Plus un seul banc, boulevard Franck-Pilatte, dans le quartier du port de Nice. Tous – 13 exactement, entre le parc Vigier et la résidence Beau Rivage – retirés par les services municipaux, à la demande d’une partie des habitants du quartier. La raison? Ils attirent, la nuit, des regroupements tapageurs synonymes de nuisances et d’incivilités.
La mesure n’est pas nouvelle: « L’an dernier, rappelle la Ville, nous avions déjà procédé au retrait de ces bancs, à la demande des riverains, qui se plaignaient de nuisances causées par les regroupements, notamment le soir, autour de ces bancs. Ils avaient, comme promis, été réinstallés à l’issue de la période estivale. Cette année, les riverains du boulevard Franck-Pilatte ont émis le même souhait. »
« Des zonards le jour, des jeunes la nuit »
Plusieurs habitants du secteur n’en peuvent plus, en effet, de ces assises publiques qu’ils associent à de nombreux méfaits. À l’instar de ce couple, propriétaire d’un appartement à la résidence Bleu Rivage et victime d’une tentative de cambriolage avec effraction en présence du mari. Il pense « qu’un repérage des lieux a été effectué en amont, notamment depuis les bancs publics situés juste en face. » Et au-delà de cet acte isolé, « le quartier fait de plus en plus face à un climat d’insécurité et de laisser-aller ». Sont pointés du doigt: « Trafic de stupéfiants, stationnement anarchique avec des voitures en double file, bruits nocturnes, saleté croissante des trottoirs… » Parmi les doléances, adressées par courrier par ce couple, le 23 juin, au premier adjoint en charge de la sécurité, Anthony Borré, figure donc « le retrait immédiat des bancs publics pour empêcher le repérage et les attroupements ».
Norbert, également domicilié boulevard Franck-Pilatte, affirme s’être battu, avec d’autres habitants, « pour faire enlever les bancs proches des logements car ils attirent, le jour, des zonards fortement alcoolisés et, la nuit, des jeunes qui, jusqu’à 2 heures du matin au moins, mettent la musique à fond, dansent, jettent des détritus… »
D’autant que, pour Norbert, l’utilité de ces bancs, y compris la journée, est loin d’être évidente l’été: « Qui va s’asseoir au soleil sous 40 degrés? Et ce d’autant plus qu’on a le magnifique parc Vigier, doté de bancs ombragés, ouvert au public avec ses pelouses, ses arbres, ses jeux pour enfants, mais fermé la nuit. »
Une « solution de facilité » qui restreint le « lien social »
Le son de cloche n’est pas le même du côté du Comité de défense du quartier du Port, que préside Jean-Michel Bidart: on ne valide pas la suppression des bancs le long du boulevard. C’est Monique Martin, secrétaire, qui exprime le point de vue du groupement: « Nous comprenons les riverains qui demandent et se réjouissent du retrait des bancs, car effectivement, des jeunes font beaucoup de bruit la nuit, mais c’est à la police de faire respecter la loi et faire partir ces bandes. Le retrait des bancs, c’est la solution de facilité. »
En outre, cette disparition provoque un souci, doublé d’un mécontentement: « À cause de cela, on ne peut plus se poser ou se reposer. Ces bancs sont aussi un prétexte de rencontre, de lien social pour les gens du quartier, aimant se trouver là le matin ou le soir. Qu’il s’agisse de personnes isolées, de mères de famille… Car il n’y a plus un seul banc entre le kiosque La Gratta et Coco Beach. »
Que se passera-t-il à la rentrée? La Ville dit avoir proposé aux habitants mécontents « de remettre, au début de l’automne, des chaises individuelles, à l’image de celles installées place du Palais-de-Justice. »
Ce que disent les chiffres de la police municipale
Depuis le début de l’année, le bilan de la police municipale sur le secteur fait état de 24 interpellations, notamment pour infraction à la législation sur les stupéfiants, violences, vol ou recel, 155 verbalisations aux arrêtés majeurs du maire (dont 96 à l’arrêté anti-regroupement et 26 pour lutter contre la consommation d’alcool sur la voie publique) et 31 verbalisations liées aux incivilités (28 pour nuisances sonores).
« Trente-quatre caméras sont déployées sur l’ensemble du secteur [englobant Franck-Pilatte, Jean-Lorrain et le mont Boron], qui dispose aussi de cinq bornes d’appel d’urgence et de trois haut-parleurs de voie publique permettant de diffuser des messages en cas de regroupements pouvant être sources de nuisances. Des patrouilles sont organisées quotidiennement, en plus d’une présence physique permanente au poste de police municipale du Port, ouvert du lundi au vendredi, de 8 h 30 à 17 h. En cette période, les effectifs sont également renforcés jusqu’à la mi-septembre dans le cadre du dispositif estival… », rappelle la Ville.