Le Premier ministre hongrois Viktor Orbán (à dr.) au Parlement de Budapest, le 14 avril 2025. ATTILA KISBENEDEK/AFP
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Interview
Le Parlement hongrois a inscrit ce lundi dans sa Constitution une série de mesures discriminantes pour les personnes LGBT+. Pour Vincent Reillon, de l’ONG Forbidden Colours, « la Commission européenne devrait agir plus rapidement » devant « ces attaques contre les droits fondamentaux ».
La situation en Hongrie a des airs de dystopie. Elle permet de comprendre comment l’extrême droite se comporte une fois au pouvoir et de mesurer la capacité d’indignation des Européens. Le dernier exemple en date passe par la salve répressive contre les personnes LGBT+ de ce lundi 14 avril : c’est « le grand nettoyage de Pâques » contre les « punaises » annoncé par le leader nationaliste Viktor Orbán le 15 mars, lors de la fête nationale.
Le Parlement hongrois vient en effet de graver dans sa Constitution qu’une personne est « soit un homme, soit une femme », dans le but de cibler les personnes trans. Mais il vient aussi d’inscrire « la primauté du droit des enfants à un développement physique, mental et moral correct » afin d’entériner l’interdiction de la Marche des fiertés, votée le mois dernier, dans le pays. Face à ce constat, Vincent Reillon, de l’ONG européenne de défense des droits LGBT+ Forbidden Colours, soutient qu’il faut sanctionner la Hongrie au risque de la « contagion ».
Comment interpréter cette nouvelle offensive contre les personnes LGBT+ en Hongrie ?
Viktor Orbán instrumentalise les personnes LGBTQIA+ pour se maintenir au pouvoir. Il est rattrapé dans les sondages [en vue des élections législatives d’avril 2026] alors il détourne l’attention en faisant croire aux citoyens que le plus important est de redéfinir la Constitution. De la même manière que Viktor Orbán avait fait adopter une loi en 2021 pour interdire « la propagande LGBT » et réduire au silence les communautés LGBTQIA+ locales.
Mais il ne faut pas le voir seulement sous l’angle de la communauté LGBTQIA+. L’objectif de Viktor Orbán n’est pas juste de dénigrer des minorités, c’est bien plus insidieux. Il s’agit de détruire la démocratie et l’Etat de droit. Parce qu’interdire la Marche des fiertés équivaut à interdire à des citoyens de se rassembler pacifiquement pour défendre leurs droits. C’est une attaque très forte contre un des piliers de la démocratie.
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Pour le reste de l’Europe, quel est le risque de laisser passer ce type de discriminations ?
C’est la contagion et il faut l’éviter. Les méthodes hongroises sont copiées dans l’ensemble des pays européens. La loi hongroise contre « la propagande LGBT » de 2021 est inspirée de la loi russe de 2013. Depuis, elle a été copiée en Bulgarie en 2024. La Slovaquie est en train de préparer des textes similaires. L’Italie ou les Etats-Unis pourraient le faire aussi prochainement. Et ce n’est pas étranger à ce qui pourrait se passer en France non plus.
Ces événements ne sont pas isolés et aucun pays n’est protégé. Les milieux conservateurs et d’extrême droite échangent leurs pratiques et regardent ce que font les uns et les autres. Ils reproduisent les mêmes attaques dès qu’ils arrivent au pouvoir. Les progrès des droits des minorités ne sont pas linéaires et rien n’est jamais acquis. Dans ces cas-là, sans réponse, le message envoyé est que réduire les minorités au silence est toléré.
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L’Union européenne et la France sont-elles à la hauteur du problème ?
La Commission européenne devrait clairement agir plus rapidement, plus fortement et plus automatiquement qu’aujourd’hui. Pour l’instant, mis à part des tweets, il n’y a pas eu de réaction. L’essence de l’Union européenne, c’est de garantir des droits et des valeurs fondamentales. Les Etats membres, dont la France, sont très silencieux. Alors qu’il faut une réaction forte et coordonnée de l’Europe face à ces attaques contre les droits fondamentaux.
Il y a un manque de volonté politique lié au contexte politique européen. D’abord parce qu’il faut régulièrement l’unanimité des Etats membres. En plus, parce que Viktor Orbán fait du chantage permanent en mettant en balance son soutien à l’Ukraine contre sa liberté d’action. Il faut quand même agir puisque ces attaques contre les droits fondamentaux créent des précédents que d’autres pays pourraient suivre.
Propos recueillis par
Benjamin Moisset