Ceux qui ont eu la chance de la voir sur scène s’en souviennent encore. Le 12 juillet 2025, Dee Dee Bridgewater venait enflammer la scène de Marseille Jazz des Cinq Continents afin de présenter son quarter 100% féminin, « We Exist!« . L’occasion pour elle de prouver une nouvelle fois que Dee Dee Bridgewater n’est pas qu’une brillante chanteuse de jazz : c’est aussi une femme engagée, qui revendique fièrement et fermement sa liberté. D’ailleurs, elle est la première à le dire : c’est en Europe qu’elle en a pris le chemin. Notamment en France, et plus particulièrement à Marseille, ville très chère à son cœur.
« Cette ville a beaucoup d’âme, et je le sens très fortement » – Dee Dee Bridgewater
Ce n’est pas la première fois qu’elle se produit sur une scène marseillaise, mais comme à chaque fois, cela reste magique. À chaque passage, c’est une vibration particulière, une résonance intime qu’elle ressent.
« C’est une ville qui m’a toujours touchée. » – Dee Dee Bridgewater
Car Dee Dee Bridgewater a fait un choix de cœur et de vie : celui de la France. Elle y a vécu vingt-quatre ans, y a trouvé une terre d’expression, de reconnaissance, de transformation.
« En France, j’ai toujours pu tout faire, tout ce que j’avais envie de faire. Il n’y avait jamais quelqu’un pour me dire non » – Dee Dee Bridgewater
Une liberté rare, surtout lorsqu’on est une femme noire, américaine, et que l’on souhaite sortir des cases toutes faites, même dans le jazz. Une liberté qu’elle oppose à celle, plus fragile, de son pays d’origine, les Etats-Unis :
« Aujourd’hui, c’est très dangereux pour moi, en tant que femme noire américaine, de parler directement des choses. » – Dee Dee Bridgewater
Alors, elle choisit la musique pour s’exprimer. Sur scène, elle incarne cette voix qui dit l’indicible, qui porte les combats sans discours mais avec puissance. C’est pour cette raison qu’elle a décidé de s’accompagner de trois femmes dans son quartet, avec Carmen Staaf au piano, Rosa Brunello à la basse, et Shirazette Tinnin à la batterie. Un message fort, qu’elle revendique fièrement.
« Dans le jazz, c’est un monde de patriarcat. Il est temps. […] Si moi, avec toute ma carrière, je me présente avec des femmes, je pense que ça a beaucoup plus de pouvoir. » – Dee Bridgewater
Un pouvoir, qu’elle met au service d’un héritage : celui qu’elle a reçu de ses idoles, comme Nina Simone, Abbey Lincoln ou Roberta Flack. Des figures tutélaires, des pionnières, qui l’ont toujours inspirée.
« Elles n’avaient pas peur de s’exprimer, d’être critiquées. Elles restaient fidèles à ce qu’elles croyaient. » – Dee Dee Bridgewater
Émue, Dee Dee Bridgewater se souvient de ce qu’elle a pu ressentir en découvrant Nina Simone pour la première fois à la télévision, pieds nus, drapée de tissu africain, reine noire et puissante.
« Je me suis dit : moi, je veux être comme elle. » – Dee Dee Bridgewater
Aujourd’hui, à son tour, elle transmet. Elle chante, elle raconte, elle partage avec les plus jeunes. Dans sa voix, il y a le combat, l’amour, la tendresse, l’histoire. Et cette certitude : que la musique, quand elle est sincère, peut encore changer le monde.