Par

Emma Derome

Publié le

24 juil. 2025 à 16h56

« Une fois qu’on a testé une fois, les barrières tombent. » C’est maintenant le huitième été que Bérénice, propriétaire d’une maison à Rezé, près de Nantes, est une adepte de l’échange de maison. Le principe : prêter son logement familial à des vacanciers qui vous laissent en parallèle séjourner dans le leur, gratuitement. De quoi faire de sérieuses économies sur le budget vacances, quand on a des enfants ou peu de moyens.

Car c’est bien l’aspect économique qui pousse de plus en plus de personnes à tenter l’expérience, dans un contexte de crise post-pandémie. Chaque année depuis 2021, la principale plateforme d’échange de maison, HomeExchange, enregistre + 50 % de croissance, selon Le Monde. Dans la région nantaise aussi, ils sont de plus en plus à lister leur maison sur la plateforme, dans l’espoir de partir à moindres frais.

La confiance en l’autre, l’une des clés du système

Alors, si certains trouvent étrange d’ouvrir la porte de son chez-soi à des inconnus, d’autres franchissent le pas, face à la perspective de s’offrir des voyages qu’ils n’auraient autrement pas pu se payer. « Sans ce système, je ne voyagerais pas autant », affirme Lucie, habitante de la métropole nantaise, qui s’est déjà envolée pour la Floride grâce à ce système.

« Au départ, mon mari ne voulait pas prêter, confie-t-elle. Mais tout dépend du premier contact avec la personne en face : la règle, c’est que s’il y a un doute, on ne prête pas! » Lucie se fie aussi beaucoup aux avis laissés sur chaque profil, mais Bérénice, elle, fonctionne à l’instinct. « La base de ce système, c’est la confiance que l’on accorde à son prochain. »

Si la confiance est reine dans ce système, les membres s’acquittent quand même d’une cotisation annuelle, de l’ordre de 130 à 175 euros, pour avoir accès aux annonces publiées sur les sites qui organisent les échanges, comme HomeExchange, HomeLink ou Intervac.

Cette somme couvre le logement en cas de dommages, ce qui permet de partir plus tranquille. Même si la plupart des adeptes que nous avons interrogés ne déplorent qu’un verre cassé ou un ménage un peu trop superficiel. Des situations qui se règlent à l’amiable.

« Ce que je conseillerais à de nouveaux membres de la communauté, c’est de faire un échange réciproque, pour avoir un contact privilégié avec les personnes qui viennent chez vous, pour se rassurer. »

Bérénice, échangeuse de maison depuis huit ans

Pour leur première fois, le choix de la famille rezéenne s’était porté sur une maison située en Belgique. Les deux familles se sont retrouvées à mi-chemin pour partager un repas pour mieux se connaître et échanger leurs clés. Lucie, elle, aime prendre des nouvelles de ses anciens hôtes. « On a revu une famille parisienne qui avait fait son premier échange avec nous, et elle s’était agrandie. C’est sympa de garder contact. »

Un système de points qui permet d’aller partout

Cet été, la famille de Bérénice prendra la direction du Jura, une destination pourtant prisée, grâce à un système de points. Chaque appartement ou maison vaut plus ou moins de points en fonction du nombre de lits disponibles, du confort de ses équipements, mais surtout de sa localisation.

Par exemple, une maison de 110 m2 à Sainte-Luce-sur-Loire, avec trois chambres et un jardin, vaut 68 points la nuit sur HomeExchange, contre 165 points pour une maison avec jardin de la même surface en centre-ville de Nantes.

Selon la localisation, une maison prêtée vaut plus ou moins de points. En cas d'échange direct, les points ne comptent pas.
Selon la localisation, une maison prêtée vaut plus ou moins de points. En cas d’échange direct, les points ne comptent pas. (©Capture d’écran HomeExchange)

Ainsi, prêter son logement de temps en temps permet d’accumuler un certain nombre de points dans une cagnotte, que l’on peut dépenser par la suite pour se rendre dans d’autres hébergements, qui ne sont pas forcément ceux des personnes qui sont venues chez soi.

Un échange Florence-Nantes, vraiment ?

Mais encore faut-il pouvoir accueillir beaucoup pour pouvoir partir et donc recevoir des demandes d’échange. Nantes est-elle une destination de choix ? Oui, d’après nos interviewées. La maison de Lucie, avec jardin et piscine, est bookée pour tout l’été, mais en contrepartie, il faut y passer du temps. « Ça demande beaucoup d’investissement dans la recherche quand on n’a pas une maison dans une station balnéaire. »

De son côté, Jean Marin, expert nantais de l’échange de maison avec plus de 70 voyages à son actif, a accueilli dans son appartement du centre-ville des années 1960 un couple d’Américains qui faisait le tour de l’Europe à vélo. En parallèle, il a réussi à dégoter une maison pour huit personnes pendant deux semaines près d’Hossegor, dans les Landes, autour du 15 août. Soit une période et une région très demandées.

« Il faut être actif, faire des demandes à 15 voire 30 échangeurs ou plus si la destination est touristique, comme le bord de mer ou certaines capitales. Être flexible et s’adapter aux contraintes de l’hôte, comme décaler son séjour d’1 à 2 jours, peut parfois tout changer ! » conseille-t-il sur son blog Pouvoir Voyager ou sur son compte Instagram @jeanmarinvoyage.

Créer des liens, loin des AirBnB « sans âme »

Les interviewés assurent qu’au-delà de la destination, ils regardent aussi le charme de l’habitation. « C’est aussi une manière assez pratique de voyager ; puisque les maisons sont habitées toute l’année, la cuisine et la salle de bains sont déjà équipées, il y a des jeux et tout ce qu’il faut pour les enfants… », ajoute aussi Bérénice. Ce qui ne serait pas forcément le cas d’un AirBnB, qui peut parfois plus ressembler à une « chambre d’hôtel sans âme ».

Pour promouvoir cette manière différente de voyager auprès d’autres Nantais, Jean Marin propose des apéros réguliers aux membres de sa communauté Meetup, qu’il tente de faire grandir. « L’échange de maison, c’est aussi un esprit d’ouverture, de partage… C’est aussi un moyen de sortir des sentiers battus du surtourisme et de la consommation en général. »

Parmi ses nombreux échanges, il lui est arrivé d’être surpris en acceptant de partir pour une destination qu’il ne connaissait pas ou n’avait pas prévu de visiter à l’origine. Et de faire de belles découvertes. « C’est aussi ça, la philosophie de l’échange de maison. »

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