Il fait partie des trois favoris pour prendre le poste de directeur général du groupe Renault, à l’issue du court intérim, confié « à une personne neutre » à partir de ce 15 juillet 2025. Actuel directeur de la filiale à bas coût Dacia, le Breton Denis Le Vot est en balance avec le directeur des achats de Renault, François Provost et avec l’ancien responsable des achats et de l’approvisionnement de Stellantis, Maxime Picat. À 60 ans, c’est donc un Landivisien qui pourrait prendre la suite de l’Italien Luca de Meo à la tête du groupe au losange.

En Bretagne, l’information circule à bas bruit, depuis la démission surprise qui secoue le constructeur automobile français. Elle suscite fierté mais aussi interrogation, tant la personnalité de ce Finistérien de souche, né le 8 avril 1965 d’un papa menuisier et d’une maman institutrice, reste méconnue au pays. De la maire de Landivisiau Laurence Claisse à d’emblématiques patrons du territoire comme Claude Quéguiner ou Gilles Falch’un (président de Sill Entreprises), en passant par les concessionnaires Renault du secteur, « personne ne connaît vraiment ce monsieur ».

Dès la 4e, le jeune Denis Le Vot réalisait des dessins techniques exceptionnels. Je n’en ai vu que deux comme lui en 42 ans de carrière !

L’histoire de toute une vie

Très discrète elle aussi, sa famille se refuse à tout commentaire sur ce « fils prodige », admis après le bac à Landerneau à l’école des Mines de Paris, rentré chez Renault à 25 ans « et qui aime profondément son territoire et la Bretagne ». Son père, sa sœur aînée et un de ses frères vivent toujours à Landivisiau. Son autre frère habite Saint-Brieuc. Ils sont hôtesse d’accueil à la retraite, fonctionnaire ou surveillant en collège.

Ce vieux Landivisien décrit « des gens sportifs, serviables et engagés, pas du tout bling-bling et droits dans leurs bottes ». Le petit Denis pratiquait l’athlétisme au CA Landi et excellait à l’école. Cette ancienne élève de l’école Notre-Dame-des-Victoires se souvient « d’un garçon humble et brillant. Il avait déjà une carrure ». « Dès la 4e, il réalisait des dessins techniques exceptionnels. Je n’en ai vu que deux comme lui en 42 ans de carrière ! », se souvient cet ancien professeur de technologie au collège Saint-Joseph de Landivisiau.

« Tout ce qu’il a eu, il a été le chercher et il le mérite », indique encore ce proche. Pour Denis Le Vot, Renault est l’histoire de toute une vie : entré comme coopérant au Venezuela pendant son service militaire, le Finistérien a occupé plusieurs postes de direction dans la vente, le marketing, l’après-vente en France, en Russie et dans la région Eurasie. Il a encore été brièvement patron de l’allié Nissan pour l’Amérique du Nord en 2018, puis des véhicules utilitaires de l’Alliance en 2019 avant d’être nommé directeur de Dacia (et plus brièvement de Lada) par Luca de Meo, en 2021.

Denis est un pudique. Il travaille avec conviction et n’en fait pas publicité. Il est à l’opposé d’un homme de marketing comme Luca de Meo. Mais il a des bases solides et connaît la maison !

« Pas un homme de marketing »

Cette carrière à l’international l’a paradoxalement éloigné de ses terres et des réseaux bretons. Dans la série documentaire de Prime Vidéo « Anatomie d’un come-back », on voit un Denis Le Vot aussi à l’aise dans les usines Dacia en Roumanie qu’en test au volant du futur Bigster, le dernier-né des SUV hybrides de la marque. De ses origines terriennes et modestes, le père de trois enfants, marié à une enseignante, aurait gardé « le sens de la vraie vie ». Lui qui se destinait plutôt à passer un CAP de chauffeur routier remercie ses professeurs et l’école. « Je suis un pur produit de l’ascenseur républicain », s’est-il récemment confié dans Challenges.

Discret, donc. « Sympathique, simple, direct », dit-on de lui en interne. Dans le savoir-faire plutôt que le faire savoir. « Ce qui pourrait être son seul handicap à l’heure du choix », confie cet expert parisien de l’industrie automobile, qui l’a souvent rencontré. « Denis est un pudique. Il travaille avec conviction et n’en fait pas publicité. Il est à l’opposé d’un homme de marketing comme Luca de Meo. Mais il a des bases solides et connaît la maison ! »

Le gérant de la concession Renault de Landivisiau Julien Levillain a découvert il y a moins d’un an que l’actuel directeur général de Dacia, Denis Le Vot, était un enfant du pays. « Que ça soit dans le bourg ou dans le groupe, personne n’en fait publicité. »Le gérant de la concession Renault de Landivisiau Julien Levillain a découvert il y a moins d’un an que l’actuel directeur général de Dacia, Denis Le Vot, était un enfant du pays. « Que ça soit dans le bourg ou dans le groupe, personne n’en fait publicité. » (Le Télégramme/Sophie Prévost)« Toutes ses chances »

Il aurait donc « toute légitimité et toutes ses chances », à un moment crucial pour l’avenir du groupe de Boulogne-Billancourt. « Avec Dacia, Denis Le Vot a hérité du parent pauvre de Renault et en a fait le moteur des plus gros succès commerciaux, que sont Duster et Sandero, poursuit cet observateur. Il a su proposer des modèles pas chers et qui se vendent, avec une philosophie très simple : ne mettre que l’essentiel et écouter les gens. »

Depuis la concession Renault de Landivisiau, le jeune gérant Julien Levillain, 38 ans, valide. « Un directeur général venant d’une marque populaire, ça aurait du sens. De mon petit coin de Bretagne, je regarde avec attention les choix stratégiques qui vont être faits demain. Prenez la nouvelle Renault 5 tout électrique. Si elle était sortie en 90 CV en thermique, elle aurait cartonné. » Et de terminer, à l’adresse, qui sait, de Denis Le Vot : « Une petite marche arrière nous permettait peut-être d’avancer. »