Une IRM cérébrale post-pandémie révèle un vieillissement mesurable chez des sujets pourtant non infectés par le SARS-CoV-2
© Gorodenkoff
“Le cerveau de la personne moyenne semble avoir vieilli de 5,5 mois supplémentaires pour chaque année passée durant la pandémie”, explique le Dr Maxime Taquet, chercheur en psychiatrie et épidémiologie à l’Université d’Oxford, spécialiste des effets neurologiques du COVID. Ce n’est pas une métaphore : pendant la pandémie, nos cerveaux ont effectivement pris de l’âge, au sens biologique du terme.
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Le cerveau humain a vieilli plus vite pendant la pandémie de COVID-19, même sans contamination
Une étude publiée dans Nature vient de démontrer que le simple fait de vivre cette période de stress collectif a suffi à accélérer le vieillissement cérébral chez des personnes pourtant en bonne santé. L’effet est visible sur les IRM, et particulièrement marqué chez les hommes, les personnes âgées et les individus les plus précaires.
Ce qui m’a le plus surpris, c’est que même des personnes n’ayant jamais eu le Covid montraient une augmentation significative du vieillissement cérébral. Cela montre à quel point l’expérience même de la pandémie — de l’isolement à l’incertitude — a pu affecter la santé de notre cerveau.
Dr Ali-Reza Mohammadi-Nejad, auteur principal de l’étude, spécialiste en neuroimagerie à l’Université de Nottingham
Pour parvenir à cette conclusion, les chercheurs ont analysé les scans cérébraux de près de 1 000 participants issus de la cohorte britannique UK Biobank. Certains d’entre eux avaient passé deux IRM à plusieurs années d’intervalle, dont une avant la pandémie et l’autre après. Verdict : leur cerveau avait vieilli, en moyenne, de 5,5 mois de plus que celui des individus contrôlés (ceux scannés avant la pandémie seulement). Et ce, même en l’absence de contamination au SARS-CoV-2.
Cette figure tirée de l’étude montre que le cerveau a vieilli plus vite pendant la pandémie, y compris chez les personnes non infectées. L’effet est accentué chez les hommes et avec l’âge.
© Mohammadi-Nejad et al., Nature Communications (2025), CC BY 4.0
Même sans infection au COVID-19, le simple fait d’avoir vécu la pandémie était associé à un vieillissement cérébral accéléré […] Grâce à leur approche, les auteurs ont pu quantifier des effets bien plus larges sur la santé du cerveau que ceux révélés par les études se concentrant uniquement sur le virus.
Dr Eugene Duff, neurologue et expert en neuroimagerie à l’Imperial College London, commentateur externe de l’étude
Ce vieillissement ne semble pas s’être accompagné, dans la majorité des cas, d’un déclin cognitif manifeste. Les chercheurs notent cependant que les personnes ayant effectivement contracté le virus montraient une baisse plus nette de leurs capacités mentales : flexibilité, vitesse de traitement, concentration. Comme si le COVID venait appuyer là où ça faisait déjà mal.
Cette étude nous rappelle que la santé cérébrale ne dépend pas uniquement des maladies, mais aussi de notre environnement quotidien. La pandémie a mis les gens à rude épreuve, surtout ceux déjà en situation de précarité. Nous ne pouvons pas encore savoir si les changements observés sont réversibles, mais c’est tout à fait possible, et cela donne de l’espoir.
Professeure Dorothee Auer, co-autrice de l’étude, responsable du centre d’imagerie cérébrale de l’Université de Nottingham
Stress, précarité, solitude : ces facteurs qui accélèrent l’usure du cerveau
Alors, faut-il s’alarmer ? Pas forcément. Mais cette étude rappelle une réalité qu’on préfère souvent ignorer : le cerveau encaisse. Le stress chronique, l’isolement prolongé, la perte de repères… tout cela ne laisse pas que des souvenirs : cela laisse des traces biologiques.
Selon Mahdi Moqri, chercheur en biologie computationnelle du vieillissement à Harvard, “il reste à savoir si ce vieillissement cérébral est réversible”. Autrement dit : peut-on inverser certains marqueurs d’usure mentale en agissant sur nos conditions de vie ?
La réponse reste incertaine. Mais une chose est claire : si l’IRM révèle que le cerveau souffre sans infection, alors la santé publique ne peut plus se résumer à la prise en charge du virus. Elle devra aussi intégrer l’accès aux liens sociaux, à la culture, au soin psychique. Bref, à tout ce qui maintient un cerveau vivant.
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