Un an après les premières révélations, l’abbé Pierre fait l’objet de douze nouvelles accusations de violences sexuelles. Sept concernent des personnes mineures au moment des faits, selon un rapport du cabinet spécialisé Egaé, publié ce mercredi. Ce nouveau volet porte à 45 le nombre de témoignages visant le prêtre décédé en 2007.

Ces nouvelles révélations sont « tristement attendues« , affirme Laetitia Cherel, grand reporter à la cellule Investigation de Radio France et co-autrice, avec Marie-Françoise Etchégoin, du livre L’abbé Pierre, la fabrique d’un saint (éditions Alary). En travaillant sur sa biographie, dit-elle, « on a découvert la façon dont il a construit sa légende, on s’est aperçu qu’il avait tout fait pour que les choses ne se sachent pas, en impressionnant ses victimes ».

Pire, selon la journaliste, d’autres témoignages sont « hélas » à prévoir, tant la libération de la parole a été compliquée par le statut d’ »icône nationale, internationale, intergénérationnelle » qu’incarnait l’abbé Pierre. Certaines victimes ont ainsi longtemps protégé l’image de l’homme et celle d’Emmaüs. « Certaines avaient choisi de donner leur vie à Emmaüs pour aider les plus pauvres, elles ressentaient donc une sorte de conflit de loyauté », explique encore Laetitia Cherel. 

Une époque où ce n’était pas considéré comme des agressions sexuelles

Elle évoque également le cas de jeunes victimes dont la parole n’a pas été entendue ou simplement pas crue, à une époque « où des caresses sur les seins, qui étaient plutôt des malaxations violentes, n’étaient pas considérées comme des agressions sexuelles« .

Elle dénonce également la protection dont a bénéficié l’abbé Pierre de la part de son entourage. « Il y a aussi une volonté, que ce soit pour Emmaüs ou pour l’Église, de protéger les institutions« , estime-t-elle. Pourquoi ? « Parce c’était l’abbé Pierre qui rapportait de l’argent à  Emmaüs, c’était pour l’abbé Pierre que les gens s’engageaient. » Elle poursuit : « C’était aussi un prêtre qui redorait l’image de l’Église, parce qu’il allait au plus près de ces pauvres gens qui ne fréquentaient même plus les Églises. »

Elle illustre cette volonté de masquer les agissement du prêtre par un épisode méconnu : « En 1958, l’Église, en accord avec Emmaüs, avait décidé de l’envoyer se faire soigner pour ces raisons-là dans une clinique psychiatrique en Suisse », affirme-t-elle.

Face à l’ampleur des faits, Emmaüs et la Conférence des évêques de France (CEF) ont annoncé la mise en place d’un dispositif de réparation financière à destination des victimes. « Il ne faut pas croire que les victimes cherchent de l’argent. Ce qu’elles cherchent d’abord, c’est une reconnaissance de ce qu’elles ont vécu », conclut la journaliste. 

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