Pilules dans les mains d'une personne âgée vue de dessus, avec un pillulier rempli à côté.En France, 10 à 20 % des hospitalisations des personnes âgées sont liées à des effets indésirables de médicaments selon la Haute Autorité de Santé. © Freepik

Dans la tête de beaucoup, “plus on vieillit, plus on prend de médicaments”, c’est presque devenu une évidence. Mais cette évidence-là, justement, inquiète de plus en plus les professionnels de santé.

Selon une étude publiée en 2024 dans la revue Age and Ageing, menée par une équipe française, centrée sur l’indice ASLI (Anticholinergic and Sedative Load Index), un trop grand nombre de médicaments augmente significativement le risque d’hospitalisation chez les plus de 65 ans. Plus précisément, ce sont les médicaments à effet sédatif ou anticholinergique (somnifères, antidépresseurs, certains antiallergiques) qui seraient les plus à surveiller.

Un chiffre qui interpelle : l’étude a mis au point un algorithme capable de prédire les hospitalisations dans les 30 jours avec 75 % de précision… simplement à partir des médicaments pris par le patient.

Seniors sous traitement : quand trop, c’est trop Polypharmacie : des chiffres qui donnent le vertige

En France, près de 40 % des personnes de plus de 75 ans prennent au moins 5 médicaments par jour. Et 1 % en prend plus de 10, selon Santé publique France. C’est ce qu’on appelle la polypharmacie, qui peut être nécessaire… mais devient dangereuse lorsqu’elle est mal encadrée.

Selon la Haute Autorité de Santé (HAS), 10 à 20 % des hospitalisations des personnes âgées seraient directement liées à des effets indésirables de médicaments. Et d’après l’Assurance maladie, près de 130 000 hospitalisations par an seraient dues à une mauvaise utilisation des traitements médicamenteux, un drame souvent évitable.

Chutes, confusion, fracture : les effets collatéraux

Prendre plusieurs médicaments en même temps, ce n’est pas seulement une question de piluliers bien remplis. C’est aussi, hélas, un vrai facteur de risque. Les benzodiazépines (type Lexomil, Xanax), par exemple, sont régulièrement pointées du doigt. Chez les seniors, elles augmentent le risque de chutes, troubles cognitifs, somnolence, voire de démence à long terme.

Et ce n’est pas qu’une théorie : la France détient le record européen de consommation de psychotropes chez les plus de 65 ans, selon un rapport de l’ANSM (Agence du médicament).

Trop souvent, un médicament en appelle un autre

L’un des mécanismes les plus sournois est la cascade médicamenteuse. Un médicament provoque de la somnolence, on pense à tort à une dépression, on prescrit un antidépresseur… qui provoque une bouche sèche, on prescrit alors un autre traitement… Et ainsi de suite.

Résultat, on empile les ordonnances sans parfois jamais remettre en question leur bien-fondé. Et tout cela sans toujours adapter les doses à l’âge, alors même que le foie et les reins des seniors éliminent les substances plus lentement.

La solution existe : la déprescription raisonnée

Heureusement, il n’est pas trop tard pour agir. Une pratique fait doucement son chemin dans les hôpitaux et maisons de santé : la déprescription. Cela consiste à réévaluer régulièrement les traitements pour en réduire ou supprimer certains, quand c’est possible.

Des outils existent déjà, comme les critères STOPP/START ou la conciliation médicamenteuse, pour éviter les erreurs lors des sorties d’hôpital. Encore faut-il qu’ils soient connus, utilisés et partagés entre les médecins généralistes, les spécialistes, les pharmaciens, et bien sûr… les patients et leurs familles.

Selon le collectif Soigner Autrement, une déprescription bien menée améliore la qualité de vie, réduit les risques et peut faire reculer les troubles cognitifs, notamment chez les patients traités depuis longtemps par des benzodiazépines.

À SAVOIR

Selon la HAS, 45 à 70 % des effets indésirables médicamenteux graves seraient évitables. Et dans 1 cas sur 2, un médicament potentiellement inapproprié pourrait être supprimé sans nuire à la santé du patient.

Inscrivez-vous à notre newsletter
Ma Santé