CRITIQUE – Avec son humour noir féroce, l’auteur livre un roman décapant sur notre triste quotidien.

Jérôme Leroy publie depuis trente-cinq ans et poursuit une œuvre abondante (romans, polars, poésie, livres pour la jeunesse) mais toujours de qualité. Du Bloc (2011, Série noire) à La Petite Gauloise (2018, La Manufacture de livres), et aujourd’hui, à La Petite Fasciste, dans la toute nouvelle collection « La Manuf », il s’amuse avec les dérives de notre temps, mettant en scène magouilles politiques et groupuscules extrémistes aux mains de grandes gueules et de petites frappes.

Jeu de massacre jouissif

Nous sommes à Fort-Mahon, sur le littoral de la Manche et une tuerie s’annonce avec, à la manœuvre et au Glock 17, un certain Victor Serge. Oui, comme l’écrivain révolutionnaire libertaire. Leroy s’amuse avec les noms, donne des surnoms. Victor Serge est un séide des hautes sphères, un effaceur, qui va passer à côté de sa mission. La suite, dans une France à la dérive dirigée par « Le Dingue », roi de la dissolution, ce sont de nouvelles élections, des alliances contre-nature probables, un coup d’État possible. Il y a un député socialiste fatigué. Il y a des jeunes regroupés sous le sigle « Lions des Flandres ». Il y a Tarentule, vieille éminence grise qui fait et défait les carrières. Il y a Machecourt et ses Insurgés. Et puis cette jeune femme de 20 ans, Francesca, dont le frère adoré est mort avec les Lions dans une fusillade avec des dealeurs marocains. « La petite fasciste » lit Alain de Benoit et Nabokov, sait se battre et porte un pistolet Tanfoglio 22LR.

Tout ce petit monde est ici réuni pour le grand feu d’artifice que l’auteur s’amuse à organiser. Ne manque plus qu’une histoire d’amour. Leroy sait faire. Son côté romantique. Faire pousser des fleurs sur les décombres de la démocratie. Voilà un roman décapant sur notre triste quotidien. Avec son humour noir féroce, l’auteur se livre à un jeu de massacre jouissif et, espérons-le, pas prémonitoire.