Début juillet 1975. L’été est bien installé dans la Loire et les estivants sont déjà arrivés en nombre. Dans le centre-ville de Saint-Étienne, sur la colline de Villebœuf, le petit camping de Chantegrillet (*) fait le plein. On y trouve des travailleurs saisonniers, mais aussi des touristes dont cette famille de britanniques qui passe les portails dans la matinée du dimanche 6 juillet 1975 pour installer son petit camping-car et passer quelques jours dans la cité stéphanoise.
Mais dans le torpeur de l’été, c’est un véritable drame qui est découvert le mardi 8 juillet 1975 en fin d’après-midi par le gardien du camping. La veille déjà, avec son épouse, ils avaient remarqué la présence de chaussures devant le Combi Volkswagen de la famille. Tout au long de la journée du mardi, les chaussures n’ont pas bougé et aucun mouvement n’est observé autour du véhicule. Le gardien décide alors de s’approcher : c’est à ce moment qu’il découvre la catastrophe.
En plein cœur de l’été, l’affaire était évoquée en première page des éditions du mercredi 9 juillet 1975. Photo archives La Tribune – Le Progrès
Quatre corps dans « un indescriptible fouillis »
« A l’intérieur du minuscule véhicule, où régnait un indescriptible fouillis, gisaient inanimés sur la couchette du bas le père et la mère, tandis que sur la couchette supérieure paraissaient dormir leur fils et leur fille », décrit La Tribune – Le Progrès dans son édition du mercredi 9 juillet 1975.
Aussitôt, les secours sont alertés. Mais pour la famille de touristes britanniques, il est déjà trop tard. Sans délais, le Combi et les quatre dépouilles sont transportés au centre médico-légal de l’hôpital de Bellevue.
« A priori, on peut penser à une asphyxie par confinement, le véhicule ayant été trouvé fermé, sans aération apparente », écrit, dès le lendemain, notre journaliste dépêché sur place. Les investigations doivent alors confirmer si l’asphyxie est bien la cause du décès, ou si d’autres hypothèses doivent être explorées : empoisonnement, intoxication alimentaire…
Asphyxiés par leur réfrigérateur à gaz
C’est finalement de Lyon, où les autopsies sont pratiquées au matin du jeudi 10 juillet 1975, que les réponses parviennent. Le couple de britanniques (tous les deux âgés de 40 ans) et ses deux enfants (âgés de 6 et 10 ans), « ont succombé à une asphyxie causée par le confinement dans lequel ils se trouvaient et le fonctionnement de leur réfrigérateur de camping à gaz ».
D’après les constatations des légistes, la mort remonte à l’après-midi du lundi. Les quatre membres de la famille « s’étaient allongés, tout habillés, pour une sieste […]. Avant de s’installer, ils avaient fermé toutes les issues de leur véhicule, sans doute pour dormir plus tranquillement au bord de la route où ils étaient stationnés ». Ils se sont endormis pour ne jamais se réveiller.
Le gardien du camping, encore sus le choc après la découverte du drame. Photo archives La Tribune – Le Progrès
« Je n’osais pas aller frapper »
Dans le camping de Chantegrillet, qui affiche quasiment complet du fait de la tenue du congrès du syndicat national des instituteurs, cette affaire tragique sème la consternation. « C’est souvent que les gens dorment tard dans la journée », explique le gardien du camping à notre journaliste. « Je n’osais pas aller frapper, pensant que j’allais réveiller cette famille où l’importuner ».
(*) Le camping de Chantegrillet était situé dans l’actuelle allée de Chantegrillet, en pleine ville. Ouvert dans les années cinquante, il a fermé ses portes en 2004.