Un agent du SBU a été abattu jeudi matin en pleine rue à Kiev. L’attaque, rare même en temps de guerre, suscite des accusations croisées entre Ukrainiens et Russes. Qui était la victime ? Que s’est-il passé ? 20 Minutes vous explique tout.
Que s’est-il passé à Kiev jeudi matin ?
Le Service de sécurité ukrainien (SBU) a annoncé le 10 juillet qu’un de ses agents avait été tué dans le district de Holosiivskyi, au sud de Kiev. Les forces de l’ordre ont découvert le corps d’un homme atteint de plusieurs balles, a indiqué la police dans un communiqué. Une enquête criminelle a été ouverte pour meurtre, a précisé le SBU, ajoutant que les autorités « prennent toutes les mesures nécessaires pour établir les circonstances du crime et traduire les responsables en justice ».
Selon des sources policières citées par Ukrainska Pravda, la victime a été tuée vers 9 heures du matin : un homme cagoulé s’est approché d’elle et a tiré cinq fois à l’aide d’un pistolet équipé d’un silencieux, avant de prendre la fuite. Une vidéo issue d’une caméra de surveillance, relayée par plusieurs chaînes Telegram ukrainiennes, montre la scène, mais elle n’a pas pu être authentifiée par l’AFP.
Qui était la victime ?
D’après Ukrainska Pravda, l’homme tué est le colonel Ivan Voronych, un officier du SBU âgé de 51 ans. D’après un post Facebook de Yuriy Mykhalchyshyn, ancien employé du SBU et aujourd’hui officier au sein du régiment Azov, la victime avait longtemps servi dans le département de la défense de l’État national à Lviv, avant d’être transférée au contre-espionnage en 2014. Il se souvient de lui comme d’un « officier humble, patriote et correct ».
Ivan Voronych faisait partie des premiers agents à avoir été envoyés dans les zones occupées par la Russie après la révolution de Maïdan et aurait aussi participé à la détention d’un groupe de saboteurs russes, appelé Yamal. Il occupait le poste d’officier supérieur opérationnel au sein de la 1re division de la 16e direction du Centre des opérations spéciales du SBU, une unité connue pour être impliquée dans des sabotages et attentats en Russie.
Dans un message d’hommage publié sur les réseaux sociaux cité par Le Parisien, Roman Chervinsky, ex-officier du renseignement militaire ukrainien, a précisé que la victime avait fondé une unité spéciale au sein du SBU « qui pose aujourd’hui beaucoup de problèmes » à la Russie. Il n’en a toutefois pas révélé le nom.
Qui pourrait être derrière cette attaque ?
L’enquête officielle est toujours en cours, mais les spéculations vont bon train. L’attaque aurait été menée par un « saboteur ennemi », avance Roman Chervinsky. La piste d’une opération russe est soutenue par plusieurs analystes, notamment en raison du profil de la victime et du mode opératoire.
En Russie, certains commentateurs se sont d’ailleurs réjouis de l’assassinat. Le journaliste Alexandre Kots, correspondant de guerre du quotidien pro régime Komsomolskaya Pravda, a salué cet acte : « C’est un bon signe. L’ennemi doit avoir peur sur son propre territoire. »
Il a également affirmé qu’« il ne faut pas frapper les centres de décision, mais les personnes qui prennent les décisions », accusant Voronych d’être « directement lié à l’organisation d’attentats terroristes en Russie ». La chaîne Telegram prorusse Rybar a estimé que « les motifs pour éliminer cet agent du SBU étaient nombreux », tout en n’excluant pas une lutte interne au sein du SBU.
Pourquoi cette attaque est-elle exceptionnelle ?
Malgré la guerre en cours, une exécution en pleine rue reste un événement rare à Kiev. Depuis l’invasion de février 2022, plusieurs assassinats ciblés ont été signalés de part et d’autre, notamment contre des responsables politiques, militaires ou des figures liées au renseignement. Mais un tel acte en plein jour, dans la capitale ukrainienne, demeure exceptionnel, soulignant la gravité de l’opération.