Le soleil est à son zénith au-dessus de la cité de La Marie quand une dizaine d’enfants en maillot de bain montent les marches de la piscine mobile installée dans ce quartier de la Croix-Rouge (13e).
Un peu intimidés, ces petits Marseillais de 4 à 5 ans traversent le pédiluve et descendent un à un dans le grand bassin, pour apprendre avec Romain, maître-nageur, à être plus à l’aise dans l’eau. « Pour les très petits, l’idée est qu’ils découvrent le milieu aquatique, afin qu’ils n’en aient pas peur », explique le professionnel, engagé par la Ville. « Avec les enfants un peu plus âgés, à partir de 7 ans, on va travailler les bases de la natation, que souvent, ils n’apprennent pas ailleurs. »
Un tiers des enfants de Marseille ne savent en effet pas nager à leur entrée en sixième. Un constat accablant auquel la municipalité tente de répondre, notamment à travers l’installation l’été de quatre bassins mobiles dans la ville. Ouvertes depuis le 12 juillet, ces piscines éphémères, situées sur la plage du Prado (8e), au parc Bougainville (3e), à la plage de l’Estaque (16e) et à la Croix-Rouge (13e), accueillent des enfants de 4 à 12 ans. « La grande majorité ne va jamais à la mer, et profite peu des piscines municipales », observe Romain, maître-nageur depuis 2022, tout en supervisant le groupe de petits baigneurs. Senna, 5 ans, saute ainsi pour la première fois dans une piscine. Ravie, elle enchaîne sans crainte exercice avec une corde et descente d’un toboggan. « J’aime beaucoup l’eau », conclut l’énergique petite fille, avec un immense sourire.
Favoriser l’égalité dans l’accès au sport
Inaugurés il y a deux ans par la Mairie, en lien avec la Fédération Française de Natation, les bassins mobiles rencontrent un franc succès. En 2024, environ 1 400 enfants en ont profité. Cette année, l’équipe municipale en attend plus de 1 500, avec des inscriptions sur les quatre sites déjà complètes. Dans un communiqué, la Ville assure faire de l’apprentissage de la nage « un enjeu prioritaire de sécurité » ; les noyades, notamment des plus jeunes, étant encore trop nombreuses sur le littoral.
Mais l’équipe municipale voit surtout dans le déploiement de ces piscines estivales un levier pour favoriser « l’égalité d’accès aux pratiques sportives ». Les enfants des quartiers prioritaires de Marseille sont surreprésentés parmi ceux qui ne savent pas nager. « Dans nos cours, on accueille surtout des enfants de la cité juste à côté ou des centres sociaux des alentours », confirme Romain en souhaitant la bienvenue à Youssef et Jenna, 5 et 6 ans, qui habitent la cité enclavée de La Marie. À l’ombre du bassin, leur mère, Nouel, attend la fin du cours : « On reste tout l’été à Marseille, alors cette piscine, c’est super. Dès le matin, mes enfants me demandent d’y aller ». En entendant les cris de joie de ses petits, la jeune femme regrette juste l’aspect éphémère de l’initiative : « On aimerait avoir ces équipements toute l’année ». Les quatre bassins mobiles vont tous fermer le 31 août. Passé cette date, Youssef, Jenna et Nouel devront s’armer de courage pour continuer à profiter de l’eau : il faut compter une demi-heure de bus pour se rendre à la piscine la plus proche, et une heure trente de transport pour profiter de la plage de l’Estaque.