La France, pour l’instant, n’a recensé aucun cas autochtone de FHCC. Mais des cas importés ont déjà été observés en Espagne et en Grèce. © Freepik
Depuis le printemps, la Turquie fait face à une explosion sans précédent de morsures de tiques, notamment à Istanbul et dans plusieurs provinces rurales du nord-est. Avec à la clé plusieurs décès.
Ces tiques ne sont pas de simples nuisibles, elles appartiennent à l’espèce Hyalomma marginatum, une espèce invasive, thermophile (qui aime la chaleur), et vectrice de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo (FHCC), une maladie virale à haut risque. Face à ce potentiel infectieux, la France, plus habituée à se prémunir contre la maladie de Lyme et autre encéphalite à tiques, doit-elle rester sur ses gardes ? Ces nuisibles sont-ils déjà là ? Le point.
Une épidémie au ras du sol Une tique géante… et dangereuse
Contrairement à la tique européenne que l’on connaît dans nos forêts, Hyalomma marginatum a de quoi inquiéter. Elle est :
Sous l’effet du réchauffement climatique, cette tique a largement étendu son territoire. Elle est désormais implantée dans toute la Turquie, et a été repérée dans le sud de l’Europe, notamment en Espagne, en Italie et en Corse, selon l’ECDC (Centre européen de prévention et de contrôle des maladies).
En France métropolitaine, la tique Hyalomma marginatum a été identifiée pour la première fois en octobre 2023 comme potentiellement porteuse de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo (FHCC). Repérée dans 11 départements du sud, dont les Bouches-du-Rhône et les Pyrénées-Orientales, cette tique peut transmettre le virus via le sang. Néanmoins, aucun cas humain n’a été recensé dans l’Hexagone.
La fièvre hémorragique de Crimée-Congo, c’est quoi ?
La fièvre hémorragique de Crimée-Congo est une maladie virale rare, mais grave. Le virus, appelé CCHFV (Crimean-Congo Hemorrhagic Fever Virus), peut provoquer :
- Fièvre brutale, douleurs musculaires, maux de tête,
- Puis, dans les formes graves, troubles hémorragiques internes, vomissements sanglants, atteinte hépatique,
- Avec un taux de mortalité estimé entre 10 % et 40 %, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Il n’existe actuellement ni vaccin ni traitement spécifique. La prise en charge repose uniquement sur la prévention et le traitement symptomatique.
16 morts recensés, 5 000 cas de morsures en un mois
Depuis mai 2024, le ministère turc de la Santé confirme que 16 personnes sont décédées des suites de la FHCC. Rien qu’à Istanbul, plus de 5 000 habitants se sont présentés à l’hôpital pour des morsures de tique en juin 2025, selon les données publiées par le site turc HaberTürk et relayées par Courrier International le 8 juillet.
Un chiffre inquiétant, car il concerne une zone urbaine densément peuplée, où ce type d’épisode était jusqu’alors extrêmement rare.
Tiques : la chasse est ouverte
Face à la panique, les autorités turques ont mis en place plusieurs mesures de contrôle, entre désinfections massives dans les parcs et zones vertes urbaines, à base d’insecticides puissants et sensibilisation de la population sur les comportements à risque.
Plus étonnant : le lâcher de 500 perdrix à Istanbul ! Ces oiseaux sont des prédateurs naturels des tiques. Une stratégie originale, mais pas sans conséquences. Plusieurs associations environnementales turques, dont TEMA Vakfı, alertent qu’en “éliminant massivement insectes, fourmis et araignées, on détruit les équilibres naturels… et on risque de favoriser à long terme les tiques plutôt que de les freiner”.
Tiques tueuses : que faire face à la menace ? Doit-on s’inquiéter en France ?
Non, pour l’instant pas de panique à avoir en France. Car ce n’est pas un hasard si la Turquie est aujourd’hui en première ligne. Plusieurs facteurs s’additionnent :
- Un climat de plus en plus chaud et sec, idéal pour le développement de Hyalomma marginatum ;
- Une grande présence d’élevage bovin, réservoirs potentiels du virus ;
- Et un déficit de prévention, notamment en milieu rural.
Le professeur Ateş Kara, spécialiste en maladies infectieuses à l’université Hacettepe d’Ankara, rappelait dans le quotidien Hürriyet que “les tiques peuvent pondre jusqu’à 10 000 œufs. Elles sont invisibles la plupart du temps, car elles vivent cachées au sol ou dans les broussailles”.
Que faire si vous voyagez en Turquie ?
Le ministère belge des Affaires étrangères a notamment mis à jour ses recommandations sanitaires en juin 2025. Voici les conseils essentiels à suivre si vous partez dans la région :
- Portez des vêtements longs et clairs (pantalons, manches longues, chaussettes hautes) dans les zones à risque.
- Utilisez un répulsif anti-tiques contenant du DEET (au moins 30 %) ou de l’icaridine.
- Évitez les zones de hautes herbes, les prairies et les champs à l’aube ou au crépuscule.
- Inspectez votre peau et vos vêtements après chaque promenade.
En cas de morsure :
- N’arrachez jamais la tique à mains nues. Utilisez un tire-tique.
- Désinfectez soigneusement.
- Et consultez immédiatement un médecin.
À SAVOIR
Selon l’ECDC, le virus de Crimée-Congo est classé comme “pathogène émergent à potentiel pandémique”. Il figure sur la liste des agents à surveiller de près dans les années à venir.
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