Dans la région de Grenoble, ARaymond est un industriel historique. Entouré de ses montagnes natales et sous une chaleur écrasante, le groupe français, spécialiste des solutions de fixation et d’assemblage pour plusieurs secteurs d’activité inaugurait, le 6 juin, le nouveau site de sa branche pharma ARaymondlife à Voreppe, près de Grenoble (Isère). Si les 5 800 m² de salles blanches dont dispose la nouvelle usine serviront en partie à assurer ses activités de sous-traitance, qui représente un tiers de ses commandes, c’est bien son produit phare, le RayDyLyo qu’ARaymondlife ambitionne surtout de développer.


Cette innovation dans l’univers du conditionnement pharma est un bouchon conçu pour être clipsé sur les flacons de médicaments injectables par une simple pression. Une alternative au sertissage en aluminum, couramment utilisé dans l’industrie et nécessitant plusieurs étapes d’assemblage. Pour assurer l’adoption de sa solution et séduire les différents acteurs d’un marché très fragmenté, ARaymondlife n’a pas hésité à investir dans la production du RayDyLyo.


Fruit d’un investissement de 66 millions d’euros soutenu notamment par Bpifrance, l’usine de Voreppe, flambant neuve a été pensée pour remplacer celle de Saint-Egrève (Isère), en vue de tripler sa capacité de production annuelle. « Nous produisions 25 millions de pièces par an sur le site de Saint-Egrève et nous prévoyons d’assurer la production de 75 millions d’unités par an dans l’usine de Voreppe, sur un horizon de deux ans », précise Patrick Delorme, directeur général d’ARaymondlife.


Situé au cœur de la zone d’activité Centr’Alp, le site de Voreppe s’inscrit dans la ligne stratégique du groupe de diversifier ses activités, en s’appuyant sur des secteurs porteurs, dont la santé. Créée en 2007, la branche Araymondlife a réalisé un chiffre d’affaires de 16 millions d’euros en 2024, soit 10 % du chiffre d’affaires du groupe.


Pour assurer l’augmentation de ses capacités de production, le site, qui emploie actuellement 80 personnes, anticipe le recrutement de 250 employés supplémentaires. Un bond en avant impressionnant, justifié par une demande croissante et le besoin des laboratoires de constater les capacités de production disponibles du sous-traitant pour la signature de nouveaux contrats.


Le RayDyLyo, un produit en pleine croissance


Parmi les principaux avantages qu’offre le RayDyLyo, la simplicité et la rapidité du système d’assemblage. « Il est possible de clipser jusqu’à 100 unités d’un coup grâce à son envoi sur des socles standardisés », précise Lionel Maritan, responsable du développement produit d’ARaymond. « On peut aller jusqu’à 100 000 pièces assemblées en moins de 90 secondes, une cadence déjà à l’œuvre avec certains industriels », renchérit-il.


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Le RayDyLyo est un bouchon conçu pour être clipsé sur les flacons de médicaments injectables par une simple pression.


Une facilité attirante, bien qu’elle représente un coût plus élevé que le sertissage traditionnel. « Il faut compter plusieurs euros contre quelques centimes pour un sertissage classique, mais nous proposons de nombreuses options pour réduire la facture, comme la livraison des bouchons en vrac plutôt que sur des socles adaptés aux machines de conditionnement », détaille Lionel Maritan. En outre, le RayDyLyo est disponible en deux tailles, pour les flacons de 13 centimètres et de 20 centimètres, « ce qui correspond à 99 % des besoins de l’industrie », précise-t-il.


Créée en 2012, le produit a connu une croissance relativement faible, avant de faire face à de nombreuses demandes durant la crise du Covid-19, avec notamment une commande du gouvernement canadien de 8 millions de pièces. « En évitant la multiplication des fournisseurs et en offrant une solution qui ne nécessite aucun outil industriel, le RayDyLyo est un produit disruptif, totalement novateur pour l’industrie pharmaceutique », affirme Patrick Delorme.


Le produit répond, par ailleurs, à la demande de gros laboratoires qui cherchent à gagner en productivité, mais également à celle des biotechs qui cherchent des solutions pour la production de petits lots. Une force que le laboratoire veut se donner les moyens d’exploiter.


Une production bien huilée


Le site de Voreppe étant encore en cours de validation, avant sa mise en service prévue en septembre, la production du RayDyLyo est pour le moment assurée dans l’usine de Saint-Egrève. Toutefois, l’usine de Voreppe dispose déjà de quatre presses à injection, servant à fabriquer chaque partie du bouchon.


La solution d’ARaymondlife est composée d’une capsule en polypropylène, d’une cage en polycarbonate et d’un corps en polybutylène téréphtalate (PBT). Introduite dans la presse, la matière première est d’abord malaxée puis passée dans une vis sans fin chauffée entre 160 °C et 250 °C. La matière, devenue pâteuse est ensuite poussée dans des moules pour former chaque composé. Refroidis, les moules sont ouverts et la pièce est finalement libérée. « Chaque cycle dure environ 15 secondes et nous sommes capables d’assurer une cadence de deux pièces par seconde », explique Patrick Delorme.


Une cadence voulue modérée pour garantir une qualité de fabrication. Les moules constituent par ailleurs un élément important dans la stratégie de différenciation d’Araymond. « Nous travaillons avec notre propre mouliste car les moules sont déterminants pour la qualité de nos produits, aussi, nous les changeons toutes les trois millions d’injection », ajoute-t-il.


Dans le laboratoire de contrôle, de nombreux tests de qualité sont réalisés. Parmi les outils à disposition du technicien, le FMS-Oxygen Headspace Analyzer, « un équipement qui ajoute une prestation de service pour nos clients », vante le directeur du site. La méthode, non destructive, consiste à placer le flacon fermé sous vide et à mesurer la présence de l’air à l’intérieur du flacon à l’aide d’un laser pour déterminer s’il y a altération ou non de la stérilité du produit. « Le FMS fournit des données très précises, tant qualitatives que quantitatives », ajoute-t-il.


Le laboratoire est également équipé de caméras 2D et 3D qui mesurent la force d’arrachement nécessaire pour retirer le RayDyLyo du flacon. Des outils indispensables pour servir les ambitions d’ARaymond.


Une branche pharma en pleine expansion


Pour assurer sa pérennité, ARaymondlife aimerait désormais étendre sa gamme de produits en propre. « Pour le moment, le RayDyLyo est le seul produit commercialisé par ARaymondlife mais un autre arrive d’ici à la fin de l’année » projette Patrick Delorme. Alors que le marché du conditionnement connait une croissance modérée de 3 % par an, le RayDyLyo pourrait être promis à une augmentation importante de ses ventes, en pénétrant le marché des GLP-1, dont la demande ne cesse d’augmenter.


Si 75 % des ventes du RayDyLyo sont réalisées aux États-Unis, Araymondlife ne se dit pas inquiet concernant les possibles mesures de droits de douane adoptées par l’administration Trump. « Jusqu’à présent, les droits de douanes ne remettent pas en cause nos commandes, au vu de la valeur ajoutée du produit », assure le dirigeant. ARaymondlife veut d’ailleurs renforcer ses liens avec le continent américain, qui constitue selon Audrey Raymond, directrice adjointe d’ARaymond, en charge du développement à l’international du groupe, « l’un des marchés les plus ouverts à l’innovation ».


La filiale pharma d’ARaymond prévoit ainsi d’atteindre 70 M€ de chiffre d’affaires d’ici à 2030. Une belle perspective pour un groupe qui verra, en juillet, la sixième génération arriver à sa tête, dont deux dirigeants non issus de la famille fondatrice pour la première fois de son histoire.


Voreppe, un site résolument écologique 


« D’après les experts qui ont évalué le site, depuis que nous sommes installés ici, la biodiversité progresse », se réjouit Patrick Delorme. Une bonne nouvelle qui n’est pas le fruit du hasard. ARaymondlife a conçu l’usine de Voreppe pour que son impact environnemental soit le plus faible possible. Entre autres initiatives, des panneaux solaires ont été installés sur le toit. « L’énergie solaire récupérée nous permet de produire 20 % de l’électricité nécessaire au fonctionnement du bâtiment », constate le directeur de l’usine.


 


ARaymondlife a également mis en place un système de récupération de la chaleur dégagée par les équipements, tels que la presse à injection ou le compresseur, pour chauffer le bâtiment en hiver. Et pour les jours d’été aussi, des solutions ont été imaginées. Le stock, dont la température doit rester comprise entre 15°C et 25°C est isolé du sol par une dalle en béton, et refroidi grâce à des chaussettes de refroidissement installées au plafond. La climatisation est par ailleurs alimentée grâce à l’eau de pluie récupérée et filtrée, une eau utilisée également dans les sanitaires du bâtiment.