Dans un communiqué publié à l’occasion du salon de l’armement IDET 25, le 26 mai, KNDS France s’était félicité de la bonne marche du contrat relatif aux soixante-deux CAESAr 8×8 [Camions équipés d’un système d’artillerie] que le ministère tchèque de la Défense lui avait notifié en deux temps [en septembre 2021 et en décembre 2022] afin de remplacer les obusiers automoteurs Dana ZTS de 152 mm en service depuis plus de 40 ans au sein de ses forces armées.
Dans le détail, ce contrat prévoit une participation importante de l’industrie locale [40 %], Excalibur Army étant chargé de l’assemblage final de ces CAESAr 8×8, dont la cabine et le châssis seront fournis par Tatra Defense Vehicles et Tatra Trucks. En outre, STV doit certifier les obus de 155 mm produits en République tchèque.
Quoi qu’il en soit, KNDS France avait annoncé que deux prototypes du CAESAr 8×8 allaient être soumis à des essais opérationnels en République tchèque dès cet été. Seulement, il semblerait qu’ils n’aient pas pleinement donné satisfaction à l’armée tchèque.
Ainsi, ces obusiers n’auraient pas atteint la portée requise de 40 kilomètres en mode MRSI [Multiple Round Simultaneous Impact / multiples coups, impacts simultanés ou méthode de tir dite « malouine »]. Mais il ne s’agirait que d’un problème parmi d’autres.
« Sur la base de la documentation fournie, l’armée a effectué une série d’analyses techniques qui, si elles confirment certains paramètres, indiquent aussi qu’il y a un risque que des critères non négociables ne soient pas pleinement respectés », a résumé le général Miroslav Hlaváč, le chef d’état-major adjoint des forces tchèques.
D’après le site d’information Novinky.cz, les artilleurs tchèques n’ont pas reçu les tables de tir permettant à un système de conduite de tir de fonctionner. « Sans ces données, les canons ne peuvent pas être intégrés et leur conformité aux normes Otan n’est pas certaine », lui a confié une source proche du dossier.
Or, les CAESAr 8×8 destinés à l’armée tchèque seront dotés du système de contrôle de tir Adler III, fourni par l’entreprise allemande ESG pour 28 millions d’euros. « De plus, cela menace l’intégration des munitions tchèques », a insisté cette source.
Début juillet, la ministre tchèque de la Défense, Jana Černochová, a prévenu que la livraison des CAESAr risquait de prendre du retard en raison de ces problèmes. Problèmes qui sont, selon elle, susceptibles de conduire à annulation de la commande. « J’ai entamé des négociations avec le ministre français de la Défense, et mes collègues, comme le directeur général Koudelka ou les militaires, ont fait remarquer au constructeur qu’il y avait de sérieux problèmes », a-t-elle confirmé auprès de Novinky.cz.
« Le problème se situe au niveau de la portée et de l’efficacité du tir. Mais je veux croire qu’il sera résolu. Mais il est aussi possible qu’il ne le soit pas et l’armée ne peut pas renoncer aux conditions [du contrat] », a-t-elle ajouté.
Mais avant de décider éventuellement de dénoncer le contrat des CAESAr 8×8, le ministère tchèque de la Défense entend d’abord faire pression sur l’industriel français, en le menaçant de suspendre le paiement de ses acomptes tant que les problèmes ne seront pas réglés. Ainsi, M. Koudelka lui a adressé un courrier à cette fin.
Jusqu’à présent, Prague a versé plus de 7 milliards de couronnes tchèques [environ 285 millions d’euros]. Et un autre milliard [soit 40 millions d’euros] devrait l’être cette année.
Ce n’est pas la première fois que le CAESAr 8×8 est en difficulté.
En janvier 2023, le Danemark lui a préféré l’ATMOS 2000 d’Elbit Systems pour remplacer les dix-neuf CAESAr 8×8 qu’il avait envoyés en Ukraine alors qu’ils étaient à peine sortis d’usine. Depuis, ces obusiers ont effectué plus de 40 000 tirs sur les champs de bataille ukrainiens, pour un seul exemplaire détruit.