Caroline Bernard, 62 ans, Rennaise de cœur, découvre la mosaïque un peu par hasard. « J’ai eu un véritable coup de foudre en visitant une exposition sur la mosaïque contemporaine à Paris », se souvient-elle. Alors pharmacienne, elle décide à 40 ans de quitter sa profession pour se consacrer pleinement à cet art. D’abord autodidacte, elle se forme ensuite à Orléans et à Rome, explorant les techniques romaines, byzantine, moderne et contemporaine. Peu à peu, elle développe sa propre signature artistique.
« J’adore la relation à la matière », confie-t-elle. Ses œuvres mêlent pâte de verre, or, morceaux de vitraux de la cathédrale de Chartres, pare-brise de voiture ou encore cristaux de roche. Une diversité de matériaux qui donne à ses créations une richesse visuelle et symbolique unique.
Les œuvres d’Odorico font partie de notre quotidien, elles sont partout en ville.
Dans son atelier haut en couleur, « Les carreaux de Caro » à Rennes, elle crée ses propres tableaux, bijoux en mosaïque, mais aussi des reproductions fidèles des œuvres Odorico. « En ce moment, je reproduis un fragment de la fresque de la piscine Saint-Georges pour un client. Je réalise aussi des mosaïques personnalisées pour les cimetières, afin de rendre hommage aux défunts. »
Restaurer le patrimoine Odorico
Son aventure avec ce patrimoine si rennais commence presque par hasard. « J’ai rencontré l’ancienne propriétaire de la maison Odorico. Elle m’a demandé de reboucher quelques trous dans la salle de bain. C’était un moment extraordinaire pour moi », se souvient-elle avec émotion. En 2022, elle est rappelée pour poursuivre la restauration, à la suite de l’installation d’une crêperie, Bretone, dans ce lieu chargé d’histoire.
La famille Odorico ne cesse d’inspirer la mosaïste. (Photo Le Mensuel de Rennes / David Brunet)
Mais restaurer ces œuvres ne s’improvise pas. « Il faut retrouver des matériaux vieux d’un siècle. C’est parfois à la limite d’un travail d’archéologue », explique Caroline Bernard. La Ville de Rennes, lui a ouvert les portes de ses fonds secrets, où d’anciennes parcelles d’Odorico dormaient depuis des années. « Il m’arrive d’aller à Paris ou à Venise à la maison Orsoni, là ou se fournissait la famille, pour trouver les tesselles les plus proches possibles. »
Chaque restauration demande minutie et patience. « J’ai passé trois semaines sur la nouvelle crêperie de l’ancienne maison Odorico. Il a fallu nettoyer, retirer les résidus de béton, tailler les tesselles sur mesure, les poser avec précision, vérifier la hauteur, coller au mortier, puis jointer… C’est un processus très long. »
Œuvre réalisée par Caroline Bernard. (Photo Le Mensuel de Rennes / David Brunet)Une émotion puissante
Bien plus qu’un travail, confie Caroline Bernard : c’est une émotion, une responsabilité. « J’aime le fait d’avoir acquis les compétences techniques nécessaires pour redonner vie à ce patrimoine. Les mosaïques d’Odorico sont partout dans la ville. Elles font partie de notre quotidien, de notre identité. Leur beauté, très art déco, parle d’elle-même », dit-elle, les yeux brillants.
Si elle devait en choisir une seule, ce serait sans hésitation l’ancienne maison de famille. « Y avoir passé du temps pour restaurer la salle de bain m’a permis de m’imprégner de chaque détail, de la beauté du lieu, du travail ciselé, de la lumière qui se reflète sur chaque tesselle », raconte-t-elle. « C’était sa salle de bain personnelle ! C’est une émotion puissante que j’ai vécue et que je garderai toujours en moi. »