Le patron d’Astronomer, Andy Baron, a dû démissionner de son poste après avoir été surpris en train d’enlacer une de ses collègues lors d’un concert de Coldplay.

Le patron d’Astronomer, Andy Baron, a dû démissionner de son poste après avoir été surpris en train d’enlacer une de ses collègues lors d’un concert de Coldplay.

ÉTATS-UNIS – Difficile d’être passé à côté de cette histoire ces derniers jours. Andy Baron, PDG de la start-up américaine Astronomer, a été surpris mercredi 16 juillet en train d’enlacer une de ses collègues, la DRH de l’entreprise, lors d’une « kiss cam » pendant un concert de Coldplay à Boston. Problème : l’homme est marié à une autre femme, et leur réaction extrêmement embarrassée a pris des proportions faramineuses sur les réseaux sociaux, avec des détournements par intelligence artificielle et plaisanteries en tout genre.

Mais cette histoire, qui aurait pu rester une affaire privée, est vite devenue très sérieuse. Deux jours après l’événement, l’entreprise Astronomer a annoncé avoir suspendu son PDG ainsi que la DRH. Et samedi soir, Andy Baron a finalement déposé sa démission, sous ce qui semble être une très forte pression de son conseil d’administration.

Qu’est-ce que cette affaire révèle de la viralité des réseaux sociaux et de ses impacts très concrets dans la vie réelle ? Lisa Wyler, experte en gestion de crise et dirigeante d’une agence de relations publiques, répond aux questions du HuffPost.

Le HuffPost : Comment analysez-vous la viralité extrême prise par cette histoire sur les réseaux sociaux ?

Lisa Wyler : La « mèmification » générée par cet incident est absolument hallucinante, ce qui me fait dire qu’elle fera date. Tout le week-end, dans les stades américains, très habitués aux « kiss cam », beaucoup de couples ont imité la réaction du concert de Coldplay [comme vous pouvez le voir dans la vidéo ci-dessous]. C’est rare qu’un événement devenu un mème comme cela entre ensuite directement dans la vie réelle et sorte des écrans. Je n’avais jamais vu ça jusqu’à présent, et la rapidité énorme avec laquelle cette crise s’est propagée est franchement notable.

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Est-ce que l’entreprise Astronomer aurait pu réagir différemment, ou mieux gérer cette crise ?

C’est typiquement le genre de crise qui, en tant qu’entreprise, vous met dans une situation de sidération. Le problème qu’Astronomer a dû rencontrer ici, c’est que c’était leur patron qui était directement concerné. Or, habituellement, c’est lui qui va dicter la marche à suivre et la stratégie. Il fallait donc remonter d’un cran en termes de gouvernance, ce qui ralentit nécessairement la prise de décision. Sans oublier l’impact sur la vie privée des deux personnes concernées, et le laps de temps qu’il fallait leur laisser pour gérer cela.

C’est donc difficile de critiquer la manière dont Astronomer a géré la situation. C’est déjà compliqué pour une entreprise d’anticiper d’où viennent les crises, alors un concert de Coldplay, très sincèrement, personne n’aurait pu anticiper un tel cas de figure ! Et puis il est extrêmement compliqué d’empêcher les détournements en ligne, encore plus pour une start-up qui n’est, d’habitude, pas du tout exposée à ce type de crise-là.

Est-ce une polémique très américaine ? Ou cela pourrait aussi arriver en France ?

Ce n’est pas surprenant que cela arrive aux États-Unis, car la législation n’est pas du tout la même que chez nous. Les relations entre collaborateurs, et encore plus avec un patron, sont extrêmement réglementées, et vous êtes par exemple censé signaler aux RH si vous êtes en couple au sein de la même entreprise.

Il y a donc forcément un problème de valeurs au sein de l’entreprise du fait de cette relation, en particulier entre le PDG et la DRH – et c’est ce qu’a indiqué Astronomer dans son communiqué de presse. Mais il y a aussi un problème par rapport au monde du travail américain de manière générale : ce n’est pas quelque chose qui se fait.

En comparaison, pour un patron d’entreprise en France, cela me paraît peu probable qu’une affaire comme celle-ci puisse avoir la même répercussion. Cela pourrait arriver si cela touchait un homme ou une femme politique, parce que ces derniers sont perçus si négativement que ce genre d’incartade pourrait avoir un effet viral très important. Dans le monde économique, j’y crois moyennement.

Qu’est-ce que cette crise révèle de l’importance de la réputation d’une entreprise avec les réseaux sociaux ?

Beaucoup d’acteurs dans le domaine de la réputation en ligne constatent que les crises durent moins longtemps, mais que leur viralité s’est accélérée. Il y a 10 ou 15 ans, vous pouviez avoir des crises dues à des erreurs d’un service commercial ou des problématiques sur le terrain. Mais plus le temps passe, plus les crises peuvent également être générées par des erreurs de communication.

Donc oui, la gestion de la réputation d’une entreprise est encore plus cruciale avec les réseaux sociaux. Et avec l’intelligence artificielle et les « deepfakes », il y a deux effets. Certaines personnes, pour rire, vont créer des images parodiques et des détournements qui vont augmenter la visibilité de cette crise. D’autres vont être mailveillantes et en profiter pour rajouter des problèmes à l’entreprise, par exemple en créant de faux communiqués pour faire circuler des fake news [cela a été le cas avec un faux communiqué d’Andy Byron], ou parce qu’elles trouvent ça drôle. Mais pour l’entreprise, l’effet est le même en réalité.