

« Cela fait plus de 5 ans que le prêtre est nommé aux archives »

« Cela fait plus de 5 années que l’abbé Dominique Spina a été nommé aux archives de catholicité du diocèse de Toulouse, explique-t-il. C’est dans ces archives que sont conservés et suivies les registres paroissiaux de baptême et de mariages. Pendant ces 5 années, l’abbé a exercé cette tâche avec compétence et dévouement. D’autre part, afin de soulager le chancelier dans ses tâches administratives, il avait été nommé adjoint aux dispenses de mariage le 1er septembre 2020. La fonction principale du chancelier est de veiller à ce que les actes de la curie diocésaine soient rédigés, expédiés et conservés aux archives de la curie diocésaine. Par cette fonction, il est, de fait, notaire et secrétaire de la curie diocésaine. Est-il nécessaire de préciser par ailleurs que cette fonction se distingue de l’officialité interdiocésaine chargée des enquêtes et procès canoniques. D’autre part, l’abbé Spina n’accompagne pas les couples au mariage ».

« Nous n’avons rien à lui reprocher… »

Pour le diocèse de Toulouse, il y a prescription concernant le passé du religieux. « Il est vrai que l’abbé Spina a accompli une peine de 5 ans de prison dont un avec sursis pour des faits très graves qui se sont déroulés il y a près de 30 ans, poursuit L’archevêque. Conformément à la justice canonique en vigueur, la commission de la doctrine de la foi a émis un avis favorable pour que l’abbé Dominique Spina demeure dans l’état sacerdotal, ce dernier étant remis entre les mains de son évêque pour l’exercice de son ministère. De fait, il n’exerce plus de charge pastorale, sinon celle de célébrer l’Eucharistie, seul ou exceptionnellement pour des fidèles. Considérant que nous n’avons rien à reprocher à ce prêtre depuis ces trente dernières années pour faits susceptibles de faire l’objet de poursuites judiciaires, canoniques ou civiles, j’ai donc choisi de le nommer dans cette fonction administrative ».

« C’est une provocation », estime Olivier Savignac

La nomination de l’abbé Spina est « une provocation », estime Olivier Savignac, président de l’association Parler et revivre, qui se souvient que le religieux avait occupé les fonctions d’aumônier dans une école primaire près de Toulouse jusqu’en 2019. Selon lui, la décision du diocèse de Toulouse est en contradiction avec les conclusions de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Eglise (Ciase). « Normalement, lorsqu’un prêtre a commis un ou plusieurs viols sur mineurs, il doit être renvoyé de l’État clérical, poursuit Olivier Savignac. Pourquoi le diocèse de Toulouse n’a pas pris cette décision ? On se demande à quoi il joue ».