«Les cérémonies qui partent en vrille ? C’était un peu ma spécialité, celle de toutes personnes qui travaillent dans les forces de l’ordre finalement », lance Marcus*, 44 ans, ex-gendarme, souriant en se remémorant ses années de service. Pendant près de vingt-cinq ans, il est intervenu « presque tous les week-ends » au moment de la saison des mariages, « à partir de Pâques jusqu’en septembre », partout où il a exercé, en Normandie, en Picardie et en Rhône-Alpes.
« Parfois, vous tombez dans des événements, vous vous demandez vraiment comment les gens se sont mis dans ces situations, rigole-t-il. Même un scénariste de film n’y aurait pas pensé. Vous croyez avoir tout vu mais vous vous rendez compte que non ! »
« L’amant a reçu deux, trois gifles »
L’une des anecdotes « les plus marquantes » de la carrière de Marcus est digne d’un film Netflix. « Pendant la soirée, le marié a retrouvé sa femme dans les toilettes, la jupe relevée, en pleins ébats sexuels avec son témoin, un ami très proche de la famille, lance-t-il, encore choqué. L’époux s’est alors jeté sur l’autre homme. Puis les invités ont tenté de s’interposer. Là, c’est vraiment parti en vrille. »
La mariée a confié aux gendarmes « qu’elle avait un peu bu, qu’elle était dans l’euphorie et qu’elle n’avait pas vraiment réalisé ce qu’il se passait », relate Marcus. Il assure « ne pas vouloir la juger » mais glisse : « enfin bon, se tromper d’homme le jour de son mariage, c’est quand même une drôle de nuit de noces ! » Finalement, personne n’a été interpellé ce soir-là et aucune plainte n’a été déposée. « L’amant, la seule personne qui a été violenté, avait reçu deux ou trois gifles mais rien de répréhensible. Tout est bien qui finit bien, ou presque », commente-t-il, un petit rire dans la voix.
Marcus poursuit : « Nous, quand on débarque, on ne sait rien ou presque, simplement la nature de l’intervention et où elle se déroule. On doit comprendre ce qu’il s’est passé, démêler les rôles de chacun entre les auteurs et les victimes… Ce n’est pas toujours ce qu’on pense. » Il se souvient d’une autre intervention – pas lors d’un mariage mais tout aussi « improbable » : « Une fois, on nous appelle pour un homme en slip suspendu à un balcon au 2e étage d’un immeuble. On pense à une tentative de suicide. En réalité, il se cachait après avoir été surpris en plein coït avec la femme d’un autre. Le mari est rentré trop tôt et le type a cru que fuir par le balcon était une bonne idée… »
Des scènes dignes d’un « saloon »
Mais revenons à la noce. L’ex-gendarme raconte qu’il a aussi parfois dû « embarquer » des invités en raison de violences. « Je me souviens d’arriver sur place et de découvrir des scènes de saloon. On se serait cru dans le Far West », assure-t-il. Avant de décrire : « Des invités qui se cassent des chaises en bois sur le dos, des tables qui volent… Et des bagarres générales. »
Et quand les forces de l’ordre débarquent, il y a deux types de comportements. « Soit ça calme les gens directement et ils essaient de montrer que personne n’a rien fait. Soit, à l’inverse, ils en profitent pour mettre les derniers coups parce qu’ils savent qu’ils ne pourront plus le faire ensuite. »
« Toutes les classes sociales » sont touchées
D’après Marcus, les mariages « qui partent en vrille » de cette manière « touchent toutes les classes sociales ». « Dans les milieux populaires, ça jette le mobilier, ça se met des coups de poing dans la figure, ça fait du bruit. Chez les plus bourgeois, c’est plus retenu. Ça se défie comme à l’époque des rois, en duel. Ça se déchire les chemises, ça se pousse. C’est différent dans les méthodes mais la finalité est la même. Et le dominateur commun, c’est l’alcool. »
En vingt-cinq ans de service, l’ex-gendarme a vu des schémas se répéter : s’il était appelé pour « tapage » par des voisins parce que la fête faisait trop de bruit à 22 heures, il était « sûr à 100 % » de revenir deux heures plus tard pour une rixe. « C’est la classique : des réunions de famille – mariages ou anniversaires – qui ne s’entendent pas forcément. L’alcool délie les langues, les vieux dossiers ressortent et c’est le début du chaos. »
Notre dossier sur les mariages
Une chose est sûre : Marcus n’est pas près d’oublier ses années sur le terrain. « Des histoires comme ça, j’en ai vécu une bonne quinzaine, rien que dans des mariages. Je ne vous raconte pas le reste, on en aurait pour des heures encore », conclut-il en souriant.
*Le prénom a été modifié à la demande de la personne interviewée.