Habitué des médias, le député européen Raphaël Gluckmann ne cache pas ses ambitions pour les rendez-vous politiques à venir. Le coprésident de Place publique a dévoilé le 23 juin 2025 à Paris sa « Vision pour la France », un document stratégique articulé autour de 42 chantiers. Une vision à faire dialoguer territorialement. Fort de ses 12 000 adhérents à l’échelle nationale, le parti prépare activement les différentes échéances électorales en occupant le terrain.

Dans les Bouches-du-Rhône, Place publique peut compter sur Pascaline Lécorché et ses 400 adhérents. Membre de la première heure, elle a été secrétaire générale du mouvement pendant quatre ans. A cette époque, elle s’est occupée de l’organisation et de la structuration de Place publique localement. En 2024, lors des législatives anticipées, après la dissolution de l’Assemblée nationale, Pascaline Lécorché a été battue dans la première circonscription des Bouches-du-Rhône face à la candidate RN Monique Griseti. Elle est, depuis la refonte des statuts du parti en mars 2025, déléguée nationale à la prospective 2025-2030.

Élue également représentante Paca à l’Assemblée politique nationale de Place publique, son rôle est d’anticiper à moyen et long terme le positionnement et la stratégie du parti. Elle nous dévoile les ambitions du mouvement pour Marseille et les Bouches-du-Rhône et nous présente « un cap clair » tourné à gauche pour les municipales de mars 2026.

Les Nouvelles Publications : Le 3 juillet, Raphaël Glucksmann était à Marseille pour présenter sa « Vision pour la France ». Quels sont les enseignements tirés ?

Pascaline Lécorché : Le bilan est positif. On voulait avoir un regard croisé entre nos visions. Au niveau national, on met l’accent sur l’emploi. A Marseille, et sur les Bouches-du-Rhône, avec notre démarche politique Prenons place, on a choisi l’échelle métropolitaine pour nous permettre de traiter un certain nombre d’enjeux fondamentaux du territoire : la mobilité, la transformation écologique, la transformation industrielle et donc l’emploi et l’insertion.

Nous sommes allés à Vitrolles pour rencontrer le maire, Loïc Gachon. Nous avons discuté de Cap Horizon, ce projet métropolitain de plateforme multimodale, pour avoir une vue à la fois sur la gare TGV, la gare de Vitrolles, Airbus, et les travaux en cours de cet ascenseur pour comprendre ce qu’est une Métropole et ses enjeux.

Nous avons visité la Scop Atem Maintenance. Cette PME fait écho à notre programme national : une transformation industrielle, écologique, avec une réindustrialisation qui sera levier d’emplois, de rayonnement économique du territoire, mais aussi nécessaire pour des questions de souveraineté.

© D. R. – Le député européen Raphaël Glucksmann face aux militants de Place publique à la Friche Belle de mai à Marseille ce 3 juillet.

Nous avons eu des échanges avec Eric Berton, le président d’Aix-Marseille Université, puis une table ronde avec des associations. Le lendemain, on s’est entretenu avec Frédéric Vigouroux, maire de Miramas. La visite s’est clôturée par une réunion publique. Le but était de parler à des institutionnels, des associations et des acteurs économiques.

Comment est née la démarche politique Prenons place lancée par Place publique 13 ?

Cette démarche est née, il y a six mois, d’une colère. Malgré la campagne européenne où la liste emmenée par Raphaël Glucksmann a fait un score tout à fait honorable en arrivant premier de la gauche, la dissolution de l’Assemblée nationale a rebattu les cartes et a ouvert les portes au RN.

Les législatives sur ce territoire ont mis en lumière ce besoin d’avoir des liens forts avec la société civile. Il fallait revenir aux fondamentaux, à ce qu’on était, et repartir sur cette bataille des idées de manière approfondie.

C’est né des constats de difficultés de fonctionnement de cette Métropole en lien avec les municipalités.

On se rend compte que sur le territoire, il y a une identité métropolitaine qui n’existe pas et qui pourtant est nécessaire. Car une Métropole, c’est un outil de coopération au service d’un territoire et de ses citoyens.

C’est à l’échelle métropolitaine que l’on parle de mobilité, d’emploi, de décarbonation etc. Ils sont fondamentaux pour que les habitants du territoire puissent avec une vie digne.

Six mois après, où en sommes-nous ?

Avec cette initiative, on a voulu s’intéresser au territoire le comprendre à l’échelle. Pour cela, on a réfléchi aux thématiques structurantes métropolitaines qu’on avait envie de traiter et on a rencontré des acteurs et des actrices autour d’une table sur ces thématiques afin de travailler avec des expertises croisées et complémentaires. Une fois les grandes problématiques identifiées, on a fait des réunions publiques par thématique en invitant cinq personnes, une sorte d’agora pour traiter le sujet en question.

L’objectif de Prenons place, c’est que chacun puisse se sentir concerné. Cet appel, ce n’est ni une finalité ni un point zéro mais bien un jalon pour dire voilà la vision qu’on a envie de porter sur ce territoire là, on a défini un constat sur cette Métropole et les enjeux qui, selon nous, sont à traiter.

Ce n’est pas une liste à la Prévert, on a quatre grandes thématiques : une Métropole à hauteur de citoyen, relier les territoires, faire de la Métropole un moteur économique lisible, innovant et solidaire, et protéger les citoyens, le vivant, les communs.

Si on veut que ce territoire change, il va falloir non seulement donner les moyens aux municipalités mais aussi à cette Métropole. Tant qu’on n’aura pas une articulation entre la Métropole et les municipalités autour de projets de territoire pour les citoyens, on ne pourra pas développer ce territoire correctement.

Comment pourrait-on définir la Métropole idéale selon Place publique 13 ?

Comme un véritable outil de coopération capable de travailler avec l’ensemble des conseillers métropolitains, des maires des communes de ce territoire, non pas en abolissant les étiquettes mais en les dépassant avec des projets. Cette Métropole doit être visionnaire, anticiper et ne doit pas juste être en réaction.

Selon vous, le volet mobilités du plan Marseille en grand porté par la Métropole Aix-Marseille-Provence est-il assez visionnaire et dans l’anticipation ?

Sur la question des mobilités, on a un retard phénoménal. La ville de Marseille, si on ne prend qu’elle, son premier métro a été inauguré en même temps que celui de Lyon (Rhône), aujourd’hui on a un réseau qui est aussi dense que celui de Besançon (Doubs).

Le plan Marseille en grand va permettre de rattraper une partie du retard, mais pas entièrement. En plus, ce sont essentiellement des projets sur Marseille. Mais à côté de ça, les liaisons inter-villes sont manquantes, les bassins d’emploi tels que le plateau de l’Arbois ou le plateau des Milles n’ont pas de mobilités. Les mobilités douces sont complètement sous-dimensionnées et mal anticipées par rapport aux besoins.

Oui, il y a un volet mobilité, mais il est insuffisant par rapport au retard pris. On a des plans, mais si après il n’y a pas d’outils de suivi et de mise en œuvre, ce sont des plans qui sont juste jolis à mettre sur un tableau.

Raphaël Gluckmann souhaite une offre politique qui représente la gauche mais sans La France insoumise. Pour les municipales 2026, à Marseille, la gauche peut-elle travailler sans LFI ?

Nous n’avons jamais caché nos divergences avec La France insoumise. Ici, nous n’appelons pas à un NFP avec la France insoumise : celles et ceux qui divisent les Marseillais, ce n’est pas notre ligne. La France insoumise ne souhaite de toute façon pas cette unité puisqu’il y a eu un certain nombre d’affirmations locales à l’encontre du travail de la mairie de Marseille.

Nous voulons un projet et des idées dans un cadre d’apaisement et tout ce qui fait le bruit et la fureur, c’est vraiment tout ce qu’on combat. Localement, on veut porter un projet de territoire. Notre ambition, c’est d’être présent dans l’ensemble des institutions des Bouches-du-Rhône et présenter des candidats dans les municipalités dans lesquelles nous sommes présents. Marseille en fait partie.

Nous étions aux prémices du Printemps marseillais, nous suivons de près ce que la Ville fait.

Nous considérons que ce qu’a fait la municipalité a permis de considérablement améliorer Marseille, mais il reste beaucoup à faire et nous souhaitons être une force utile de rassemblement de la gauche et de l’écologie.

Une autre union se prépare, celle de la droite et du centre, menée par Renaud Muselier et Martine Vassal. Est-ce une menace « sérieuse » pour le Printemps marseillais ?

C’est l’union de la droite et de la droite. Je ne vois pas de différences. Je me demandais si vous alliez me parler de Sabrina Agresti-Roubache qui veut aussi compter dans ces municipales.

Ils ont un projet : celui de la droite. Les Marseillais ont bien compris que leur ville avait changé. Certes, tout n’est pas parfait mais il y a quand même une impulsion qui a été donnée depuis 2020. Pendant 25 ans avant nous avions eu Jean-Claude Gaudin, dont pour moi Martine Vassal et Renaud Muselier sont les héritiers. En 2020, les Marseillais ont choisi le Printemps marseillais. Nous devons proposer un horizon pour la suite.

Quels sont vos objectifs pour les prochains mois ?

Continuer le travail. On a traité de nombreux sujets : la santé, la décarbonation, l’adaptation au réchauffement climatique, la mobilité, l’économie, l’emploi, l’insertion. Nous avons commencé à aborder la culture même si ce n’est pas une compétence métropolitaine. Dans le cadre de cet appel pour une Métropole engagée, on va devoir traiter le logement qui est une compétence directe.

Nous allons ouvrir des ateliers pour tous et faire émerger des propositions concrètes à l’automne pour avoir en fin d’année un document plus fourni de travail qui puisse servir pour les prochaines échéances.