Par
Gabriel Kenedi
Publié le
8 juil. 2025 à 19h22
Il entre officiellement dans la course. En envoyant une « lettre aux Toulousaines et aux Toulousains » dans laquelle il défend l’idée d’une ville de Toulouse « populaire et heureuse », le chef de file des socialistes, François Briançon, fait clairement acte de candidature aux élections municipales 2026 à Toulouse. Dans un entretien à Actu Toulouse, l’ancien adjoint aux sports de Pierre Cohen entre 2008 et 2014 explique les raisons de sa candidature et se pose comme l’homme du rassemblement à gauche… tout en pourfendant le bilan de Jean-Luc Moudenc, qu’il juge insuffisant. Interview.
« Je suis prêt à être leur maire »
Actu : En écrivant une lettre aux Toulousains, officialisez-vous votre candidature aux élections municipales à Toulouse ?
François Briançon : « Oui ! Avec cette lettre, je dis aux Toulousains que je suis prêt à être leur maire. Je leur dis tout en sachant que le cadre politique, celui d’un rassemblement de la gauche de responsabilité, reste à définir. Je le dis dans la lettre, il faut trouver les moyens de rassembler tous ceux qui veulent à la fois changer Toulouse et rassembler les Toulousains autour de ce changement. Un projet politique, il doit impérativement être porté collectivement. Il faut qu’on arrête d’opposer les Toulousains les uns aux autres ».
C’est-à-dire ?
François Briançon : « Quand Jean-Luc Moudenc parle de ses oppositions, au sens large et malgré leurs diversités, on a tous l’impression qu’on est d’extrême-gauche. Et quand j’entends certains candidats de la gauche toulousaine s’exprimer sur Jean-Luc Moudenc, j’ai l’impression qu’il n’est accompagné que de gens d’extrême droite. Le débat politique toulousain ne doit pas être la pale copie de ce qui se passe au niveau national. Il faut changer notre ville, c’est d’ailleurs ce que nous ont dit les Toulousains dans la grande enquête que nous avons menée et à laquelle ont répondu plus de 5 000 personnes, mais le faire avec la volonté de rassembler, et non de diviser. Là, j’ai comme l’impression qu’on est partis pour revivre la campagne municipale de 2020 : caricaturale et agressive, des deux côtés. On ne me trouvera pas sur cette estrade-là ! »
« Je ne vais pas faire des propositions fades ! »
Mais peut-on encore être audible tout en restant mesuré, aujourd’hui ?
François Briançon : « Être mesuré dans le discours et la pratique politique, oui… Mais on ne veut pas être mesuré dans les propositions que l’on va faire aux Toulousains ! Je veux porter un vrai projet. Ce n’est pas parce que je souhaite que le débat soit porté de façon sereine que je vais faire des propositions fades. Au contraire, même ! Il y a de la place pour un vrai débat mais il faut pouvoir les porter dans un cadre apaisé. Et ça correspond à l’ADN de Toulouse ! Ceux qui font dériver le débat se trompent sur ce qu’est l’identité profonde de Toulouse ».
Vidéos : en ce moment sur Actu« Je connais parfaitement Toulouse »
Quels sont vos atouts selon vous pour diriger la bientôt troisième ville de France ?
François Briançon : « D’abord, ma capacité de rassemblement. J’ai montré par ma désignation (en tant que chef de file des socialistes, ndlr) ma capacité à rassembler les socialistes et au-delà, les citoyens, les associatifs, en organisant une grande enquête auprès des Toulousains. Cela a été un vrai travail de fond pour comprendre les attentes des gens et qui va nous servir pour faire des propositions. Certains me le reprocheront peut-être, mais j’ai aujourd’hui plus de 20 ans de mandats d’élu local, donc j’ai la prétention de connaître parfaitement les dossiers de la ville. Je connais parfaitement Toulouse. J’y suis né, j’y ai fait mes études, j’y ai grandi. Je ne l’ai jamais quittée, d’ailleurs ! J’ai été chef d’entreprise pendant 25 ans et je connais tous les atouts de cette ville. Je pense donc être en situation d’organiser le rassemblement, car c’est la condition essentielle, avec les écologistes, les communistes, Génération.s, le PRG, les citoyens. Et je pense être en capacité de convaincre les Toulousains que l’on peut changer les choses, de les rassurer en leur disant qu’ils peuvent mettre en cohérence leur vote national avec leur vote municipal. Il y a une offre politique qui correspond à ce qu’ils veulent : je veux montrer qu’on peut changer la ville sans la diviser »
« Jean-Luc Moudenc n’a pas bouleversé la ville »
Pensez-vous que la gauche est en capacité de remporter cette élection ?
François Briançon : « La gauche peut l’emporter car sur plein de sujets, Jean-Luc Moudenc s’est contenté de faire le travail minimum. On ne peut pas dire qu’il n’a rien fait et je ne le dirai jamais. Mais on ne peut pas dire que sa mandature ait bouleversé notre ville. On s’aperçoit qu’aujourd’hui encore, si on prend l’exemple de l’aménagement du centre-ville et de la refonte de la rue de Metz, ce sont des réalisations intéressantes et réussies, mais qui ne sont que dans le prolongement des politiques portées par Pierre Cohen (ancien maire socialiste de Toulouse, entre 2008 et 2014). Le grand projet sur l’île du Ramier, c’est un chantier qui avait été engagé en 2008 ! La réussite du Meett, c’est Pierre Cohen. Le Minotaure et la Halle de La Machine, c’est aussi quelque chose qu’on a porté. Donc hormis le métro, je ne sens pas de vraie capacité d’innovation et d’audace dans les politiques municipales portées par Jean-Luc Moudenc.
Toulouse, j’en suis persuadé, est une ville de gauche. Aujourd’hui, qu’est-ce qui fait que les Toulousains ont choisi pendant des années un maire et une politique de droite ? C’est parce qu’ils n’ont pas eu confiance en la gauche. La gauche les a inquiétés dans sa capacité à être unie, à apporter du changement. Pour pouvoir gagner, la gauche doit avoir un discours qui ne soit pas idéologique ou caricatural. Par exemple, sur la sécurité, c’est une vraie bêtise aujourd’hui de considérer que l’on peut remettre en cause l’apport technologique des caméras de vidéosurveillance, ou désarmer la police municipale. Ce langage de clarté, les Toulousains sont prêts à l’entendre ! »
Un rassemblement sans LFI, « une vision partagée par toutes et tous »
Où en sont les discussions avec les partenaires de gauche ? Et que dites-vous à vos anciens collègues de la mandature de Pierre Cohen, d’Isabelle Hardy à Romain Cujives en passant par Régis Godec et Pierre Lacaze, qui ont aussi fait part de leur souhait de s’engager en 2026 ?
François Briançon : « C’est une génération qui se connaît bien, qui s’apprécie, qui se respecte et qui a l’habitude de travailler ensemble. Cela me parait essentiel. J’ai un discours qui est celui de la clarté : j’ai toujours dit que je souhaitais un rassemblement qui n’inclut pas La France Insoumise. J’ai l’impression que cette vision est aujourd’hui partagée par toutes et tous. Et je leur dis avec beaucoup d’humilité et de détermination que moi je suis prêt à conduire ce rassemblement. Je sais pertinemment que je ne suis pas le seul à avoir cette ambition. Mon objectif, à travers cette lettre, n’est pas de m’imposer car je les respecte trop pour cela, mais de créer les conditions de la discussion. Je souhaite qu’à la fois les personnalités brillantes comme Romain Cujives et les partis politiques que l’on a cités puissent se retrouver et travailler ensemble à l’élaboration d’une plateforme programmatique ».
Mais y a-t-il des avancées ?
François Briançon : « Il y a déjà 15 jours, à l’initiative de Pierre Lacaze et du parti communiste, toutes ces organisations – à l’exception de La France Insoumise – se sont réunies pour travailler sur le programme. Et on s’est aperçus qu’il n’y avait pas de point majeur qui nous empêchait de faire route commune. C’est une étape essentielle qui est donc en train d’être franchie. Il faudra ensuite trouver les moyens de désigner celui ou celle qui portera les couleurs de la gauche unie. Et j’ai le sentiment d’être capable de porter ce rassemblement. À Toulouse, les socialistes ont l’expérience de la gestion, une force militante conséquente, un réseau d’élus et un savoir-faire sur les questions essentielles du quotidien. C’est même l’ADN des socialistes. Et il y a un deuxième point essentiel, c’est la bifurcation écologique. Sur ce sujet-là, c’est aux écologistes de prendre le leadership ! C’est d’ailleurs pour cela que j’ai proposé aux Verts un accord dans lequel ils assumeraient la présidence de la Métropole ».
« Je ne doute pas un seul instant qu’on arrive à un accord »
Pour le moment, Régis Godec n’a pas répondu favorablement, ni part la négative d’ailleurs, à votre offre. Qu’est-ce que cela vous inspire ?
François Briançon : « Régis Godec est quelqu’un de mesuré dans ses prises de paroles et j’ai beaucoup de respect pour lui. Ce que je peux vous dire, c’est qu’on discute, on s’appelle au téléphone très régulièrement et qu’on avance de concert. Je ne doute pas un seul instant qu’on arrive à un accord ».
Il y a la question du premier tour… mais aussi celle de la stratégie du second tour. Est-ce qu’une alliance avec François Piquemal et LFI est envisageable au second tour, selon vous ?
François Briançon : « Il faut prendre les étapes une par une. La première étape, c’est de rassembler la gauche. Puis de proposer un projet en allant au premier tour devant les électeurs. Ce sont eux qui nous diront ce qu’ils souhaitent pour le second tour ! »
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