« La vérité, je la veux et je l’aurai. Et le jour où elle éclatera enfin, ça va faire mal », avait prévenu Renée Dalmasso, en mars 2009, quelques jours avant l’ouverture du procès du meurtrier présumé de son fils Christophe.
Pendant 22 ans, elle a lutté pour connaître les circonstances de la mort de son aîné. Commerçante en fruits et légumes à la retraite à Cannes, elle s’est éteinte le 16 juillet, à l’âge de 84 ans, après un long combat pour la vérité (1).
La vie n’a rien épargné à cette petite femme frêle mais combative, mère de trois enfants. La perte d’un fils, le décès de son époux terrassé par la douleur, cinq années d’enquête judiciaire infructueuses, deux procès et la condamnation, par contumace, de celui qui a été reconnu comme le meurtrier de Christophe, mais jamais rattrapé à ce jour pour purger sa peine.
Elle avait mené sa propre enquête
Le 2 décembre 2003, Christophe Dalmasso, 34 ans, homme d’affaires cannois, disparaît sans laisser de trace alors qu’il se trouvait à Nice, à proximité du « château Beaulieu », un hôtel particulier dont il était propriétaire, avenue Maréchal-Foch.
Sa famille pense d’abord à un voyage, mais son véhicule est retrouvé calciné le 9 décembre, dans le quartier La Plaine, à Nice. En août 2004, les restes humains du disparu sont découverts sur la plage de Mouré Rouge, en baie de Cannes, et à Golfe-Juan.
Sa fille adoptive, Lucie, est un temps soupçonnée d’être l’instigatrice de cet assassinat. Edno Borba da Silva, le petit ami de cette dernière, danseur de capoeira de nationalité brésilienne, comme l’exécutant.
En 2009, seul Borba est renvoyé devant la justice. Après dix jours d’audience, la cour d’assises des Alpes-Maritimes estime que le dossier ne peut être jugé en l’état. Trop de doutes pèsent sur cette affaire hors norme. La présidente ordonne un supplément d’information.
En attendant, l’accusé est remis en liberté et placé sous contrôle judiciaire. Mais il prend la fuite. Il ne sera jamais rattrapé.
« Comme madame Le Roux je me battrai jusqu’au bout »
Dans l’été, un témoin, qui se dit hanté par les remords, se rend à la gendarmerie. Il affirme que ce 2 septembre 2003, le Brésilien lui a demandé de l’aider à transporter des sacs de gravats à la déchetterie de Vallauris. Ils contenaient en réalité un corps. Celui de Christophe Dalmasso.
Mis en examen pour complicité de meurtre, il est seul à comparaître en 2013, lors d’un deuxième procès. Il est puni de 7 ans de prison pour recel de cadavre et dissimulation de preuve. Borba da Silva est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité.
Pendant toutes ces années, Renée Dalmasso a mené sa propre enquête, recruté des détectives privés en Tunisie et au Brésil. Elle a orienté les policiers sur la bonne piste quand des chèques de Christophe ont réapparu dans les mains du Brésilien.
« Elle avait appris le dossier par cœur. C’était impressionnant, se souvient Me Bernard Sivan, qui l’avait assistée lors du procès de 2013. Quand on arrivait chez elle, il y avait une grande table ronde sur lequel était posé l’épais dossier. Elle le regardait tous les matins. Elle était persuadée que Lucie était l’instigatrice et attendait que Borda passe aux aveux. Elle avait imaginé le rattraper au Brésil et le faire amener en France ».
Pourquoi la vie de Christophe a-t-elle été ainsi ôtée? A-t-il été victime d’un guet-apens? Quelles souffrances a-t-il endurées? Autant questions auxquelles sa famille n’a jamais pu obtenir de réponses.
Borba da Silva sera-t-il un jour interpellé et à nouveau confronté à la justice française? C’est ce que Renée espérait plus que tout.
« Comme madame Le Roux, je me battrai jusqu’au bout pour découvrir la vérité », avait lancé cette mère meurtrie en 2009. Elle évoquait une autre Renée, la mère d’Agnès Le Roux, disparue en 1977, qui avait pris place sur ce même banc des parties civiles 27 mois avant elle.
1. Ses obsèques auront lieu à Cannes mercredi 23 juillet à 9h30 à l’église Sainte-Marguerite, 1, square Joseph-Barthélémy.