Par
Solène Lavenu
Publié le
12 juil. 2025 à 19h56
L’entreprise ACPP (anciennement les Ateliers de constructions du petit parc), située à Digulleville (Manche), est connue dans le secteur du nucléaire. Elle a été un fleuron de l’industrie dans les années 90 et 2000.
Depuis quelques années, c’est sa gestion et ses crises à répétition qui ont fait les titres de l’actualité jusqu’à son rachat, devant le tribunal du commerce, en 2021, par Fives Nordon. Ont suivi des semaines de mouvements sociaux pour alerter les pouvoirs publics de la situation. ACPP est, depuis, restée discrète. Trop discrète selon l’avis des syndicats de l’entreprise.
Le « début d’une nouvelle ère »
« Les investissements dans l’atelier tardent, les contrats ne rentrent pas beaucoup. Nous avons obtenu 1 % d’augmentation aux négociations annuelles obligatoires (NAO) et avons évoqué du chômage partiel au dernier CSE », détaillent les représentants.
« Quand on reprend une entreprise en difficulté, il y a forcément un temps de redressement. Ce n’est pas pareil que de racheter une entreprise florissante. Et l’atelier de chaudronnerie a été plus long à redémarrer que nous avions imaginé », avoue Jean-Jacques Depuydt, le PDG du groupe Fives Nordon ACPP.
Mais les années noires semblent terminées et l’avenir de l’entreprise est de nouveau radieux. ACPP, portée par Fives Nordon, vient de signer un contrat pour la construction de plusieurs pièces pour les EPR nouvelle génération annoncées par Emmanuel Macron lors de son plan de relance du nucléaire.
15 millions d’investissement
300 équipements de chaudronnerie vont être construits dans les bâtiments historiques de Digulleville, commune déléguée de La Hague, aux portes de l’entreprise Orano. « Une série d’études est déjà lancée, portée par Fives Nordon pour une durée de deux ans en comptant la phase d’approvisionnement. Suivra en 2027, la construction chez ACPP », explique le PDG.
Ainsi, ce contrat, « signé avec Fives Nordon, sera sous-traité (notamment la chaudronnerie) à ACPP », détaille encore Jean-Jacques Depuydt.
D’ici là, d’autres marchés occuperont les salariés des ateliers. « Nous avons quelques marchés, notamment pour intervenir sur le circuit primaire du réacteur de recherche Jules-Horowitz (Bouches-du-Rhône) à Cadarache ou avec Orano. Nous ne sommes actuellement pas dans des grandes années, mais le secteur nucléaire résiste mieux que d’autres filières, surtout dans le Cotentin. »
Et le vent devrait tourner dans les prochaines années. Ce contrat pour les EPR 2 doit être le premier d’une série. « Nous avons désormais une meilleure visibilité. C’est l’avantage du secteur nucléaire, nous avons des contrats sur du long terme », explique Jean-Jacques Depuydt. Cela permet de relancer l’entreprise de chaudronnerie dans la course des sous-traitants, grâce, notamment, à de nouveaux investissements à hauteur de 15 millions d’euros dans l’entreprise ACPP sur les cinq prochaines années.
« Forcément une bonne nouvelle »
« Nous entrons dans un premier plan d’investissement de 6,5 millions avec la construction d’un nouvel atelier de 3 000 m² », explique encore le directeur.
Les anciens bâtiments dont les 8 500 m² d’atelier vont aussi être rénovés et équipés de machines plus récentes et davantage automatisées. « Cela va permettre d’avoir une ligne acier blanc (inox) et une autre d’acier noir (carbone) bien distinct. »
Des investissements espérés depuis longtemps par les syndicats représentatifs dans l’entreprise. « C’est forcément une bonne nouvelle et on espère tous une période faste. Mais nous sommes devenus prudents, nous avons du mal à être super optimistes. D’autant que pour ACPP, le contrat ne commence qu’en 2027, il va falloir tenir jusque-là », relativise Arnaud Dumont, représentant CGT.
Un contexte plus favorable
Des doutes balayés par Jean-Jacques Depuydt. « Quand nous avons acheté l’entreprise en 2021, le gouvernement envisageait la fermeture de centrales nucléaires, ne voyait pas d’avenir à Orano La Hague au-delà de 2040… Aujourd’hui, avec le plan de relance du nucléaire, les nouveaux EPR, la prolongation de l’usine Orano La Hague, les nouvelles usines envisagées… Le contexte est beaucoup plus favorable pour envisager de vrais investissements », explique le directeur.
D’autant que Fives Nordon s’était aussi porté acquéreur du site ACPP en 2023. « Cela permet aujourd’hui d’envisager ce nouveau bâtiment sans crainte. Une bonne chose dans le contexte actuel », sourit le PDG.
Alors si le contrat décroché « ne sauve pas ACPP, il permet d’écrire un nouveau chapitre, avec de nouveaux collaborateurs ». Jean-Jacques Depuydt espère embaucher une centaine de nouveaux collaborateurs dans ces cinq prochaines années. Un « beau challenge ».
Site unique
Le site de l’entreprise ACPP, situé à Digulleville, à quelques mètres de l’entrée d’Orano, a une particularité : il possède un blockhaus au milieu de l’entreprise.
« Même s’il nous permet de faire les épreuves hydrauliques, il prend de la place », sourit le PDG du groupe Fives Nordon ACPP, Jean-Jacques Depuydt.
Une spécificité qui a, entre autres, séduit le dirigeant. Après avoir racheté l’entreprise en 2021, le groupe Fives Nordon s’est porté acquéreur du terrain. Cela permet aujourd’hui d’entreprendre sereinement une extension des ateliers, un luxe à l’heure actuelle.
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