D’ici peu, une cinquième librairie viendra s’ajouter aux quatre déjà installées dans cette commune de 15 000 habitants. Un chiffre qui surprend autant qu’il intrigue, à l’heure où le commerce du livre est souvent décrit comme fragile, soumis à la concurrence du numérique et aux aléas économiques.
Un métier idéalisé
Installés depuis un an et demi à Morlaix, Elsa Morales-Lopez et Mickaël Le Douarin ne cachent pas leurs doutes initiaux. Leur librairie, La Maison des Bulles, ouverte en 2023, est née après une longue étude de marché. « On ne voulait pas empiéter sur les autres librairies, la ville est petite. Finalement, on est même un peu en dessous de ce que prévoyait l’étude », confient les libraires.
Pour Géraldine Delauney, libraire depuis 45 ans, responsable de la librairie indépendante Dialogues, cette vague d’ouverture s’explique par une vision idéalisée du métier. « Beaucoup de gens ont une image romantique du libraire, qui lit toute la journée et échange avec ses clients autour de coups de cœur », observe-t-elle.
Ce phénomène s’est accéléré selon elle avec la crise sanitaire : « Le covid a poussé beaucoup de gens à changer de vie, à vouloir vivre de leur passion. Mais ouvrir une librairie en partant de rien, c’est difficile ». Elle en sait quelque chose : chez Dialogues, le stock représente à lui seul plus de 600 000 € d’immobilisation.
Une offre diversifiée qui séduit les lecteurs
Pour Denis Susjin, 72 ans, la réponse est pourtant simple : la demande est là. Régulier de la librairie Dialogues, il avoue découvrir avec surprise qu’il y a désormais cinq librairies à Morlaix, ce qui pour lui est bien « la preuve qu’il y a un public, même si on ne le voit pas toujours. »
Une lecture que partage Lilou Dupré, 21 ans, récemment installée à Morlaix : « Je trouve ça super qu’il y en ait autant. Ça permet à tout le monde de s’instruire, de développer des passions. Et puis certaines sont spécialisées dans des domaines plus rares. Ça donne un vrai panel de possibilités. »
Même enthousiasme pour Noé Le Jeune, qui vit cette diversité comme une véritable chance : « C’est une dinguerie d’avoir autant de choix dans une petite ville comme ça », s’enthousiasme le jeune de 18 ans.
Une diversité réelle, mais un équilibre fragile
Dans les faits, les nouvelles librairies ne se ressemblent pas : certaines misent sur le manga, d’autres sur la BD, d’autres encore sur une ambiance café librairie. Elles ne sont donc pas toujours en concurrence directe.
Une diversification qui répond à des attentes précises, comme celle de Morgane Péron, 17 ans. « Je suis trop contente de la librairie qui ouvre, spécialisée en romance ! Dans les autres librairies, je ne trouvais pas vraiment ce que je cherchais », confie-t-elle, impatiente de pouvoir enfin plonger dans les rayons d’une boutique taillée sur mesure pour ses lectures préférées.