Annoncé en septembre 2021, le pacte AUKUS vise, entre autres, à doter la marine australienne [RAN – Royal Australian Navy] de huit sous-marins nucléaires d’attaque [SNA], dont trois doivent être fournis par les États-Unis [classe Virginia] entre 2032 et 2038. Les cinq autres – de type SSN-AUKUS – seront construits dans le cadre d’une coopération industrielle entre l’Australie et le Royaume-Uni.

Seulement, rien ne dit, pour le moment, que l’Australie obtiendra les trois SNA de type Virginia promis en raison des difficultés des chantiers navals américains à satisfaire d’abord les besoins de l’US Navy.

Même si Canberra a décidé d’accorder à ces derniers une subvention de 3 milliards de dollars [une seconde tranche de 500 millions vient d’ailleurs d’être débloquée], le Pentagone a récemment fait savoir qu’il était en train d’examiner les implications du pacte AUKUS sur la flotte de SNA de l’US Navy et de vérifier si ses objectifs étaient bien alignés sur le programme « America First » du président Trump.

Or, ayant « cassé » le contrat « Shortfin Barracuda » qu’il avait notifié au français Naval Group au profit du pacte AUKUS, le ministère australien de la Défense peut difficilement revenir en arrière… alors que les six sous-marins de type Collins actuellement mis en œuvre par la RAN, déjà qu’ils sont affectés par de nombreux problèmes, ne pourront pas être prolongés jusqu’en 2040.

Quoi qu’il en soit, l’Australie pourra compter sur le soutien indéfectible du Royaume-Uni, comme en témoigne le traité sur la production de sous-marins que les deux pays vont signer, ce 26 juillet. « Notre engagement envers l’Australie est absolu », a d’ailleurs commenté John Healey, le ministre britannique de la Défense.

Devant être le plus important jamais signé depuis la création du Commonwealth d’Australie, en 1901, ce traité « soutiendra les programmes de sous-marins pendant 50 ans, créera des dizaines de milliers d’emplois et devrait rapporter jusqu’à 20 milliards de livres sterling [près de 23 milliards d’euros] au Royaume-Uni sur les 25 prochaines années », a expliqué le ministère britannique des Affaires étrangères.

Cet accord, surnommé « Traité de Geelong », démontre l’engagement du gouvernement à assurer à la fois la sécurité et la prospérité, à préserver les emplois dans tout le Royaume-Uni et à stimuler notre industrie de la défense, avec de nouvelles exportations de sous-marins s’élevant à des centaines de millions de livres par an », a-t-il insisté.

Plus précisément, ce traité ouvre la voie à une coopération sur « la conception, la construction, l’exploitation, le maintien en condition opérationnelle jusqu’au démantèlement de sous-marins SSN-AUKUS ».

Selon le ministre australien de la Défense, Richard Marles, le traité de Geelong porte également sur la formation des sous-mariniers de la RAN par la Royal Navy ainsi que sur le développement des infrastructures du chantier naval d’Osborne, à Adelaïde. Enfin, il vise à créer une « base industrielle de défense intégrée entre le Royaume-Uni et l’Australie », permettant ainsi aux « entreprises australiennes de fournir des équipements à la Grande-Bretagne pour la construction de sous-marins ».

Cela étant, l’Australie devra mettre la main au portefeuille puisqu’elle aura à verser environ 4,6 milliards de dollars à l’industrie britannique pour la conception et la production des chaufferies nucléaires destinées aux futurs SSN-AUKUS.

Quant à l’examen mené par le Pentagone, les responsables australiens et britanniques ne se disent pas inquiets, estimant qu’il serait même une « opportunité de renouveler l’engagement de l’administration Trump » à l’égard du pacte AUKUS.

« Nous sommes vraiment confiants quant à l’avancement du projet AUKUS et des progrès réalisés dans les trois pays », a fait valoir M. Marles. « Le pacte AUKUS ne coûte rien de plus au contribuable américain. En réalité, ce sont l’Australie et le Royaume-Uni qui investissent le plus », a enchéri son homologue britannique. Sauf que l’équation ne se pose pas en ces termes, l’enjeu pour le Pentagone étant d’avoir le nombre requis de SNA pour éventuellement faire face à un conflit dans la zone indopacifique.

Au total, au moins dix-sept sous-marins de type SSN-AUKUS devraient être construits dans les années à venir. Aux cinq attendus par l’Australie s’ajouteront en effet les douze que prévoit de commander le Royaume-Uni, conformément aux recommandations de la Revue stratégique de défense publiée en juin.