Par

Thomas Blanc

Publié le

28 juil. 2025 à 17h39

Ce vendredi 25 juillet 2025, le préfet des Bouches-du-Rhône, Georges-François Leclerc a fait usage de son nouveau pouvoir. La loi du 13 juin 2025 « visant à sortir la France du piège du narcotrafic » lui permet de demander l’expulsion de leurs logements sociaux des locataires délinquants ainsi que celle de leurs familles. Dix foyers domiciliés à Marseille et autour de l’étang de Berre sont ciblés. Mais des recours commencent à s’organiser.

« C’est ce que l’on craignait »

La loi contre le narcotrafic du 13 juin 2025 « a introduit des dispositions nouvelles visant à permettre l’expulsion de locataires dont les agissements troublent gravement l’ordre public dans l’environnement du logement et dégradent les conditions de vie des autres habitants », précise le préfet du département.

En joignant la parole aux actes, il a donc engagé dix procédures auprès de plusieurs bailleurs sociaux du département afin d’obtenir l’expulsion d’individus délinquants de leurs logements sociaux. Ils devront plier leurs bagages mais également ceux de tous les membres de leurs familles vivant sous le même toit.

La préfecture de police des Bouches-du-Rhône confirme à actu Marseille qu’il s’agit de «d’une procédure de résiliation du bail» qui concernerait donc « en principe » toute la famille. Même si « c’est le juge judiciaire qui, à la fin, décide », précisent les autorités.

Cette situation en laisse plus d’un sans voix. Parmi eux, Hassen Hammou, responsable du collectif Trop jeune pour mourir. « C’est ce que l’on craignait. La manière dont on traite ces problèmes est assez curieuse, on entre dans un système de double peine », tranche-t-il.

Des recours en réflexion

Le collectif, déjà auteur d’une pétition à la fin du mois de juin contre cette mesure précisément, compte engager des recours pour les familles concernées.

« Nous allons identifier les cas et leur proposer notre aide, si les familles le souhaitent, pour organiser une réponse judiciaire au préfet. Pour cela nous devons attendre que la justice se saisisse des dossiers ce qui n’est pas le cas à l’heure actuelle », commente-t-il pour actu Marseille Hassen Hammou, membre d’EELV.

Ces recours peuvent être multiples. Sur le plan judiciaire (que privilégie le collectif), aller devant le Conseil d’État, la plus haute juridiction de l’ordre administratif, est une possibilité tout comme la Cour européenne des droits de l’Homme.

Du côté politique, Hassen Hammou également membre d’Europe Écologie Les Verts, assure qu’un portage sera mené par Sandrine Rousseau pour faire abroger cette partie de la loi.

Les risques et le champ libre au trafic

Donner autant de pouvoir au préfet aura des conséquences affirme le responsable du collectif, « le préfet surintervient dans des situations aussi délicates et cela causera de la violence sociale en marquant les familles alors qu’elles n’ont pas commis de méfaits. »

« Ils mettent en œuvre des politiques expéditives quand nous voulons faire respecter l’individualisation de la peine, qui est faite pour ne pas engager la responsabilité de toute une famille pour des délits commis par une seule personne. Nous voulons le retour dans une justice pleine et entière », a-t-il poursuivi.

Le préfet nous a provoqué, nous, responsables associatifs sur ce sujet en engageant ces procédures sans avoir répondu au préalable à nos interrogations.

Hassen Hammou
Responsable du collectif Trop jeune pour mourir

Aussi, cette mesure ne permet pas de s’attaquer aux réseaux mais à leurs premières victimes, les membres les plus bas de leur échelle. « Encore une fois, on ne s’attaque pas aux réseaux, on laisse leur emprise se développer et on punit ceux qui tombent dedans en leur disant ‘débrouillez-vous’ », déplore Hassen Hammou.

D’autres mesures dans un autre département

Dans les Alpes-Maritimes, le procureur de la République du Tribunal de Grasse a adopté la mise en place d’un dispositif permettant de supprimer les prestations sociales versées aux trafiquants de drogue condamnés.

Les montants touchés grâce aux trafics sont désormais comptés dans leurs revenus. Ainsi, les dealers condamnés qui bénéficient d’aides sociales verront leurs montants réduits voire supprimés et seront amenés à rembourser les sommes indûment perçues.

Ce dispositif inédit se traduit par un protocole d’accord signé entre le Caisse d’Allocations Familiales des Alpes-Maritimes, les parquets de Grasse et de Nice, la direction interdépartementale de la police nationale des Alpes-Maritimes et le groupement de gendarmerie départementale des Alpes-Maritimes.

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