Note : 4/5

Samanou, la narratrice de « Dans une autre vie », raconte sa mère. Elle la saisit d’abord à la fin de sa vie. Au moment où celle-ci se débat avec des problèmes de mémoire, se met à trembler, à tomber dans la rue. Peu à peu, la fille affine le touchant portrait d’une femme née un 14 juillet. Elle se prénommait Zahra mais avait ensuite choisi de se faire appeler Roya qui signifie « rêve » en persan. Comme beaucoup, dont Behrouz qui allait devenir son mari, elle avait quitté l’Iran en 1979, après la révolution islamique, s’installant à Paris afin de poursuivre ses études. Sous la plume de Yassaman Montazami, voici évoquée la complexité d’un personnage à « la présence flottante, un peu vaporeuse » et à la nature songeuse. Roya avait eu à composer avec une mère dévote, une sœur aînée au caractère volcanique et un grand frère chéri de toutes. Elle n’aimait pas qu’on la touche, « dénuée de l’exubérance tout orientale de ses condisciples ». Chaque fois qu’elle se rendait au cinéma, elle s’asseyait à la quatrième rangée, toujours sur le siège le plus près de l’allée, pour ne pas se sentir coincée et conservait ensuite le ticket dans une grosse boîte. Yassaman Montazami s’est approchée, au plus près, de cette exilée, absente au monde et à elle-même, qu’on n’oubliera pas.

Yassaman Montazami, « Dans une autre vie », Sabine Wespieser éditeur, 139 pages, 17 €.