Le baromètre EY de référence a parlé : le début d’année 2025 marque un tournant pour la French Tech, avec seulement 314 levées de fonds totalisant 2,8 milliards d’euros, soit une chute de 35 % en valeur et 24 % en volume par rapport à 2024. Il s’agit du niveau le plus bas enregistré depuis 2020. La France cède du terrain, reculant à la troisième place, devancée par une Allemagne dynamique et un Royaume-Uni toujours actif. Avec Franck Sebag, associé EY et Fast Growing Companies leader, Lepetitjournal.com s’est interrogé sur la dynamique entrepreneuriale française en recul mais surtout ce que les entrepreneurs français doivent en conclure à l’aube de 2026. 

 

Baromètre : l’attractivité de la France en 2025, un diamant brut à l’éclat terni

 

 

Les investisseurs étrangers étaient très présents dans la French Tech vers la fin 2021 et début 2022 lorsqu’il y a eu de grosses licornes

 

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Des investisseurs étrangers plus sélectifs depuis 2022 

Franck Sebag est clair : “Le capital-risque français connaît une forte décélération après plusieurs années d’expansion remarquable”. Et lorsque nous lui posons la question d’une perte d’appétit pour la French Tech et les projets français, l’expert associé EY et Fast Growing Companies leader remet dans le contexte : “ll faut retracer un peu l’historique : les investisseurs étrangers étaient très présents dans la French Tech vers la fin 2021 et début 2022 lorsqu’il y a eu de grosses licornes qui ont émergé. Puis dans les temps plus durs, ils se sont un peu retirés du marché, sans pour autant disparaître.” 

Pour lui, deux profils se distinguent : les investisseurs européens non français, qui continuent à investir via des opérations cross europe et les Américains, plus prudents. “Pour les Etats-Unis, l’Europe vit une période de chalandise. Ils réfléchissent à intervenir en acquéreurs ou investisseurs. La question qu’ils se posent est de prendre ou non des participations majeures, à l’instar de Mistral IA qui aurait pu être rachetée par Apple”, illustre-t-il.

 

 

Nous vivons aujourd’hui une mutation technologique, une révolution IA qui va demander beaucoup de solutions applicatives” rassure Franck Sebag.  

 

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La Green Tech relayée au second rang, la Fintech prend le relai 

La Green Tech, l’un des moteurs de la French Tech, est reléguée en deuxième position, avec 515 millions d’euros levés, en chute de 54 %. “À fin 2023, ce secteur était en tête. Mais au second semestre 2024, il s’est mis à baisser. L’Europe était en avance, mais beaucoup de pays ont décidé de décélérer. Il y a eu un paquet réglementaire repoussé”, nous explique Franck Sebag.

En troisième position, la Fintech signe une belle performance avec 487 millions d’euros levés, en hausse de 53 % en valeur, malgré une baisse de 23 % en volume. Pour l’expert EY, “ce secteur prend le relais. Il est encore en dessous des résultats du Royaume-Uni, mais il est aujourd’hui l’un des plus importants en France, avec le software”. Le secteur des logiciels justement domine les levées avec 891 millions d’euros. La performance est liée à la multiplication des projets dans l’intelligence artificielle, générative ou spécialisée. Ce secteur représente 32 % des opérations, en hausse de 57 % en volume. “Nous vivons aujourd’hui une mutation technologique, une révolution IA qui va demander beaucoup de solutions applicatives” rassure Franck Sebag.  

 

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C’est la première fois que l’Allemagne passe devant. Ce qui est marquant, c’est leur capacité à continuer d’attirer des grosses levées supérieures à 100 millions d’euros

 

 

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 L’Allemagne prend la tête, le Royaume-Uni toujours dans la place

Au niveau européen, la France recule à la troisième place, largement dépassée par l’Allemagne avec 3,6 milliards d’euros : “C’est la première fois que l’Allemagne passe devant. Ce qui est marquant, c’est leur capacité à continuer d’attirer des grosses levées supérieures à 100 millions d’euros” analyse Franck Sebag. En France, seules deux opérations de cette ampleur ont été recensées : Knave et Alice&Bob, avec 100 millions d’euros chacune. “Si l’on regarde les levées en dessous de 100 millions, l’Allemagne reste en dessous de la France” nuance-t-il.

 

Pourquoi une telle résilience britannique ? “L’attraction anglo-saxonne et La City, bien sûr. 

 

Quant au Royaume-Uni, il conserve un haut niveau d’activité malgré un recul en valeur et en volume. Les conséquences du Brexit ne sont pas si terribles alors, s’interroge-t-on ? “Le Royaume-Uni est très fort sur les Fintech mais aussi les Life Sciences”. Pourquoi une telle résilience britannique, insiste-t-on ? “L’attraction anglo-saxonne et La City, bien sûr. Mais c’est aussi le pendant d’appartenir à l’Europe : il y a des avantages et des inconvénients”. Et d’en tirer une leçon stratégique : “Il faut être fort partout, et tirer la représentation de fonds non européens avec des sièges à Paris et pas à Londres” .

 

 

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Au delà de la révolution IA, il y a aussi une révolution liée à la deeptech, avec des acteurs comme Pasqal.

 

 

 

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Alors… La France doit-elle s’inquiéter pour ses entrepreneurs ? 

Face à ces chiffres qui donnent un peu le tournis, faut-il s’inquiéter ? Pas selon Franck Sebag : “Nous avons des entrepreneurs français qui vivent en agilité. Vu les conditions de marché depuis fin 2021, leur mindset a changé”. L’expert interrogé observe que près de la moitié des grosses startups françaises sont aujourd’hui rentables et préfèrent recourir à la dette plutôt qu’au capital.

Les investisseurs, eux, sont – juste – devenus plus rigoureux : “Les fonds sont aujourd’hui sont parcimonieux, dans l’efficacité des investissements. Mais il y a toujours de l’argent pour un bon projet !” Et l’avenir ? Il reste stimulant. “Au delà de la révolution IA, il y a aussi une révolution liée à la deeptech, avec des acteurs comme Pasqal. Il y a des signaux qui permettent d’espérer un horizon très innovant…” La French Tech doit donc continuer à lever des fonds pour lever le doute.