THOMAS SAMSON / AFP
Des tracteurs occupent une partie de la route devant l’Assemblée nationale dans le cadre d’un rassemblement d’agriculteurs organisé par les syndicats FNSEA et JA, en amont d’un débat des députés sur le projet de loi Duplomb.
POLITIQUE – Plébiscitée par une partie du monde agricole, dénoncée par la gauche et les écologistes, la loi Duplomb est souvent réduite à l’un de ses articles autorisant la réintroduction encadrée et dérogatoire de l’acétamipride, un néonicotinoïde qui était interdit en France depuis 2018.
Pourtant, le texte de loi comporte d’autres mesures qui ne font, elles non plus, pas toujours l’unanimité. Tour d’horizon des points phares de cette loi dont vous allez encore entendre beaucoup parler.
- La légitimation des « méga-bassines »
Elle aurait pu être la mesure la plus irritante du texte. L’article 5 prévoit une présomption d’« intérêt général majeur » pour les ouvrages de stockage d’eau utilisés pour l’irrigation des cultures. Une disposition qui doit faciliter les procédures pour obtenir des autorisations de construction.
Mise en lumière par la mobilisation à Sainte-Soline en 2023, la construction de ces « méga-bassines » qui pompent l’eau dans les nappes phréatiques, est de plus en plus demandée par une partie du monde agricole. Les agriculteurs restent cependant divisés sur leur nombre et la surface que ces méga-bassines doivent représenter. La gauche et les écologistes y sont profondément opposés, et dénoncent un accaparement des ressources au profit de l’agriculture intensive.
- Des procédures simplifiées pour l’élevage intensif
Le texte facilite l’agrandissement ou la création de bâtiments d’élevage intensif. Il permet notamment, lors de l’enquête publique, de remplacer la réunion publique par une permanence en mairie. Les évaluations environnementales et autorisations nécessaires à l’établissement de plus grands cheptels seront aussi facilitées, via une directive plus permissive que le texte européen sur lequel elles reposaient jusqu’ici.
Par exemple, comme le détaille l’AFP, à partir de fin 2026, un poulailler ne devra demander une autorisation qu’à partir de 85 000 poulets contre 40 000. Pour une porcherie, le seuil passera de 2 000 à 3 000 cochons.
- Un recadrage de l’Anses
La proposition de loi prévoyait initialement la possibilité pour le gouvernement d’imposer des « priorités » dans les travaux de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES) qui est notamment chargée d’évaluer la dangerosité des pesticides, mais aussi autoriser leur mise sur le marché. La version du Sénat proposait ainsi de créer un « conseil d’orientation », sous surveillance du ministère de l’Agriculture, comme le rappelle Natura Sciences.
Une « mise sous tutelle » inacceptable pour la gauche, mais aussi pour la Macronie. Les parlementaires ont trouvé un compromis en évacuant largement cette disposition pour garantir l’indépendance de l’agence. Le texte précise cependant qu’elle devra tenir compte « des circonstances agronomiques, phytosanitaires, et environnementales, y compris climatiques qui prévalent sur le territoire national ».
Or, si elle est finalement relativement épargnée par la loi Duplomb, l’agence est parallèlement visée par un décret du gouvernement qui reprend en substance la mesure initiale du projet de loi. Le texte prévoir ainsi que l’agence doit prendre en compte les priorités du ministère de l’Agriculture pour établir « le calendrier d’examen des demandes d’autorisation de mise sur le marché (AMM) des produits phytopharmaceutiques ». Un « passage en force » dénoncé par des ONG dont Agir pour l’environnement qui a déposé un recours au Conseil d’État lundi 21 juillet.