La décision de la municipalité de Drap, près de Nice, de débaptiser le boulevard Stalingrad provoque un tollé diplomatique. L’ambassade de Russie en France s’est dite « indignée » face à ce qu’elle considère comme une « décision honteuse » et une réécriture de l’Histoire.

Dans un message publié sur Telegram, l’ambassade russe a vivement critiqué la décision votée le 4 juillet par le conseil municipal de Drap, une commune de 5.000 habitants située à une dizaine de kilomètres de Nice.

« Le cynisme de l’un des arguments avancés pour justifier cette décision est particulièrement frappant », affirme-t-elle, dénonçant une « tentative inquiétante de réécriture de l’histoire ».

L’origine de la polémique : la suppression du nom de « boulevard Stalingrad », qui rappelait la célèbre bataille de 1943, au profit d’un nouveau nom plus local, « boulevard des Rives du Paillon », en référence au fleuve qui traverse la commune.

Une justification municipale qui fait polémique

La décision a été justifiée par l’adjointe au maire, Alexandra Russo, dans les colonnes de Nice-Matin. « La bataille de Stalingrad n’est pas une fierté historique », a-t-elle estimé. « Il ne faut plus mettre en avant ces grandes batailles du passé qui ne sont pas des grands moments pour la France », a-t-elle ajouté, suscitant une vague d’incompréhension, notamment du côté russe.

Pour l’ambassade, ces propos constituent une « déformation flagrante des faits historiques ». Elle rappelle que « c’est à Stalingrad que les forces soviétiques ont infligé une défaite décisive à la Wehrmacht. Cette victoire a largement précipité l’effondrement de l’Allemagne nazie et contribué à la libération de l’Europe du joug du nazisme ».

Tournant majeur de la Seconde Guerre mondiale

La bataille de Stalingrad, remportée par l’Armée rouge en février 1943, reste considérée comme l’un des tournants majeurs du second conflit mondial. Elle marque le début du recul allemand sur le front de l’Est. Cette victoire fait écho à celle d’El-Alamein, remportée quelques mois plus tôt par les forces alliées en Égypte, en novembre 1942.

Ces deux affrontements ont durablement changé la dynamique de la guerre, amorçant le lent mais inéluctable effondrement du régime nazi jusqu’à sa capitulation en mai 1945.

Crispation

Le maire divers droite de Drap, Robert Nardelli, a reconnu que son adjointe avait peut-être été trop loin dans ses propos. Il n’en demeure pas moins favorable à la décision de changer le nom du boulevard. Une décision qui divise jusque dans les rangs politiques locaux.

Les élus communistes du territoire n’ont pas tardé à réagir. « Doit-on comprendre que la municipalité de Drap regrette officiellement ce moment de l’histoire et qu’elle aurait préféré une victoire nazie? », a réagi dans un communiqué le collectif « Alternative Communiste 06 ».

La Russie accusée de manipuler l’Histoire

Cette controverse s’inscrit dans un contexte diplomatique particulièrement tendu. Moscou, sous la présidence de Vladimir Poutine, est régulièrement accusée par les historiens et les chancelleries occidentales d’instrumentaliser l’histoire soviétique pour justifier ses actions actuelles, notamment l’invasion de l’Ukraine entamée en 2022.

Le pouvoir russe qualifie régulièrement le régime ukrainien de « nazi », une rhétorique dénoncée comme fallacieuse et manipulatrice par les pays occidentaux. Ce discours officiel participe à l’isolement diplomatique de la Russie sur la scène internationale.

Avec AFP