Emmanuel LANGELLIER, Media365 : publié le jeudi 10 juillet 2025 à 22h15

Une polémique sur l’arbitrage électronique s’est invitée à Wimbledon où il vient d’apparaître cette année. Le sujet crispe régulièrement, même s’il faut se faire à cette révolution devenue évolution.

De ce Wimbledon 2025, on retiendra notamment les vainqueurs évidemment, l’incroyable abandon de Grigor Dimitrov alors qu’il menait deux sets à rien contre Jannik Sinner , le fiasco des Français et une grosse polémique arbitrale. Dimanche dernier, en 8es de finale, Anastasia Pavlyuchenkova a été victime d’une erreur invraisemblable contre la Britannique Sonay Kartal . La Russe de 34 ans, finaliste à Roland-Garros en 2021, s’est finalement imposée (7-6, 6-4) mais elle se souviendra probablement un long moment de cette séquence très particulière. Durant le premier set, accroché, l’adversaire britannique de Pavlyuchenkova a délivré un coup droit bien trop long au-delà de la ligne de fond de court, ce que tout le monde a vu, à vitesse réelle et également au ralenti. La joueuse russe avait normalement gagné ce point qui lui permettait alors de mener 5-4, mais l’arbitre a décidé de faire rejouer le point dans une incompréhension totale. Le stade n’a pas compris, comme la 50e mondiale, furieuse. « Ils m’ont volé le jeu, ils l’ont volé », s’est emportée la Russe.

Pavlyuchenkova victime d’une « erreur humaine »

Pavlyuchenkova a été en réalité victime d’un bug de l’arbitrage électronique. Le système, mis en place cette année, n’a pas fonctionné et l’arbitre de chaise a préféré faire rejouer le point, plutôt que de le donner à la Russe. Le lendemain, la directrice générale de Wimbledon a expliqué qu’une « erreur humaine » avait conduit le système d’arbitrage automatisé à être « désactivé » en plein match, expliquant être « profondément déçue » par cet incident isolé. Désactivé entre chaque match, le fameux système l’a été en pleine rencontre « par inadvertance »… Pavlyuchenkova a ensuite demandé qu’un « plan clair » soir établi en cas de défaillance informatique, soulignant que les arbitres de chaise « sont un peu perdus, ils ne savent pas quoi faire ». Ce n’est pas le premier souci du genre en tennis. Taylor Fritz avait pesté l’été dernier à Cincinnati après avoir dû rejouer un point qu’il avait normalement gagné lors de la tournée américaine sur dur précédant l’US Open. Avant lui, son compatriote américain Frances Tiafoe avait été victime d’une panne à Montréal.

« Mise à jour de l’arbitrage ATP : après de récents problèmes techniques à Montréal et Cincinnati, nous avons procédé à une révision approfondie de nos protocoles. À l’avenir, si l’arbitre de chaise ou le Hawk Eye détermine au cours d’un échange qu’une balle était sortie plus tôt dans le point (mais n’a pas été signalée par le système), cette décision sera maintenue », avait écrit l’ATP, l’instance gouvernante mondiale du tennis masculin professionnel . L’arbitrage électronique, qui a supprimé les juges de ligne au bord du terrain, suscite donc régulièrement la polémique depuis qu’il a été instauré en 2021 à l’Open d’Australie. C’était à l’époque une révolution. Qui est devenue une évolution. En place à l’US Open depuis 2023, il est donc présent depuis cette année à Wimbledon, troisième épreuve du Grand Chelem de la saison qui a aussi cédé aux sirènes de la modernité. Au départ, le Hawk-Eye (l’œil du faucon), qui peut annoncer les fautes en direct (via une vois métallique enregistrée) grâce à plusieurs caméras réparties autour du court, offrait un complément aux juges de ligne.

La technologie a conquis la confiance des joueurs, Roland-Garros résiste

Mais il s’est répandu, et l’ATP a généralisé l’arbitrage électronique à l’ensemble de ses tournois. Si bien que ces fameux juges de ligne sont en voie d’extinction. Roland-Garros, lui, résiste encore, ce qui n’est pas le cas des autres tournois sur terre battue. Arthur Fils a critiqué l’arbitrage électronique fin avril, l’estimant peu fiable. « C’est horrible. Ça fait quelques semaines qu’on joue avec l’arbitrage électronique. On est sur terre, il y a des marques. Là, j’ai reçu un service deux ou trois centimètres dehors et quand tu regardes la vidéo, ça te dit que ça accroche la ligne. Je trouve ça horrible. Pour moi, sur terre, il faut revenir aux juges de ligne et faire confiance au jugement des arbitres, continue-t-il. Maintenant, l’arbitre ne fait plus rien », avait lâché le Français durant le Masters 1000 de Madrid.

Pourtant, alors que la mesure avait divisé le circuit lors de sa mise en place, la technologie a conquis la confiance des joueurs. Le tennis de demain est déjà celui d’aujourd’hui. Mais, même robotisé, le système peut avoir ses failles, comme dans le football. En 2019, le VAR, l’assistance vidéo à l’arbitrage, n’avait pas marché pendant le match Monaco-Strasbourg, ce qui avait entraîné la colère de l’ASM qui aurait pu bénéficier d’un penalty. « Ce n’est pas la première fois qu’il y a des dysfonctionnements, mais sur les 200 matchs avec la VAR jusqu’ici, cela reste à la marge. Quand une technologie de pointe est mise en place, il y a toujours un risque de dysfonctionnement », avait assuré le directeur technique de l’arbitrage Pascal Garibian.

Le foot, aussi, a ses polémiques

L’Angleterre, aussi, a vu surgir des polémiques liées à l’arbitrage vidéo. Cette saison, lors de la dernière journée, Aston Villa ne décolérait pas après sa défaite contre Manchester United (0-2) qui l’avait privé de Ligue des champions. Une grossière erreur d’arbitrage avait privé les Villans d’un but licite, annulé par l’arbitre qui avait sifflé une faute inexistante avant que le ballon ne franchisse la ligne. Le VAR avait confirmé l’absence de faute mais l’arbitre ayant sifflé avant la fin de l’action, il était impossible de revenir sur la décision… Et MU avait marqué derrière. Le club de Birmingham avait saisi l’organisme de l’arbitrage anglais, sans succès. Anastasia Pavlyuchenkova a, elle, reconnu ne « pas avoir de rancoeur, surtout après avoir gagné ». Mais en cas de défaite, « j’aurais dit que je déteste Wimbledon et que je ne reviendrai plus », a-t-elle ajouté sur le ton de la rigolade. Si l’arbitrage électronique peut crisper, on peut encore appréhender cela de façon plus légère.