« J’ai perdu environ 9 000 dollars sur mon 401 (k) en trois mois », se désole Brianna, 59 ans, en promenant son chien dans le centre piéton de Philadelphie. « D’habitude je ne m’inquiète pas, car je sais que le marché est volatile et que ça va remonter, mais la conjoncture actuelle est inquiétante… » L’instabilité des marchés boursiers et le récent crash de l’indice boursier S & P 500 (-4,84 % jeudi 3 avril et -6 % le lendemain), suite à l’annonce de la mise en place des droits de douane par Donald Trump, inquiètent les Américains. En particulier ceux qui ont préparé leur retraite par capitalisation.

Outre-Atlantique, chaque travailleur bénéficie d’une pension de retraite de base versée par la Sécurité sociale, mais beaucoup cotisent aussi, en parallèle, à des fonds privés de retraite comme le 401 (k) ou le 403 (b), par le biais de leur entreprise ou individuellement. Une part de leur salaire est prélevée et placée sur une épargne, investie en bourse jusqu’à leur départ à la retraite.

« J’y verse environ 400 dollars par mois. À côté, mon fils m’aide à investir un peu en bourse et dans les cryptomonnaies », explique Brianna, qui reconnaît ne pas tout comprendre. « C’est un peu compliqué tous ces trucs pour moi… » Il lui reste « plus de cinq ans » avant de prendre sa retraite et cette démocrate, qui estime que le gouvernement « ne se soucie pas de l’impact de sa politique sur les pauvres et les classes moyennes », s’inquiète déjà du niveau de vie qu’elle aura à ce moment-là. Et pour cause.

La vulnérabilité des jeunes retraités

Les jeunes retraités américains qui ont investi en bourse pour préparer leur retraite « sont les plus vulnérables aux baisses de marchés, explique Wade Pfau, directeur de recherche dans la société de gestion d’actifs McLean et auteur du livre « Retirement Planning Guidebook» (« Guide de préparation de la retraite », NDLR). Car elles ont un impact négatif permanent sur leur retraite. C’est ce qu’on appelle le risque de séquence de rendements ». En somme, « lorsque les jeunes retraités sont confrontés à des distributions de leur portefeuille d’investissement et sont contraints de vendre des titres dont la valeur a baissé, ils doivent vendre davantage d’actions pour faire face à leurs dépenses » et rentrer dans leurs frais du quotidien. « Cela creuse un trou dans leur portefeuille, de sorte que, même si le marché dans son ensemble, remonte, leur portefeuille de retraite ne sera pas en mesure de profiter pleinement de cette reprise. » Si le risque existe pour les personnes qui capitalisent avant leur départ à la retraite, il est d’autant plus important pour les jeunes retraités, qui n’ont plus de salaire pour compenser ces aléas.

La possible hausse du niveau de vie des retraités

Et outre l’inflation que peut engendrer la guerre commerciale menée par Donald Trump, les coupes budgétaires initiées par Elon Musk présentent aussi des risques pour cette tranche de la population. « Ils doivent anticiper la possibilité d’une volatilité accrue des marchés financiers, mais aussi les changements potentiels de la sécurité sociale (qu’Elon Musk a récemment qualifié de « système de Ponzi », ndlr), de Medicare et de Medicaid », prévient Wade Pfau.

Car la politique d’aide aux soins de longue durée n’est pas à l’abri d’évoluer et d’engendrer des restes à charges plus élevés pour les patients. Or en 2023, le coût moyen total des soins de santé d’un homme américain pendant sa retraite était de 150 000 dollars et de 165 000 dollars pour une femme, dont l’espérance de vie est plus élevée.

Autant dire qu’avec tous ces bouleversements en cours et à venir, le challenge économique est de taille pour les investisseurs qui prennent leur retraite aux États-Unis cette année, même si l’optimisme américain perdure. « Il faut quand même y croire, conclut Brianna. La tendance peut s’inverser très vite en fonction des événements et imprévus qui surviendront au cours de l’année. »