« À un moment, il m’a dit « accroche-toi », je lui ai répondu « je suis mort » ». Dans le col de la Croix Robert, l’avant-dernier d’une journée éprouvante entre Ennezat et le Mont-Dore Puy de Sancy, Jordan Jégat (TotalEnergies) et Kévin Vauquelin (Arkéa-B & B Hotels) ont échangé quelques mots. « Deux », rectifie le Normand, à qui étaient destinés les encouragements. Les deux hommes, derniers Français à suivre les favoris ce lundi, étaient en plein effort, les jambes remplies d’acide lactique. Celles du Breton un peu moins, lui qui a réussi à basculer au sommet avec Pogacar, Vingegaard et Evenepoel quand Vauquelin accusait quelques secondes de retard. Il a même « vu que Pogacar et Evenepoel ont pris [s] a roue » quand il a essayé d’anticiper.
« Avec Kévin, on se connaît depuis quelques années, on roule ensemble à l’entraînement. Quand j’ai vu qu’il n’était pas bien, je lui ai donné un petit coup de pouce. Je sais qu’il marche à la confiance », rappelait Jégat.
« Plus rien dans le sac »
Quelques kilomètres plus loin, le Morbihannais prenait la 19e place de l’étape, onzième parmi les leaders, seulement 25 secondes derrière Pogacar. « Ce n’est que 19e mais ça montre que je peux me battre avec les favoris », décrit le 14e du classement général. Vauquelin, lui franchissait la ligne deux positions et 22 secondes derrière, après une grosse bataille. « Je me suis baladé, ça se voyait, non ? », ironisait Vauquelin, une fois sa récupération entamée. « Ça a été une journée très énergivore, UAE a mis un très bon tempo puis il y a eu les attaques de Visma. Ça a été un peu compliqué pour moi, j’ai eu des moments plus bas et c’est revenu. J’ai essayé de lisser mes efforts. Malheureusement, je prends un éclat dans la dernière bosse et je ne fais pas une bonne descente, pas suffisamment lucide. Je n’ai rien à regretter, j’ai tout donné », continuait le sixième du classement général, quelques minutes après avoir lancé qu’il n’avait « plus rien dans le sac ».
Le classement général, « au jour le jour »
Domiciliés à Nice, les deux puncheurs-grimpeurs impressionnent depuis le début du Tour de France. Ils sont les tricolores les mieux classés de ce Tour de France 2025 et incarnent la nouvelle vague, aux côtés des très jeunes Lenny Martinez, Romain Grégoire ou Paul Seixas. « Je ne sais pas, avoue Jégat, presque gêné. C’est flatteur en tout cas. C’est quand même loin des années Bardet et Pinot, on fait comme on peut ».
« Pas étonné » par les performances du Breton, qui « s’est vraiment affirmé en montagne », le Normand Vauquelin ne veut pas se rajouter de pression inutile, préférant jouer la carte du « on verra au jour le jour » au moment d’évoquer d’éventuelles ambitions pour le classement général. « Je n’étais pas là tous les jours par hasard, avec le placement etc. Je me suis poussé dans mes retranchements. C’est un très bon début de Tour mais c’est encore long. Comme je descends un peu (de la 3e à la 6e place), j’aurais peut-être plus ma place à l’avant », lâchait-il ensuite.
La tentation d’une échappée, avec la victoire dans le viseur. Placé au général, celui qui court toujours après son premier succès chez les professionnels l’espère aussi. « Quand tu es entre la 10e et la 15e place, il y a des mecs qui ont un bon de sortie pour jouer une étape », prévoit Jégat. Ils pourront peut-être encore s’encourager.