Par

Thibault Nadal

Publié le

14 avr. 2025 à 18h32

Son principal adversaire, l’écologiste Jérôme Gleizes, estime qu’il a voulu se faire remarquer. Paul Hatte, lui, parle plutôt d’une volonté de créer « un électrochoc ». Vendredi 11 avril 2025, lors du dernier Conseil de Paris, le vice-président du groupe Union Capitale proposait que « les 250 bunkers désaffectés de la ville de Paris » soient utilisés pour accueillir des data centers.

Pour l’élu du 17e arrondissement, sa proposition se justifie par le cahier des charges imposé par Emmanuel Macron. Lors du sommet sur l’intelligence artificielle qui s’est tenu en février dernier dans la capitale, le président de la République a annoncé 109 milliards d’euros d’investissements privés. Une somme considérable qui va principalement servir à financer la construction de 35 centres de données dans tout le pays, dont sept en Île-de-France.

Mais aussi par l’absence de « foncier à Paris », développe Paul Hatte. Dans une interview au Parisien, Pénélope Komitès, adjointe (PS) à la maire en charge de l’innovation et de l’attractivité, expliquait que 5 000 m2 de surfaces au sol étaient nécessaires pour tenir les objectifs fixés par le chef de l’État. « C’est impossible », juge l’élu d’opposition.

« Il faut chercher ailleurs qu’en surface »

Paul Hatte  par exemple « ne se montre pas satisfait » du projet de data center, boulevard Voltaire, dans le 11e arrondissement qui est à ce jour le plus grand de France. Pour lui, la clé du succès se trouve donc dans les « sous-sols ».

Et son intervention au Conseil de Paris avait pour but d’inciter la mairie de Paris « à chercher ailleurs qu’en surface ». S’il reconnaît ne pas savoir si les 250 bunkers de la ville sont disponibles et prêts à l’emploi il propose également de réfléchir sur l’utilisation des 200 kilomètres de réseaux sous-terrains. « On a tout intérêt à se poser la question », affirme l’élu, candidat aux dernières élections législatives.

Avec 7 000 m2 de surface, le data center du boulevard Voltaire (Paris, 11e) est le plus important de France.
Avec 7 000 m2 de surface, le data center du boulevard Voltaire (Paris, 11e) est le plus important de France. (©HH / actu Paris)Deux visions opposées sur le réchauffement des sols

Pourtant, son idée suscite la controverse. Notamment chez Jérôme Gleizes, élu écologiste du 20e arrondissement. Auprès d’actu Paris, celui qui est aussi président de l’école des ingénieurs de la ville de Paris, a qualifié de « démagogique » la proposition de son adversaire politique. « La généralisation des data centers dans les bunkers serait un non-sens […] C’est toujours du rien au tout », précise-t-il, ciblant par ailleurs le chef de l’État. « Le problème du plan de Macron, c’est que ça manque de planification ».

Le principal point de désaccord entre les deux hommes se trouve dans l’utilisation de la chaleur générée par ces data centers. Jérôme Gleizes assure, lui, que cela « créerait une sur-production énergétique et de chaleur » et provoquerait « un réchauffement accéléré des sols ».

Paul Hatte, ingénieur de formation donc « ce n’est pas un sujet qui m’est étranger » et qui s’appuie sur des études internationales pour étayer son argumentaire, imagine « un système de récupération pour faire monter la chaleur » ou « des machines capables de transformer la chaleur en électricité ». « Ce n’est pas une idée farfelue, car cela a été déjà fait ailleurs, notamment dans des entreprises ».

Des projets alternatifs à Paris

Jérôme Gleizes rappelle que des projets existent déjà dans la capitale. Comme dans la piscine de la Butte-aux-Cailles dans le 13e arrondissement. Depuis 2017, l’eau est en effet chauffée grâce aux serveurs de la start-up Stimergy, installés dans les sous-sols du bâtiment. Une partie de l’énergie est ainsi convertie en chaleur par le biais d’une chaudière spéciale. Grâce à ce dispositif, 45 tonnes de CO2 peuvent être économisées chaque année.

Depuis octobre 2020, une école et la mairie du 11e arrondissement sont chauffées grâce aux eaux usées et les égouts de la ville de Paris. Un système qui sera utilisé pour la future place du Colonel Fabien (10e et 19e). « Il y a aussi un projet avec la RATP dans le métro », ajoute l’élu écologiste.

Ce débat sur les data centers s’invitera sans doute dans les prochains Conseils de Paris, puisque Paul Hatte promet « une proposition encore plus forte ». Pour cela, il va rencontrer un expert, ayant cartographié tous les bunkers de Paris, ainsi qu’une scientifique, intéressée par sa démarche.

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