Quand il fait chaud, il faut se donner de l’air. C’est l’équation de beaucoup de Français en ces temps caniculaires. C’est aussi celle de Nathalie Appéré sur les questions de sécurité, avant le démarrage d’une nouvelle campagne aux municipales à la rentrée.

La délinquance et le narcotrafic ? Les épisodes d’ultra-violences qui se sont succédé dans la capitale bretonne cet automne, cet hiver et au printemps, risquent d’être le bout de sparadrap accroché aux basques de la maire socialiste, candidate à un troisième mandat en mars prochain.

Inquiétude majeure

Dans son équipe, “la place écrasante” prise par ce thème dans le débat public préoccupe. Comment reprendre “le lead” sur le narratif pour éviter que les débats ne tournent que là-dessus ces prochains mois ?, s’inquiétait l’un des piliers de la majorité municipale il y a quelques semaines (lire Le Mensuel de Rennes de juin). Quelles réponses données aux “vagues d’émotion” suscitées par ces violences, qui peuvent, parfois, “nous submerger” ?, s’est aussi interrogée Nathalie Appéré, en conseil municipal le 30 juin.

Pour Nathalie Appéré, cette initiative répondait à un triple objectif. Prévenir plutôt que subir. Contrecarrer les attaques de son opposition, en les plaçant face au constat froid de deux éminents représentants de l’État. Et partager le fardeau des responsabilités d’un fléau qui ne pourra être réglé sans une “détermination collective, chacun dans son rôle et ses prérogatives”, a-t-elle rappelé.

L’intéressée avait minutieusement préparé la séquence. Quatre jours plus tôt, le 26 juin, elle a réuni une assemblée plénière du Conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD). Habituellement dévoilées à l’automne, les statistiques de la délinquance ont été – opportunément – révélées juste avant le conseil.

Ainsi, la maire a pu pointer, sans triomphalisme, une “baisse sensible” de la délinquance générale (-7,3 % de faits constatés), enregistrée entre 2023 et 2024 à Rennes. “Un fait de délinquance reste un fait de trop, a-t-elle pondéré. Ces chiffres recouvrent des réalités complexes qu’il faut analyser sur le temps long. La tendance est repartie à la hausse sur les premiers mois de l’année 2025.”

Quand le préfet contredit les oppositions

“Il n’y a pas, sur le moyen terme, d’explosion générale de la délinquance, comme on a pu parfois l’entendre dire”, a aussi convenu le préfet, en pointant des “indicateurs plutôt bien orientés” en 2024, rapportés à la moyenne des faits constatés depuis 2016. “En revanche, on observe une progression spectaculaire des délits liés aux stupéfiants”, a-t-il précisé (+ 169.9 % entre 2019 et 2024, selon le CLSPD), ainsi qu’une “augmentation très forte des violences sexuelles et intrafamiliales, comme sur l’ensemble du territoire. C’est une préoccupation majeure, mais ce n’est pas une singularité rennaise”.

Répondant indirectement aux saillies de l’opposition, le représentant de l’État a distribué quelques bons points à la Ville, sous les yeux de son édile. En matière de vidéosurveillance, il a notamment salué « une trajectoire » qu’il « encourage », dans un contexte où l’usage régulier de drones rend les forces de l’ordre « moins dépendantes aux caméras de rue ». Rennes en comptait 76 en 2023 contre 110 en 2025.

Coordination polices municipale et nationale

Autre sujet « régulièrement évoqué » (comprendre par les oppositions), selon le préfet, le rôle de la police municipale. Là aussi, Amaury de Saint-Quentin a salué une « coordination opérationnelle très étroite, au quotidien », avec la Police nationale. « La police municipale n’est pas en situation d’intervenir dans certaines situations à risque, a-t-il tempéré. Néanmoins, elle peut soulager la Police nationale de missions qui ne présentent pas de difficulté ». Par ailleurs, le préfet « n’a pas identifié de manque particulier à Rennes en matière d’arrêtés municipaux ».

Critiqué par la maire et ses équipes sur la question des renforts de police, le représentant de l’État a rappelé « les efforts constants » de celui-ci. Depuis 2016, les effectifs de gardiens de la paix affectés à Rennes ont augmenté de 13 % a-t-il précisé. « Rennes n’est donc pas négligée loin de là ».

Répit précaire

Au terme de ce « débat républicain de fond », mené entre les élus et leurs deux invités, la maire s’est dotée de « quelques munitions » dont elle pourra se servir contre ses oppositions dans les mois qui viennent. Alors que débute la trêve estivale, la future candidate aux municipales dispose d’un autre facteur favorable. Depuis les dernières fusillades de mai, Rennes n’a pas connu d’incidents majeurs sur le front du narcotrafic (à l’heure où nous mettons en ligne).

Maire, préfet et procureur l’ont rappelé. La « quasi-totalité » des auteurs présumés des principaux épisodes de violences de ces derniers mois ont été interpellés à l’issue d’enquêtes judiciaires poussées. Certains ont même déjà été condamnés à de lourdes peines. De quoi donner un peu d’air aux habitants et un répit, précaire, à la maire.