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Rédaction Nantes
Publié le
28 juil. 2025 à 17h36
La chambre de l’instruction de la cour d’appel de Rennes a ordonné, ce vendredi 25 juillet 2025, la remise en liberté d’un Nantais soupçonné d’avoir participé à l’assassinat de Sahraoui Mamar place Mendès-France, à Nantes (Loire-Atlantique) en octobre 2023, en raison d’une bourde procédurale.
Pour rappel, Sahraoui Mamar, apprenti jardinier de 19 ans au lycée agricole de Bouaye, était décédé sous les rafales des armes de guerre le 7 octobre 2023. Quelques jours plus tôt, un jeune présent lors de cette fusillade avait déjà été victime de coups de machette : les témoins entendus avaient alors expliqué que les tireurs étaient venus « finir le travail ». Selon l’enquête, Sahraoui Mamar n’était donc vraisemblablement pas ciblé.
Une agression avant le meurtre
Le 28 juin 2024, un certain « Adda » – dénoncé comme étant « le tireur » et comme tenancier du trafic sur la place Mendès-France à cette période – avait été interpellé alors qu’il était visé par un mandat de recherche. Il avait alors donné une fausse identité.
Niant son implication dans cet « assassinat », ce père de famille de 24 ans a toutefois reconnu être l’auteur de l’agression survenue peu de temps auparavant : il souhaitait faire « dégager » la victime du point de deal de cette place connue pour être le théâtre régulier de règlements de comptes sur fond de trafic de stupéfiants.
Adda a donc été placé en détention provisoire en juillet 2024 : au moment de sa présentation devant le juge d’instruction nantais, il avait bénéficié de l’assistance d’un avocat nantais commis d’office.
Dans l’intervalle, cette affaire a été « rapprochée » d’un autre épisode de tirs et transmise à la Juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) de Rennes – compétente en matière de criminalité organisée.
« Dysfonctionnement » du service public
Reste qu’un mois plus tard, le 22 août 2024, le jeune détenu avait désigné l’avocat parisien Me Raphaël Chiche : à l’époque, le greffier nantais, « minutieux, presque chirurgical », avait fait préciser sa demande au détenu qui devait indiquer si Raphaël Chiche était désigné « en lieu et place » de son confrère nantais, ou bien à ses côtés.
Pourtant, arrivé à Rennes, le dossier a « incorrectement été mis en état » et les deux avocats ont, à tort, été enregistrés alors que l’un d’eux avait donc été « dessaisi » par Adda.
Le 12 juin 2025, le greffier du juge des libertés et de la détention (JLD) s’était donc « référé » aux éléments incorrectement enregistrés pour convoquer « les deux avocats » lors du débat de « prolongation » de la détention d’Adda devant se tenir le 1er juillet 2025.
Dans la matinée, ce jour-là, Me Raphaël Chiche était pourtant retenu au Parlement de Bretagne pour plaider « trois dossiers » : l’avocat parisien avait compris qu’il ne pouvait pas être à « 11 h » à la Cité judiciaire et avait sollicité « le renvoi » du débat sur la prolongation de la détention.
Reste qu’ensuite, son confrère nantais – dessaisi « depuis onze mois » mais « convoqué » par erreur – s’était présenté pour assister Adda : celui-ci avait « laissé la parole » à cet avocat au cours des débats mais refusé de « signer le procès-verbal du débat contradictoire ». La détention d’Adda avait alors été « prolongée ».
Mais dans son ordonnance, le JLD ne s’est « pas prononcé » sur la demande de renvoi formée par Me Raphaël Chiche, ce qui constitue « une atteinte aux droits de la défense ». Ce jeudi 24 juillet 2025, l’avocat parisien a donc saisi la chambre de l’instruction pour en obtenir « l’annulation » et la « remise en liberté d’office » d’Adda, en conséquence de ce « dysfonctionnement imputable au service public de la justice ».
Une présence « surprenante »
« La cassation n’intervient que quand le mis en examen est seul devant le JLD », avait pour sa part tenté l’avocat général lors de l’audience. Le magistrat s’était d’ailleurs « étonné » du fait que l’avocat dessaisi depuis un an connaisse « parfaitement » les détails actualisés de la procédure et qu’il consacre « généreusement son temps » à assister Adda.
Il avait aussi rappelé que la loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic allait plutôt dans le sens d’une « sécurisation » de l’instruction de ces dossiers. Et de son point de vue, cette « confusion manifeste » avait aussi existé « dans l’esprit » d’Adda, qui avait donc bien été « assisté ».
« Je vous demande de ne pas vous égarer dans les méandres de l’imagination très fertile de l’avocat général », avait alors rétorqué Me Raphaël Chiche lors de l’audience du jeudi 24 juillet 2025.
Quand il rejette une demande de renvoi motivée (…), le JLD doit, dans son ordonnance, faire mention de cette demande et énoncer les motifs de son refus, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.
La chambre de l’instruction rennaise
Arrêt du 25 juillet 2025
Et la « seule présence […] surprenante » d’un autre avocat qui n’est « plus désigné » ne « saurait signifier renoncement à cette demande de report », ni « emporter régularisation de la demande de renvoi rédigée sans débat ni motivation », poursuivent les magistrats de la cour d’appel de Rennes.
Au final, « l’annulation du procès-verbal du débat contradictoire […] et de l’ordonnance de prolongation de la détention provisoire […] est encourue », en déduisent-ils : dans ce dossier, faute de titre de détention valide, Adda doit donc être remis en liberté.
Le client de Me Raphaël Chiche a donc été placé sous contrôle judiciaire, mais il reste « détenu pour autre cause ».
CB (PressPepper)
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