Par
Fabien Binacchi
Publié le
14 juil. 2025 à 17h40
La vidéo de son très gros coup de colère face à un méga paquebot en rade de Villefranche-sur-Mer a été vue et partagée à de très nombreuses reprises. Elle a même fait l’objet de memes, sur Internet. Pourtant, en réclamant vertement au capitaine de larguer les amarres, Christian Estrosi (Horizons) ne s’appuyait sur aucune base légale.
Aucun arrêté n’avait été publié pour interdire celles de plus de 2500 passagers, comme il l’avait pourtant revendiqué au printemps. La semaine dernière, l’édile s’est décidé à signer un texte… finalement jugé illégal. La préfecture et la justice ont repris le maire de Nice de volée. Elles sont formelles : ce n’est pas de sa compétence.
Un coup de sang ou un coup de com ?
« Vous n’êtes pas autorisés à être là. Vous serez condamné très sévèrement pour cela ». Le 3 juillet 2025, le maire de Nice et président de la Métropole était allé montrer les muscles, au contact. Debout sur un semi-rigide de la police maritime, l’index tendu vers ses interlocuteurs, Christian Estrosi avait réclamé du Voyager of the Seas, un paquebot d’une capacité de 3000 croisiéristes, qu’il décampe. En vain.
« Normal, c’était un coup de com, aucun texte ne lui donne le droit de demander cela », rappelle une source proche du dossier à actu Nice. Aucun arrêté n’avait publié. Le maire et président de la métropole de Nice n’en a pas la compétence.
Le juge des référés a estimé que le président de la Métropole Nice Côte d’Azur n’était pas compétent pour édicter de telles mesures.
Le tribunal administratif de Nice
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C’est ce qu’a confirmé le tribunal administratif de Nice, saisi par les services de l’État après la publication, finalement, d’un texte en date du 9 juillet. Seul le préfet des Alpes-Maritimes peut « dans le cadre de ses pouvoirs de police du plan d’eau, organiser les entrées, les sorties et les mouvements des navires », a expliqué la juridiction.
« L’urgence climatique »
L’arrêté limitait le nombre de navires de plus de 2500 passagers à 65 par an à Villefranche-sur-Mer et interdisant les escales de bateaux de plus de 450 passagers dans le port de Nice, qui n’accueille déjà que les unités les plus petites et les plus luxueuses.
Une initiative prise, selon lui, en rapport avec « l’urgence climatique, la protection de la biodiversité marine, la promotion d’un tourisme raisonné et la protection du patrimoine ». Mais également « entachée de plusieurs illégalités » et « de nature à compromettre l’exercice d’une liberté publique ou individuelle », dixit la préfecture.
L’État doit « prendre ses responsabilités »
Pour le maire de Nice, que certains, dont le député Éric Ciotti, ont accusé d’avoir voulu faire le buzz, il y a en tout cas urgence à agir. Dans un communiqué publié ce dimanche 13 juillet, il somme « l’État à prendre ses responsabilités ».
Il en va, selon lui, de la nécessité de « protéger la santé des habitants », visant notamment les gaz d’échappement des navires, pour lesquels les compagnies ont pris des initiatives.
Si aucune mesure de police administrative n’était édictée dans des délais raisonnables pour prévenir les effets néfastes – scientifiquement établis – des mégas-croisières sur la santé humaine, la préservation de l’environnement et la lutte contre le surtourisme, la Métropole engagera la responsabilité de l’État devant le juge administratif pour carence fautive.
Christian Estrosi
Son arrêté, qui devait entrer en vigueur vendredi, aurait concerné jusqu’à la fin de l’année 12 escales dans la rade de Villefranche-sur-Mer et 53 à Nice, pour un total cumulé de 238000 passagers. Soit 65 passages de croisières sur un total de 131 déjà réservées.
Une concertation en septembre
« La Métropole n’interdit en réalité qu’une infime partie des escales de croisière », avait réagi l’opposition écologiste de Christian Estrosi, dénonçant une « mascarade réglementaire qui trahit les habitants, les engagements climatiques de la ville, et le bon sens ». Les élus réclamaient, le 10 juillet, « la tenue d’une table ronde urgente avec les acteurs locaux, associatifs et scientifiques ».
Le lendemain, une réunion réunissait à la préfecture des représentants du monde économique, maritime et politique qui sont tombés d’accord. Une concertation sera lancée à partir de septembre sur les conditions d’accueil des navires de croisières.
En attendant, les ports de Nice et Villefranche-sur-Mer pourront continuer à débarquer des milliers de passagers. Ce lundi 14, le Celebrity Equinox, un paquebot allemand d’une capacité de 2850 personnes était stationné dans la rade villefranchoise.
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