Après des semaines de suspense, François Bayrou va dévoiler ce mardi son plan de redressement des finances publiques. Le Premier ministre a déjà annoncé qu’il souhaitait faire pas moins de 40 milliards d’euros d’économies dans le cadre du budget 2026. Mais faute de majorité à l’Assemblée nationale, le maire de Pau risque de vite tomber sur un os dès la rentrée parlementaire. « Au mois d’octobre, on entre dans la zone de grands dangers, prévient le député Liot Charles de Courson. C’est là que les grandes tempêtes peuvent se lever ». Le chef du gouvernement est déjà menacé sur les projets de loi budgétaires par la censure de la gauche et du Rassemblement national, qui dressent leurs lignes rouges. François Bayrou annonce qu’il ira jusqu’au bout. Est-il en opération kamikaze ?
« Ce sera un budget polémique »
Dès sa nomination, fin décembre, François Bayrou pointait du doigt « l’Himalaya » des difficultés qui attendaient son gouvernement, avec en premier lieu, le poids de la dette, à 114 % du PIB à la fin du premier trimestre 2025. Depuis, le Palois tente de rameuter des compagnons de cordée : comités d’alerte, réunions avec les responsables des partis politique, et même une conférence de presse, mi-avril, autour de ce slogan : « La vérité permet d’agir ». Une dramatisation pour préparer les Français à des efforts, mais aussi pour tenter de faire plier la représentation nationale.
« Ce n’est pas un budget lambda, c’est un budget important pour l’équilibre des finances publiques », insiste un conseiller du Premier ministre. « Quand vous demandez 40 milliards d’économies, forcément ce sera un budget polémique », poursuit-il. Un budget qui arrive aussi dans un contexte international incertain, entre tensions douanières et menaces géopolitiques. Emmanuel Macron ne l’a d’ailleurs pas vraiment aidé, en lui demandant dimanche un effort additionnel de 3,5 milliards d’euros pour la défense.
Le Premier ministre se retrouve donc, comme lors du budget 2025, face à une équation impossible : d’un côté, la gauche refuse de tailler dans les dépenses publiques. De l’autre, le bloc central ne veut pas entendre parler d’augmentation d’impôts, même pour les plus aisés. Et le Rassemblement national l’interdit de toucher au pouvoir d’achat des Français et aux pensions des retraités. « C’est un budget sabre au clair. J’imagine bien le Premier ministre aller chercher les totems au sein de tous les groupes politiques pour nous mettre face à nos responsabilités », indique l’ancienne ministre Olivia Grégoire, député Renaissance de Paris.
Bayrou prépare déjà sa sortie ?
L’intéressé a préparé ses mesures dans le plus grand secret. Pas un mot aux parlementaires du bloc central. Selon plusieurs macronistes, même Bercy et l’Elysée ne seraient au courant de rien. « C’est fermé à double tour », s’amuse un proche du patron du MoDem. Le triple candidat à la présidentielle, qui a fait de la réduction de la dette son dada depuis des années, entend bien ne pas lâcher. « J’ai choisi de vivre dans le risque. Je savais que c’était un sport extrême, dit-il au Point. Ce que je vais annoncer, personne n’a jamais osé le faire en France. Chacun prendra ses responsabilités, moi, je prends les miennes. »
Face à ce genre de menaces, certains s’interrogent. François Bayrou serait-il en train de préparer sa sortie ? « Ce sera le budget de François Bayrou. Il veut en finir avec 40 ans de lâcheté politique. Soit il arrive à faire passer 40 milliards d’euros d’économies, soit il sera censuré et l’Assemblée portera la responsabilité du poids de la dette », prévient un de ses proches. « Il a raison, on ne peut plus reculer. Ce sera son budget, il est maître des annonces et du tempo », avance Mathieu Lefèvre, député Renaissance. « La lâcheté serait de dire qu’on peut continuer à dépenser autant ou qu’il n’a pas les moyens de son action, ajoute l’élu du Val-de-Marne. Là, il a le courage de proposer des pistes. Il s’attaque aux déficits par la face nord. » Grimper « l’Himalaya », sans imaginer la chute.