Par
Lou Batteux
Publié le
22 juil. 2025 à 10h20
Depuis quelques jours, les 22 000 conteneurs Le Relais répartis sur l’ensemble du territoire français ne sont plus utilisables. À Rennes, les habitants sont invités à ne plus déposer leurs textiles, linges et chaussures dans les 302 bornes et 15 déchèteries associées.
À travers cette démarche, Le Relais alerte sur le refus de Refashion – l’éco-organisme agréé par les services de l’État pour les vêtements, linges de maison et chaussures – de verser aux entreprises responsables de la collecte et du tri textile, comme Le Relais, les fonds qu’il prélève sur l’ensemble des vêtements vendus.
« Refashion conserve 200 millions d’euros à la banque »
« Un produit recyclé a un coût », assure Emmanuel Pilloy, le président du Relais France, auprès d’actu Nantes. Lorsqu’un vêtement neuf est acheté, une contribution environnementale est prélevée. Cette somme est perçue par l’éco-organisme qui a ensuite la responsabilité de reverser cet argent aux recycleurs. Cependant, Refashion verse actuellement 156 euros au Relais par tonne collectée et triée alors que le coût net réel du tri s’élève à 304 euros la tonne.
Aujourd’hui, Refashion conserve 200 millions d’euros à la banque.
Emmanuel Pilloy
Président du Relais France et responsable du Relais Atlantique
Emmanuel Pilloy partage son désarroi face à la situation et affirme : « En ne nous donnant pas les moyens de maintenir notre activité, Refashion nous asphyxie. On ne peut plus y arriver. »
Des emplois menacés et des donneurs impactés
Selon Le Relais, ce manque de financement menace 3 000 emplois à l’échelle nationale et 200 en Bretagne. Ces emplois, qui permettent de collecter 1 930 tonnes de textiles par an rien qu’à Rennes, « redonnent du travail à des gens en réinsertion », souligne Emmanuel Pilloy.
Au-delà du Relais, d’autres associations qui font appel à l’entreprise pour collecter des vêtements et « permettre à des familles dans le besoin de se vêtir », sont également affectées. C’est par exemple le cas d’Emmaüs.
Obligé de devoir interrompre les collectes, l’entreprise demande aux Français de conserver textiles, linges et chaussures à leur domicile « en attendant qu’une solution permettant la collecte, le tri et la valorisation des textiles soit trouvée ».
Il est interdit de déposer des textiles – même dans des sacs – à proximité des bornes. Ces dépôts ne seront pas collectés et seront considérés comme des dépôts sauvages. Dès lors, les textiles ne pourront pas être réutilisés, revalorisés ou recyclés et seront nécessairement traités comme des ordures ménagères.
Rennes Métropole
Dans ce contexte, Rennes Métropole rappelle qu’avec la fast-fashion et l’augmentation sans précédent de la production et de la consommation de vêtements, « le volume de textiles collectés par les bornes comme Le Relais explose et leur qualité se dégrade, ce qui accroit les difficultés de la filière ».
Refashion se défend et évoque un système de gestion « à bout de souffle »
Si Le Relais se dit touché par une crise financière, c’est en réalité une « crise structurelle majeure » qui traverse la filière textile et chaussures. Depuis plusieurs mois, la forte baisse des prix de vente des textiles usagés triés, vers l’Afrique majoritairement, fragilise les opérateurs de collecte et de tri. Selon Refashion, ce modèle sur lequel repose aujourd’hui l’essentiel de la filière « n’est plus viable, ni économiquement, ni écologiquement ».
Pour faire face à la situation, Refashion propose une aide d’urgence revalorisée à 192 euros par tonne, soit une augmentation de 23 % par rapport au soutien actuel. L’éco-organisme se défend également des dernières affirmations véhiculées publiquement par certains opérateurs : « la trésorerie de Refashion n’est ni « dormante » ni détournée ».
Il ne s’agit pas de pointer du doigt des acteurs, mais de dire les choses avec responsabilité : on ne peut pas éternellement financer un modèle qui n’évolue pas. Nous devons collectivement inventer autre chose.
Maud Hardy
Directrice générale de Refashion
Actuellement, Refashion annonce travailler étroitement avec les pouvoirs publics à l’élaboration d’un cahier des charges « plus adapté aux défis actuels ». Ce nouveau cadre tourné vers « une filière plus circulaire, plus locale et plus responsable » devrait entrer en vigueur début 2026.
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