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Rédaction La Presse de la Manche
Publié le
26 juil. 2025 à 20h20
Jeudi 24 juillet 2025, le parquet de Bordeaux (Gironde) a annoncé la réouverture d’une enquête « sur d’éventuels faits de violences volontaires » commis par le chanteur Bertrand Cantat avant la mort de son ex-épouse Krisztina Rady, retrouvée pendue chez elle en 2010. Cette décision fait suite à la diffusion d’un documentaire sur Netflix sur le chanteur de Noir Désir, condamné en 2003 pour le meurtre de Marie Trintignant.
Et pour conduire cette nouvelle enquête, qui s’annonce aussi médiatique que délicate : Renaud Gaudeul, procureur de la République de Bordeaux depuis janvier 2025 et ancien procureur de la République de Coutances (Manche). Une démarche qu’il qualifie de « naturelle ».
Ce quinquagénaire est en effet « très sensibilisé aux questions de violences intrafamiliales », comme le rappelle France 3 Pays de la Loire, qui le cite : « Il y a encore un certain nombre d’années, nous n’ouvrions une enquête que si nous avions une plainte. Là, je n’attends pas d’avoir une nouvelle plainte ».
Notre objectif, c’est l’élimination des violences faites aux femmes.
Renaud Gaudeul, interviewé en juin par « Le Télégramme »
Dans la Manche, Renaud Gaudeul avait assisté à la fusion des tribunaux et au regroupement du pôle criminel. Après avoir été procureur de la République à Coutances de 2010 à 2016, il avait rejoint le parquet de Nantes, où il avait désigné une magistrate référente en matière de violences au sein du couple, puis créé un comité de pilotage contre les violences intrafamiliales qui permettait, selon lui, d’aller « vraiment au fond des dossiers ».
Un second comité, dédié à la préparation de la sortie de personnes condamnées pour des des violences commises au sein du couple, avait été également créé.
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À Nantes, un pôle spécifiquement chargé de la lutte contre ces violences avait ainsi vu le jour sous « l’ère Gaudeul ». « Cela a été une vraie révolution, expliquait-il en juin dans les colonnes de nos confrères du Télégramme. Quand on apprenait le métier, on nous enseignait qu’un parquetier est là pour mener les enquêtes, identifier les coupables, poursuivre devant la juridiction de jugement et, si possible, obtenir une condamnation. Aujourd’hui, nous avons encore ces quatre missions, mais aussi une cinquième : la protection des victimes. Nous devons aussi veiller à avoir attribué les dispositifs adéquats lorsque nous considérons qu’il faut une mesure de protection. C’est très nouveau dans l’approche de notre métier, et ça, il a fallu l’acquérir. Notre objectif, c’est l’élimination des violences faites aux femmes. »
« Priorité de politique pénale depuis 15 ans »
Mais il était sensibilisé à ces questions de longue date, comme il le précisait encore dans ce même article du Télégramme : « La question des violences faites aux femmes est, pour moi, une question de priorité de politique pénale depuis 15 ans. J’avais déjà créé, en 2009, alors que j’étais procureur à Bernay, le stage de responsabilisation pour la prévention et la lutte contre les violences au sein du couple. Il a été, par la suite, introduit dans le code de procédure pénale. La démarche n’est donc pas complètement neuve de ma part. »
Le témoignage d’un infirmier
La série documentaire intitulée « Le cas Cantat » est diffusée depuis le printemps. Le magistrat précise qu’elle contient « plusieurs affirmations et témoignages ne figurant pas » dans les procédures déjà ouvertes sur les circonstances de la mort de Krisztina Rady, toutes classées sans suite.
Outre le dossier en recherches des causes de la mort ouvert après son décès survenu au domicile conjugal, « trois procédures subséquentes » avaient été ouvertes en 2013, 2014 puis 2018.
Yael Mellul, ancienne avocate du dernier compagnon de Krisztina Rady, y voit avec satisfaction un « changement radical de position du parquet » sur ce qu’elle qualifie « d’affaire de suicide forcé ». Selon elle, le témoignage anonyme d’un infirmier dans le documentaire « corrobore le fait que Krisztina Rady était victime de violences conjugales ».
Dans « Le cas Cantat », cet infirmier affirme en effet qu’elle était passée aux urgences « suite à une altercation avec son compagnon, une violente dispute » avec « décollement du cuir chevelu et des bleus, des hématomes ».
Message de détresse
Il était également question d’un message de détresse laissé par Krisztina Rady sur le répondeur de ses parents, où elle évoquait « l’enfer » que lui faisait vivre le père de ses enfants, « ce cauchemar que Bertrand appelle l’amour ». Yael Mellul assure avoir elle aussi « de nouveaux témoignages à transmettre au parquet de Bordeaux », sans en préciser la nature.
Condamné à huit ans de prison en Lituanie pour des coups mortels en 2003 à Vilnius sur Marie Trintignant, le chanteur avait été rapidement mis hors de cause dans le suicide de Krisztina Rady.
AFP, avec Ludivine LANIEPCE
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