Par

Ludivine Caporal

Publié le

21 juil. 2025 à 6h38

Il est sans doute l’un des maires d’arrondissement les plus connus à Lyon. Souvent visible sur le terrain, très présent sur les réseaux sociaux, Olivier Berzane (Les Écologistes) ferait presque de l’ombre à Pierre Oliver (LR), son homologue et opposant politique du 2ᵉ arrondissement, dont le nom résonne régulièrement dans le milieu. Mais si ce dernier souhaite prendre la tête de la Ville de Lyon en 2026, ce n’est certainement pas le cas du maire du 8ᵉ arrondissement, qui nourrit pour seule ambition celle de conserver son poste actuel à l’occasion d’un nouveau mandat.

Élu depuis 2020, Olivier Berzane souhaite en effet poursuivre son travail, jusqu’ici réalisé main dans la main avec ses alliés de la Ville et de la Métropole. Pour actu Lyon, le maire du 8ᵉ a ainsi accepté de faire le point sur plusieurs sujets brûlants concernant son arrondissement tels que le marché sauvage, l’avenue des Frères Lumière ou encore la rénovation urbaine de plusieurs quartiers.

« Le marché légal des États-Unis a pu retrouver une tranquillité »

Actu : L’un des gros problèmes que vous avez eu à gérer ces cinq dernières années est le marché sauvage du quartier des États-Unis. Où en est-on aujourd’hui ?

Olivier Berzane : À partir du mois de février/mars, nous avons décidé, conjointement avec la police municipale et nationale, la Métropole, les TCL et les services de douane, d’entreprendre des opérations bien plus massives.

De fait, par une continuité de présence sur plusieurs semaines, on a réussi à mettre fin à ce marché illégal existant depuis 2016 et à l’éradiquer. Les revendeurs qui venaient de loin ont arrêté de venir car ils ont compris que ça ne servait plus à rien de se déplacer et le marché légal a pu retrouver une tranquillité.

À la mairie, on a pu recommencer à travailler sur les autres sujets du quartier, qui ne sont pas moindres. Pour autant, on reste en veille et la police patrouille chaque jour de marché.

A-t-il néanmoins été constaté un report de ce marché sur d’autres zones ?

OB : Non, en tout cas pas dans le 8ᵉ arrondissement directement. On entend parfois que des petits groupes se reforment dans des villes voisines, mais rien de comparable.

Vous avez également fait de votre cheval de bataille la lutte contre les dépôts sauvages, nombreux dans le 8ᵉ, en poussant régulièrement des coups de gueule sur Facebook, par exemple. L’arrivée d’un service gratuit de collecte des encombrants à domicile, en octobre, réussira-t-il selon vous à y mettre un terme ?

OB : On va en tout cas largement communiquer dessus en expliquant que ça n’a plus lieu d’être, car les habitants pourront passer un simple appel téléphonique à la Métropole pour se débarrasser de leurs affaires.

Je pense qu’avec ça on va arriver à résorber une partie de ces dépôts sauvages, mais pas tous. Sur certains points, ce sont des professionnels qui, pour ne pas payer le tri de leurs déchets, viennent tranquillement vider leurs camions et laisser leurs tas d’ordures en pleine nuit dans les quartiers populaires. Eux, il faudra continuer à les attraper et à les sanctionner.

Peu importe les ventes illégales et l'occupation de l'espace publique, la préfète du Rhône estime que ce n'est pas du ressort de la police.
Le marché sauvage s’installait à chaque fois après le marché légal des États-Unis. (©AS/actu Lyon)« Les gens commencent à voir le 8ᵉ d’un œil différent »

Les projets de végétalisation et d’aménagements tels que les voies cyclables ont-ils été assez nombreux dans le 8e arrondissement ? Êtes-vous satisfaits de son intégration au programme global de la mairie centrale sur ce point ?

OB : Oui. Notre programme avec la Ville et la Métropole était effectivement de développer le réseau cyclable et de fortement végétaliser. Pour moi, les deux objectifs sont atteints aujourd’hui.

Le 8ᵉ est traversé par quatre Voies lyonnaises, ce dont on peut vraiment se satisfaire. Quant à la végétalisation, il y a eu une accélération du nombre de plantations de manière considérable car notre arrondissement était très carencé. On rappelle que l’OMS préconise entre 10 et 12 m² de végétation par habitant. Nous étions seulement à deux, il y a cinq ans. Je n’ai pas le chiffre actuel exact, mais il ne sera que meilleur car on essaie de profiter de toutes les occasions pour planter : le réaménagement des rues, des cours d’école, des places…

Après une légère baisse, le nombre d’habitants a de nouveau augmenté pour se stabiliser et atteindre aujourd’hui près de 87 000 personnes, témoin d’un attrait certain pour l’arrondissement. Et cela risque de grandir encore…

OB : C’est vrai que les gens commencent à voir le 8ᵉ d’un œil différent. Par le passé, cet arrondissement était simplement considéré comme une zone que l’on traversait via des grands axes pour rejoindre le périphérique ou l’autoroute.

Aujourd’hui, et grâce à la masse des investissements que nous avons réservée au 8e (175 millions d’euros sur le mandat, soit près du triple de ce qui avait été investi par l’ancienne mandature), les choses changent. On essaie de rattraper le retard qu’il y avait sur les équipements publics, les besoins des habitants, l’état du patrimoine…

Est-il ainsi nécessaire de construire davantage ?

OB : Oui, on en a besoin, car on sait aujourd’hui qu’une demande sur 10 seulement est satisfaite. On ne peut pas dire aux jeunes de quitter Lyon et d’aller vivre ailleurs. À l’occasion des projets de rénovation urbaine comme à Mermoz et aux États-Unis, on va d’ailleurs reconstruire plus qu’on aura détruit, car nous allons construire différemment, mieux et plus haut.

Certains voient ça comme une bétonisation, mais les permis de construire vont aussi amener des milliers de m² de végétalisation en plus grâce à l’obligation d’avoir 25 % de pleine terre pour chaque parcelle.

On va aussi davantage développer de la mixité sociale, sans pour autant chasser les gens qui sont dans des logements sociaux, qui représentent près de 40 % des habitations. On ne veut pas baisser ce chiffre mais mieux le répartir pour ne pas tout concentrer dans les mêmes petits morceaux de quartier.

Sur l’avenue des Frères Lumière, « certains discours sont en train de changer »

Où en sont les grands projets tels que la rénovation de la place du Bachut, la construction de l’Ilot Kennedy ou encore la rénovation urbaine de Mermoz ?

OB : Le chantier de la place du Bachut commence et durera environ jusqu’à février 2026. Elle sera en tout cas livrée avant le printemps, sur notre mandat.

Concernant l’Ilot Kennedy, l’école est toujours en travaux et la rentrée a été repoussée à janvier 2026. Le chantier des Ateliers de la Danse se déroule normalement et celui du complexe sportif va débuter cet été. Ces deux établissements ne seront néanmoins pas livrés avant la fin de ce mandat.

Pour Mermoz, le travail concernant l’aménagement des espaces publics a commencé, la construction de l’école Pasteur est en route et dans quelques mois va commencer celle du pôle sportif et culturel. En 2027, un bureau de poste arrivera enfin dans un nouvel immeuble en construction.

La piscine du futur complexe de l'îlot Kennedy sera ouverte en 2026.
La piscine du futur complexe de l’îlot Kennedy. (©a + Samuel Delmas)

Les travaux de l’avenue des Frères Lumière ont été largement critiqués par les commerçants et ont fait couler beaucoup d’encre. De manière générale, les gens se plaignent par ailleurs qu’il y a « trop de chantiers » en même temps à Lyon. Entendez-vous leur colère ?

OB : Bien sûr que la phase des travaux est très gênante. Personne n’est heureux d’avoir ça devant chez soi. C’est bruyant, poussiéreux, on circule mal. Mais on essaie de les organiser de sorte à ce que cela se fasse partie par partie. On aurait pu décider de fermer toute l’avenue des Frères Lumière par exemple, mais ce n’est pas ce qui a été décidé pour ne pas déranger tout le monde en même temps.

Certains disent qu’on fait tout d’un coup puisque les élections approchent. Mais c’est tout simplement la vie normale d’un mandat. Construire un projet, l’instruire, le voter, passer les marchés publics, etc, c’est quatre ans minimum.

En tout cas, je constate que certains discours sont en train de changer concernant l’avenue des Frères Lumière. Les gens commencent à se projeter sur demain, à apprécier les trottoirs plus larges, les bandes plantées, le calme que cela va apporter… La première partie devrait d’ailleurs bientôt se terminer, à la fin de l’été. La deuxième partie sera, elle, livrée durant le premier trimestre 2026.

Insécurité, tirs de mortiers… Quelles solutions ?

Votre arrondissement reste malgré tout particulièrement en proie à l’insécurité. Récemment par exemple, de nombreux habitants se sont plaints des tirs de mortier, entendus à tout heure de la journée et de la nuit, de plus en plus régulièrement. Comment aborder cette problématique ?

OB : Vous savez, moi, les tirs de mortier me réveillent la nuit. Donc, je les subis comme n’importe quel habitant. J’ai envoyé pas plus tard que ce matin une nouvelle vidéo aux forces de l’ordre où on voit de jeunes gamins tirer des mortiers en pleine nuit dans un jardin. Sauf que c’est extrêmement compliqué comme situation, car je ne vais pas juste descendre avec mes petits bras pour les choper. Le mortier est une arme très dangereuse.

Je pense que c’est avant tout une question d’enquête et de démantèlement de trafic. Les mortiers ne s’achètent pas comme ça dans le commerce, donc il faut trouver les revendeurs, mais aussi interpeller ces mineurs, leur confisquer ces armes et leur faire un rappel à l’ordre en convoquant leurs parents.

Certaines communes ont d’ailleurs décidé d’instaurer des arrêtés municipaux interdisant à tout mineur de circuler sans la présence d’un majeur la nuit, ou de se regrouper à un certain endroit… Pourrait-on imaginer ce scénario ?

OB : Non, la punition collective n’est pas la solution. Et en l’occurrence, l’arrêté pris récemment par l’une des communes de la métropole de Lyon (Meyzieu, ndlr) a été démis par la justice. Donc…

Avez-vous constaté une baisse de la délinquance et de l’insécurité de manière générale ces dernières années ?

OB : Les faits ont eu tendance à diminuer par rapport au début du mandat. Mais ça ne veut pas dire que tout est réglé et que certaines problématiques ne vont pas réapparaitre. En tout cas, tous les mois, nous avons une réunion avec les forces de l’ordre. On épluche tous les sujets remontés, un par un. On a aussi, une fois par an, un point prévention quartier par quartier avec tous les acteurs, dont les bailleurs sociaux.

Dans notre arrondissement, on a également mis en place le « rappel aux obligations légales et citoyennes » et grâce auquel plus de 100 personnes sont passées en maison de justice et ont dû verser une contribution financière à des associations. Enfin, on va rajouter cinq caméras de vidéosurveillance, en plus de la centaine déjà présente.

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