Détective consultant

Qui dit Sherlock Holmes, dit détective, profession dont il est devenu le synonyme, l’incarnation dans notre imaginaire, n’ayant pour seul rival, à ce niveau, que le Belge Hercule Poirot d’Agatha Christie. Sans comparaison possible avec le Philip Marlowe de Raymond Chandler ou le Nestor Burma de Léo Malet.

Le « canon holmésien » comporte cinquante-six récits (réunis en cinq recueils) et quatre romans.

Détective consultant qui pratique son art dans l’Angleterre victorienne, Holmes apparut en 1887 dans Étude en rouge, prépublié dans un magazine avant d’être édité en livre l’année suivante.

Arthur Conan Doyle vit le jour le 22 mai 1859 à Edimbourg, l’écossaise cité natale de Walter Scott (Ivanhoé) et de Robert Louis Stevenson (L’Île au trésor). Au cours de ses études de médecine qu’il mena brillamment à bon port, ce colosse hyperactif eut pour professeur de chirurgie Joseph Bell, qui jouissait de stupéfiantes facultés de déduction instantanée ; Doyle s’en souviendra en dotant Sherlock d’une sidérante perspicacité.

L’univers policier n’était pas celui qu’affectionnait en particulier le père spirituel du détective ; Doyle lui préférait de loin ses propres romans historiques ou d’aventures fantastiques : le plus connu de ces derniers, Le Monde perdu, sortit en 1912.

Le docteur Watson

La belle audience rencontrée par Étude en rouge poussa Conan Doyle à écrire de nouvelles histoires dont son limier est le protagoniste. Un scandale en Bohême fut ainsi publié en 1891 dans The Strand Magazine, mensuel britannique où paraîtront les futures aventures d’Holmes ; grâce à celles-ci, le tirage du Strand passera de 200 000 à 300 000 exemplaires. Les illustrations accompagnant ces récits (non reproduites dans les deux volumes de la Pléiade) accentueront la popularité du personnage.

Ami loyal d’Holmes, le docteur John H. Watson en est aussi l’historiographe. Ancien médecin militaire et veuf, il vit dans l’immeuble où Sherlock et lui sont colocataires d’un appartement. Il s’agit, bien sûr, du 221b Baker Street à Londres, lieu où se pressent les fans venus du monde entier, devenu un musée depuis 1990. Watson est le narrateur des enquêtes de ce Sherlock sarcastique, cyclothymique, misogyne, toxicomane, chasseur, pourvu d’une prodigieuse mémoire, féru de graphologie, de chimie et d’anatomie. Violoniste amateur, ce gentleman possède néanmoins un stradivarius.

Pour la première fois

Doyle prit vite en grippe son héros qui reléguait dans l’ombre le reste de son œuvre d’écrivain. Aussi, le tua-t-il en 1893 dans Le Problème final, précipitant Sherlock dans les chutes du Reichenbach, dans les Alpes suisses, avec son ennemi juré, le malfaisant professeur Moriarty. Cet assassinat littéraire suscita un tollé général. Doyle « résistera » quelques années, mais Holmes sera de retour via Le Chien des Baskerville, roman à l’action antérieure à cette « mort », prépublié à prix d’or dans le Strand en 1901 et en livre en 1902. Son chef-d’œuvre aux yeux de beaucoup de sherlockophiles.

Désormais prisonnier consentant de sa créature vénérée (d’innombrables fois portée à la scène comme aux grand et petit écrans dans des productions de très inégal intérêt), Conan Doyle, fervent adepte du spiritisme, concevra des aventures de son détective jusqu’en 1927. Il rendit l’âme le 7 juillet 1930 à Crowborough, dans le Sussex.

En même temps que les deux volumes, la Pléiade publie un album très documenté, écrit par Baudouin Millet, qui précise, par exemple, que la célébrissime expression « Elémentaire, mon cher Watson » est apocryphe : « elle apparaît dans Psmith, journaliste (1915), de l’humoriste et grand admirateur de Conan Doyle P.G. Wodehouse. » Pour la première fois, un album de cette collection est consacré à un personnage de fiction.

Sherlock Holmes | Récits et romans | Arthur Conan Doyle | deux volumes publiés sous la direction d’Alain Morvan, avec la collaboration de Claude Ayme, Laurent Curelly, Baudouin Millet et Michaël Popelard, auteurs de nouvelles traductions de l’anglais | Gallimard, collection « Bibliothèque de la Pléiade » (numéros 678 et 679), 1246 pp. et 1174 pp., 62 € chacun jusqu’au 31 octobre 2025, après : 68 €

★★★ Album Sherlock Holmes | Essai | Baudouin Millet | 252 pages avec 222 illustrations, Gallimard, collection « Les Albums de la Pléiade » (numéro 64). Offert pour tout achat de trois volumes de la Pléiade.