La Ville de Strasbourg, le Secours Populaire et Abribus remarquent une augmentation constante de la fréquentation de leurs distributions alimentaires estivales. Les associations ont dû mettre en place des restrictions par rapport à la session 2024.
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Lucie Dradem
Publié le 23 juillet 2025 ·
Imprimé le 24 juillet 2025 à 01h22 ·
Modifié le 23 juillet 2025 ·
3 minutes
À 11h30 le mercredi 23 juillet, un petit groupe de personnes patiente déjà devant les grilles de la Fabrique de Théâtre, à Strasbourg. Depuis le 9 juillet, le lieu est chaque jour investi par une quinzaine de bénévoles du Secours Populaire et de l’association Abribus. Accompagnés par des employés de la Ville de Strasbourg, ils organisent une distribution alimentaire à midi.
Du mercredi au dimanche, des centaines de personnes viennent y chercher un repas : plusieurs associations et services sociaux se relaient sur le lieu. « C’est un point de repère, décrit Camille Vega, directeur du Secours populaire dans le Bas-Rhin. On donne accès à de la nourriture, à des toilettes, à de l’eau, mais aussi à la culture, aux soins… »
L’opération existe depuis 2020, et vise à prendre le relai alors que plusieurs associations freinent ou arrêtent leur activité durant la période estivale, grâce à un financement de l’État et de la municipalité. En 2024, 24 000 repas ont été distribués au total. Chaque année, de plus en plus de Strasbourgeois et Strasbourgeoises ont recours à ce dispositif.
Hausse permanente de la demande
« Sur ces deux premières semaines, nous avons déjà une augmentation de 20% du nombre de personnes présentes à nos distributions par rapport à 2024 », commence Camille Vega, avant d’ajouter :
« Nous expliquons depuis des années que nous arrivons au bout de nos capacités. La semaine dernière nous avons déjà accueilli 450 personnes, pour une capacité d’accueil maximum de 500. En 2020, nous distribuions 270 paniers en moyenne, et en 2024, 400. »
Même constat pour L’Étage, restaurant solidaire qui prend le relai de la distribution en soirée. Les 150 repas fournis chaque jour « partent en 30 minutes », selon le président de l’association, Wima Farzan.
Restrictions
Sumitra Gopal, porte-parole d’Abribus, n’est pas surprise par cette augmentation constante de la demande pour ce dispositif ouvert à tous :
« Beaucoup de personnes n’ont pas d’autre possibilité que ces distributions alimentaires. Ces personnes, très vulnérables, peuvent notamment être à l’origine de la construction de campements. À cinq minutes d’ici, au parc du Heyritz, un campement s’est reconstruit pour la deuxième fois. Ils sont 162, dont 53 enfants de 0 à 18 ans. »
Des familles qui n’ont souvent pas d’autorisation de travailler, de se loger, et qui se retrouvent sans aucune ressource. Les distributions alimentaires estivales sont un dispositif d’aide inconditionnel. Elles ne demande aucun justificatif aux demandeurs, partant du principe que chaque personne présente à la distribution en a besoin. Comme l’explique Camille Vega, ce système atteint ses limites :
« Nous avons déjà dû mettre en place des restrictions… Nous ne fournissons plus de repas aux personnes qui ne sont pas en capacité de se déplacer. Avant, nous pouvions donner plusieurs repas à une personne qui venait pour ses proches. Et nous demandons aux familles si leurs enfants en bas-âge peuvent partager un panier repas. Certaines acceptent. »
Manque de moyens
« Face à une telle demande, il ne faut pas se contenter de boucher les trous pendant l’été, regrette Sumitra Gopal, mais nous n’avons pas assez de moyens ». Les subventions de la distribution estivale ont légèrement augmenté, elles sont passées de 185 000 euros (170 000 de la Ville et 15 000 de l’État) en 2024 à 205 000 (150 000 de la Ville et 55 000 de l’État) en 2025.
Mais pour Sumitra Gopal, « la politique de l’État reste insuffisante », et ne permet pas de « viser la racine du problème ». Les maraudes estivales s’arrêtent le 31 août. La porte-parole d’Abribus s’inquiète aussi du fonctionnement de la transition à la rentrée, avec la mise en place des dispositifs qui devront être suffisamment efficaces pour répondre à ces besoins importants.