Appelez-la « vague grise » ou « bombe démographique », mais le constat est à la porte, implacable. En Allemagne, aujourd’hui, un habitant sur trois en âge de travailler est à la retraite. Dans dix ans, ce sera 42 %. Qui paiera ces cotisations ? Depuis cinq décennies, l’Allemagne fait trop peu d’enfants et la tendance, comme partout ailleurs, est à la fermeture de ses frontières. Parallèlement, la durée de vie, et donc des versements, augmente. Le report progressif de l’âge légal de départ à la retraite, de 65 à 67 ans d’ici 2029, ne va pas suffire. L’heure des choix pour la viabilité du système approche. Comme le Spiegel l’écrit : « Il n’y a pas de bonnes solutions, seulement un choix entre les moins mauvaises ».
La nouvelle coalition n’a pas réglé la très épineuse question dans son contrat de gouvernement. Pour récompenser une catégorie de la population qui a constitué la grande majorité de son électorat, la pension des retraités a été augmentée de 3,74 %, au 1er juillet. Avec l’augmentation du nombre de départ des baby-boomers des années 50 et 60, le montant du déficit des caisses de retraite (excédentaires jusqu’à l’an dernier) dégringole : – 7 milliards d’€. Prix à payer d’une société vieillissante, les bilans de l’Assurance Maladie et des dépenses liées à la dépendance s’enfoncent dans le rouge. Une commission sur les retraites devra trouver des réponses. Peut-être le signe d’une évolution vers la capitalisation, le chancelier Friedrich Merz a évoqué une proposition originale. Un versement par l’État de 10 € mensuel, en faveur des enfants, sur un compte bloqué jusqu’à la retraite. Géré par le secteur privé, les intérêts générés par ces sommes pourraient porter le total à 70 000 euros d’épargne retraite.
Ne pas surcharger le fardeau des jeunes
L’institut économique DIW s’est invité dans le débat. Son étude de 16 pages, publiée mardi, fait déjà grand bruit dans les médias sous le titre : « Un impôt pour les boomers ! ». Maximilian Blesch, un de ses auteurs, commente : « Aujourd’hui déjà, 20 % du budget fédéral total est consacré aux retraites. Notre proposition offre la chance que toutes les générations participent à l’accomplissement de la tâche, sans surcharger le fardeau des jeunes générations ». Avec ce système de redistribution, l’État prélèverait, sur le total des revenus une taxe proportionnelle et dégressive : 4 % pour les retraités touchant plus de 3 800 € mensuels, 2,5 % au-dessus de 2 200 €… En bas de l’échelle, la pension des plus défavorisés remonterait en flèche : + 11 % pour ceux bénéficiant de revenus inférieurs à 1 000 €. La péréquation permettrait de hisser une partie des retraités pauvres hors de la zone rouge. Leur nombre passerait de 18 % à 14 %, selon le DIW.
« Détrousser les retraités à la Robin des Bois »
Actuellement, un retraité sur 4 perçoit moins de 1 300 € mensuels après 45 ans de cotisation, d’après les chiffres du Ministère du Travail publiés au début du mois. Dans cette hypothèse, ce ne serait plus seulement les jeunes qui paient pour les générations qui ont profité pendant des décennies de faibles taux de cotisation, mais les vieux riches paieraient pour les vieux pauvres. Maximilian Blesch s’attendait à des réactions négatives, « comme lors de chaque redistribution ». L’hebdo Stern accuse l’Institut de vouloir « détrousser les retraités à la Robin des Bois » et l’association des contribuables proteste : cette réforme aurait pour effet de « casser le principe équitable de pensions équivalentes aux cotisations ».