En octobre 2023, le commandant de l’aviation navale espagnole [Flotilla de Aeronaves, FLOAN], le capitaine de vaisseau José Emilio Regodón Gómez, avait dit souhaiter une « décision rapide »au sujet du remplacement des treize chasseurs-bombardiers embarqués EAV-8B Harrier II [ou « Matador »] qui, de type STOVL [à décollage court et à atterrissage vertical], sont mis en œuvre par la 9e « Escuadrilla de aeronaves » depuis le navire d’assaut amphibie Juan Carlos I.

Le dossier est important car il sera de plus en plus compliqué de maintenir ces EAV-8B Harrier II en état de vol dans les années à venir, la FLOAN devant être la dernière à en disposer, l’US Marine Corps et la Marina Militare étant en train de remplacer les leurs par des F-35B. L’un des défis consistera à trouver des pièces détachées… ce qui ne sera pas une mince affaire.

« Peu importe de disposer de 99,99 % des pièces nécessaires car si, pour une raison quelconque, il en faut une parmi les 0,01 % manquantes, l’avion ne pourra pas voler », avait d’ailleurs souligné le commandant de la FLOAN, en mai 2023.

Or, la marine espagnole entend conserver ses capacités aéronavales, voire les accroître étant donné que Navantia a récemment été chargé de mener une étude de faisabilité en vue de construire un porte-avions similaire au « Charles de Gaulle », mais à propulsion classique. Une coopération avec la Turquie pourrait être scellée à cette fin.

De son côté, l’Ejército del Aire y del Espacio ne fait guère mystère de son intérêt pour le F-35A [la version classique du chasseur-bombardier de Lockheed Martin]. Et elle souhaiterait en acquérir une vingtaine d’exemplaires, afin de remplacer une partie de ses anciens F/A-18 Hornet de conception américaine.

« L’Espagne aurait pu réaffirmer son intérêt pour le chasseur de cinquième génération F-35 Lightning II pour un éventuel remplacement d’une partie des EF-18 et des AV-8B Harrier II », avait d’ailleurs avancé la « Revista Aeronáutica y Astronáutica », la revue officielle de la force aérienne espagnole, en 2024.

Seulement, le gouvernement espagnol, dirigé par Pedro Sanchez [PSOE], fait la sourde oreille, préférant mettre l’accent sur l’achat d’Eurofighter EF2000/Typhoon supplémentaires dans le cadre du programme Halcón ainsi que sur le projet SCAF [Système de combat aérien du futur], mené en coopération avec la France et l’Allemagne.

Justement, alors que le SCAF, en particulier sur son volet « avion de combat », fait de nouveau l’objet d’un bras de fer entre Paris et Berlin au sujet de sa gouvernance, le chef d’état-major des forces espagnoles [JEMAD], l’amiral Teodoro Esteban López Calderón, a subtilement plaidé la cause du F-35, lors d’une intervention devant le Nueva Economia Fórum, cette semaine.

Selon ses propos, rapportés par le site spécialisé espagnol InfoDefensa, l’amiral Calderón a clairement indiqué que « le F-35 fait la différence ». Ainsi, a-t-il dit, « nous n’avons évidemment pas d’autre solution pour un avion de cinquième génération doté d’une technologie furtive vraiment avancée. C’est la réalité ».

Si l’Espagne n’achète pas de F-35, alors « nous devrons faire avec les avions de quatrième génération dont nous disposons et attendre l’arrivée du SCAF un jour », a poursuivi le JEMAD. « Le problème, c’est que nous devrons attendre de nombreuses années », a-t-il insisté.

Pour autant, a-t-il continué, « cela ne veut pas dire que nous manquerons d’avions. Mais nous ne disposerons pas de la technologie furtive qui s’avère extrêmement utile dans certains conflits actuels », a-t-il conclu.