Construite, à l’origine, loin de toute vie humaine, la prison marseillaise est désormais au cœur d’un quartier où les fenêtres des habitations donnent parfois sur les cellules. La livraison, en fin d’année, d’une nouvelle extension inquiète d’autant plus les riverains.

Le soir, quand elle regarde la télévision, Éliane Gastaud est obligée de mettre des écouteurs pour entendre le son. «Et je les entends quand même à travers les écouteurs», soupire la Marseillaise qui vit dans ce quartier depuis 60 ans. Éliane Gastaud habite juste à côté de la célèbre prison des Baumettes, aux portes des calanques de Marseille. «Elle est de l’autre côté de la rue», rapporte-t-elle. Mais, depuis quelques années, le quotidien est loin d’être paisible selon elle. De chez elle, elle entend régulièrement le bruit fait par les détenus, qui communiquent entre eux d’une fenêtre à l’autre de leurs cellules en criant. «Il y a aussi les parloirs sauvages, explique-t-elle. Les familles montent sur les murs des riverains au bord de la route et crient en direction de la prison. Cela dit, ils le font moins depuis que ceux qui sont les plus proches ont mis des barbelés et des tessons de bouteille sur leurs murs pour les en empêcher.»

À en croire Éliane Gastaud, les ennuis ont commencé à l’ouverture des Baumettes 2, première extension du bâtiment historique construit dans les années 1930, à une époque où aucune habitation n’était construite alentour. «Depuis, c’est compliqué, souffle-t-elle. Quand ils se font passer des messages par yoyo à travers les fenêtres et que ça n’est pas arrivé à destination, ça crie, ça hurle, ça insulte…» La Marseillaise préside le collectif des voisins des Baumettes, las également de subir les nuisances liées à la promiscuité avec la prison.

Depuis leurs fenêtres, certains riverains ont directement vue sur les cellules des détenus. «Tout le monde monte des murs pour se protéger, rapporte Éliane Gastaud. Ceux qui habitent en rez-de-chaussée font pousser des bambous dans leurs jardins pour cacher la vue.» «La vie des riverains n’est pas simple, reconnaît la maire de secteur, Anne-Marie d’Estienne d’Orves. Et au regard de la situation actuelle, je comprends que l’arrivée de 130 détenus supplémentaires soit un sujet d’angoisse.»

Des angoisses autour de Baumettes 3

Les Baumettes 2, livrées en 2017, étant déjà victimes de surpopulation, une nouvelle extension, Baumettes 3, ouvrira dans le même secteur à la fin de l’année 2025. «On est très inquiets, confie Éliane Gastaud. On craint de nouvelles nuisances. On voit que le mur pare-vue a été construit de sorte qu’il ne cache pas toute la prison. On voudrait que ce soit le cas. On a demandé aussi à ce que les cellules des détenus qui donnent sur nos maisons soient des cellules occupées par des détenus calmes. Mais on nous a expliqué que ce n’était pas possible de faire le tri.» Pour Éliane Gastaud, «il aurait peut-être mieux fallu construire une prison en dehors de la ville.»

La Marseillaise reconnaît toutefois avoir été associée, via son collectif, à l’élaboration de ce projet. «Mais on va rencontrer des soucis au début, soupire Anne-Marie d’Estienne d’Orves. C’est certain.» «Les contacts entre la direction du centre pénitentiaire des Baumettes et les riverains sont réguliers, affirme de son côté l’administration. En effet, le chef d’établissement reçoit de manière bimensuelle des membres de l’association des riverains pour des temps d’échanges et des appels téléphoniques fréquents permettent également des échanges d’informations. La dernière réunion s’est tenue le 14 mars 2025.»

«Les personnels de l’établissement sont très attentifs aux nuisances sonores dues notamment aux dégradations des fenêtres des cellules par les personnes détenues et apportent des réponses aussi rapides que possible, poursuit cette même source. Les fenêtres dégradées sont réparées dans un délai de 48 heures maximum.» En mars, 35 interventions ont été recensées.