POLITIQUE – Le carton de Bergé. Plusieurs responsables politiques de premiers plans se sont insurgés, dimanche 13 avril, contre une attaque antisémite à Strasbourg, en marge d’un rassemblement pro palestinien. Parmi eux, la ministre chargée notamment de la lutte contre les discriminations Aurore Bergé a dénoncé sur les réseaux sociaux le fait qu’une « boulangerie » soit prise d’assaut « car elle serait israélienne. »
Problème : depuis deux jours, la préfecture du Bas-Rhin, la presse locale, les sources policières, et le gérant du commerce en question, tous, livrent une version radicalement différente de celle avancée par ces responsables publics, à l’extrême droite, au centre, ou au Parti socialiste, sur la foi avant tout d’une vidéo d’1 minute 30 publiée par un inconnu sur le réseau social X.
Dans cette séquence, on peut voir effectivement des manifestants pro palestiniens, keffieh autour du cou pour certains, particulièrement remontés devant des policiers à vélo postés devant un commerce, en l’occurrence la boulangerie Dreher, une institution située non loin de la cathédrale Notre-Dame de Strasbourg. Alors, que s’est-il passé ?
La préfecture dément la version de Bergé
Contactée par Le Parisien lundi 14 avril, la préfecture du Bas-Rhin raconte, dans le détail : « samedi 12 avril 2025, lors du passage d’une manifestation déclarée pro palestinienne à Strasbourg, des personnes présentes en terrasse de la boulangerie Dreher, qui ne présente aucune distinction d’appartenance à la communauté juive, ont eu un geste de défiance et d’opposition à l’égard des manifestants, suscitant une réaction en retour. » Des sources policières parlent de doigts d’honneur.
Toujours selon le récit de la préfecture au quotidien francilien, « les policiers sont intervenus immédiatement en interposition, prévenant ainsi toute violence physique. L’incident a été bref et la manifestation s’est poursuivie sans nouvel incident. » Ce n’est pas tout. La préfecture dément également sans détour « que le commerce en tant que tel ait été visé. »
« Les policiers sont intervenus lors d’un incident impliquant des personnes extérieures à la manifestation, présentes devant le commerce, et qui ont eu un geste déplacé à l’égard des manifestants », insiste-t-on, tandis qu’aucune plainte n’a été déposée, de même qu’aucune interpellation n’a eu lieu.
Mini-mea-culpa
Plusieurs médias précisent en revanche qu’une « brève empoignade » a bien eu lieu entre une manifestante et un des clients qui a alpagué le cortège devant la boulangerie. Une « altercation vite maîtrisée par la police », selon le quotidien local Dernières Nouvelles d’Alsace. Des versions parfaitement confirmées par le gérant de la boulangerie en question.
Interrogé par DNA lundi, Benjamin Dreher assure qu’il n’y a « pas eu de dégâts » dans son commerce et s’attache à relativiser les événements par rapport à la tournure politique qu’ils prennent depuis samedi. « Les vendeuses, habituées à voir passer les manifestations, ne se sont rendu compte de rien », ajoute-t-il, tandis que le média le dit « médusé par les proportions que prend l’affaire. »
La boulangerie n’a heureusement pas été prise pour cible comme la vidéo le suggérait. Je regrette de l’avoir laissé entendre.
Des passants s’y sont réfugiés.
Ils ont été pris pour cibles. Dans des hurlements – « ces gens-là sont des criminels » – pendant une manifestation…— Aurore Bergé (@auroreberge) April 14, 2025
De quoi inspirer à Aurore Bergé un mea culpa en bonne et due forme ? Pas totalement. La ministre, qui affirmait samedi qu’un commerce a été « pris pour cible car il serait israélien », s’est fendu d’un message lundi soir pour dire ses regrets d’avoir « laissé entendre » une telle fake news. Le tout, sans retirer son message initial dans lequel elle ne prenait pas autant de pincettes. Son tweet fautif a été vu près de 420 000 fois. Il est toujours en ligne.
À voir également sur Le HuffPost :