Dénonçant « 40 ans d’inaction » sur ces deux lignes oubliées, des centaines d’élus et usagers « montent à la capitale » pour demander des investissements au ministère des Transports, qui doit les recevoir à Paris. Entre 500 et 800 manifestants, y compris des cheminots, sont attendus par les organisateurs à l’arrivée des convois à la gare d’Austerlitz.
« L’exaspération est à son comble », estiment des associations organisatrices des deux « trains de la colère » transportant les manifestants depuis Cahors et Clermont vers Paris, pour lesquelles 2023 et 2024 ont été des « années de cauchemar avec les retards et les pannes de plus en plus fréquentes et trop longues à résorber ».
« On a affaire à des malentendants »
« Tous unis pour une desserte ferroviaire dynamique respectueuse des usagers et de nos territoires », pouvait-on lire sur une banderole déployée tôt le matin par les premiers manifestants du Lot, avant de prendre le train à la gare de Cahors, a constaté l’AFP.
« Je suis venu défendre la ligne historique Paris-Toulouse », déclare Francesco Testa, conseiller municipal de Cahors, avant d’ajouter: « Comme on a affaire à des malentendants, on se déplace pour être plus près de leurs oreilles.«
Pour ce trajet de plus de 11 heures aller-retour dans la même journée, il a prévu de quoi se sustenter: « Du jambon, du pain et du vin de Cahors ».
Des personnes protestant contre l’état « dégradé » des lignes Paris-Clermont-Ferrand et Paris-Orléans-Limoges-Toulouse (POLT) tiennent une banderole le 15 avril 2025 à Limoges où le « train de la colère » a fait un arrêt. Photo AFP / PASCAL LACHENAUD.
Avant de monter à bord, Monique Codet, 84 ans, qui a fait le trajet « Montauban-Cahors pendant 14 ans », confie qu’elle aimerait que les nouvelles générations aient les mêmes conditions de transport qu’elle a connues: « Il n’y avait pas de retard. Je me souviens d’une seule panne ».
« Des rames hors d’âge »
Au passage du train à Limoges, où des manifestants mécontents s’étaient rassemblés dans le hall de la gare, le maire de la ville (LR) Emile Roger Lombertie a estimé « plus facile aujourd’hui pour un étudiant d’aller faire ses études à Bruxelles, à Berlin, à Copenhague ou ailleurs, que d’aller entre Limoges et Clermont-Ferrand ».
Dans le train, à chaque arrêt, chacun guette le nombre de personnes mobilisées qui montent dans le train. « J’espère qu’on ne va pas arriver en retard, mais ce serait symbolique », lâche un habitué de la ligne.
Des personnes protestant contre l’état « dégradé » des lignes Paris-Clermont-Ferrand et Paris-Orléans-Limoges-Toulouse (POLT) le 15 avril 2025 à Limoges où le « train de la colère » a fait un arrêt Photo AFP / PASCAL LACHENAUD.
A Clermont-Ferrand, environ 130 personnes ont pris le train, a constaté une journaliste de l’AFP.
« Les choses se sont aggravées depuis 40 ans avec des rames hors d’âge et un temps de trajet qui a augmenté de 40 minutes », explique Patrick Wolff, président de l’association Objectif capitales qui pointe la « faiblesse de la protection des voies » et réclame un objectif de « moins de trois heures » pour rejoindre Paris contre 3h15 actuellement.
Jean-Philippe Ollier, responsable du projet de réhabilitation du parc Cataroux de Michelin, à Clermont, « vient défendre la capacité de pouvoir aller à Paris de manière fiable. Le parc Cataroux, c’est 400.000 visiteurs et énormément d’entreprises qui vont s’installer et travailler avec l’écosystème parisien », souligne-t-il.
En janvier, à cause d’une panne de locomotive, des passagers sont arrivés avec près de douze heures de retard à Paris.
Le ministre des Transports Philippe Tabarot a lui-même reconnu vendredi à Clermont « une qualité de service qui n’est pas à la hauteur », annonçant un « geste tarifaire ».
« Axes stratégiques »
Les lignes POLT (plus de 700 km de voie ferrée) et Clermont-Paris (420 km) transportent respectivement 2,6 et 1,9 millions de voyageurs chaque année dans des trains Intercités.
La SNCF a lancé en 2018 un programme de modernisation de ces lignes, qui restent cependant « encore équipées d’installations techniques hétérogènes et vieillissantes », reconnaît la compagnie, qui prévoit « des investissements sans précédent » de près de trois milliards d’euros d’ici 2027.
« En modernisant ces deux axes stratégiques », la SNCF compte rendre les « trajets plus rapides, plus fiables et plus accessibles ».
« Une régénération partielle qui pour nous n’est pas suffisante », dénonce Jean-Noël Boisseleau, vice-président de l’association Urgence Ligne POLT. Pour lui, il faudrait « 2,5 à 3 milliards d’euros supplémentaires pour que, vraiment, on reparte pratiquement à neuf ».