Quand on regarde le paysage musical actuel, on constate que les groupes sont quasiment absents. Et ceux ayant un certain succès, encore plus rare. Feu! Chatterton, c’est du solide. Quatorze ans de service, avec exactement la même formation, s’il vous plaît.

Quelques heures avant leur show prévu au Nice Jazz Fest, dimanche dernier, trois des cinq membres, décontractés, ont répondu à nos questions. Par ordre d’apparition, Sébastien Wolf et Clément Doumic, guitaristes et claviéristes, puis Arthur Teboul, le chanteur.

Alors les gars, c’est quoi la recette pour durer ensemble? « Il y a un effort de cohésion. Mais je pense qu’on a développé une intelligence commune. On sait que ce qu’on bâtit ensemble est précieux », estime Sébastien Wolf.

Envie de premières fois

Des paroles aux actes, il n’y a qu’un pas. Ou plutôt un disque. Le 12 septembre, Labyrinthe, le quatrième long format de Feu! Chatterton arrivera dans les bacs. Ce souhait de rafraîchir la peinture, on l’a ressenti à l’écoute, en avant-première des 13 titres qui le composent. Eux qui s’aventuraient surtout dans le registre rock, avec un goût prononcé pour les paroles raffinées flirtant avec la poésie, ont posé quelques orteils dans le champ pop.

« On a travaillé avec le producteur Alexis Delong, qui a notamment collaboré avec Zaho de Sagazan. Il vient d’une autre école et avec lui, on a essayé de faire des choses dont on n’avait pas l’habitude. Il y a un morceau qui sonne new wave, un autre presque reggaeton », expliquent Sébastien Wolf et Clément Doumic.

Quand on demande au trio présent face à nous si l’idée est de multiplier les occasions de vivre des premières fois, Arthur Teboul relève la tête. « On ne se l’était pas formulé comme ça, mais c’est une bonne manière de voir les choses. Presque quinze ans de vie commune, ça ressemble à une histoire de couple. Et dans un couple, il faut continuer à s’admirer mutuellement, à se surprendre, à se renouveler. Si l’album s’appelle Labyrinthe, c’est aussi parce que c’est une ode à l’exploration, à oser aller s’aventurer ensemble. »

Entre envolées scéniques et passages plus intimes

Pour entretenir la flamme, rien de mieux que le live. Surtout pour un équipage comme celui-ci, réputé pour ses prestations scéniques percutantes. L’été de Feu! Chatterton prend la forme de douze dates, « une pré-tournée, un apéro », s’amusent Arthur, Sébastien et Clément.

En novembre, ils reprendront la route pour de bon, avec un album tout neuf à défendre. à Nice, comme lors de leurs précédents shows, ils ne se sont pas privés de jouer certains titres inédits. « Au début, c’était flippant. Et maintenant, c’est excitant« , analyse Sébastien Wolf.

« Quand tu fais des festivals, tu te retrouves aussi devant des gens qui ne sont pas forcément intéressés par ta musique au départ. On est contents parce qu’on voit qu’il y a des morceaux qui résonnent vraiment auprès du public. C’est le cas d’Allons voir, notre premier single, mais aussi de morceaux moins festifs, plus intimes. Jusqu’ici, on n’avait jamais tenté ça. Dès le premier concert, on a vu que ça créait des moments de grande attention, de grande intimité. C’est ce qu’on recherche. »

Dans ce registre, il y a Mille vagues. Une guitare, une basse et une voix pour rendre hommage à Jean-Philippe Allard, le manager du groupe, disparu en mai 2024. « Avant de nous accompagner, il a été un grand monsieur du jazz en France. Il a beaucoup travaillé avec Sébastien Vidal, le directeur artistique du Nice Jazz Fest. Pendant des années, Jean-Philippe nous avait dit qu’il fallait absolument qu’on joue ici. C’est assez spécial pour nous de finalement nous retrouver là », explique Sébastien Wolf.

En quête de simplicité dans l’écriture

Souvent salué pour la beauté de sa plume, Arthur Teboul a un peu chamboulé sa manière d’écrire pour ce nouveau projet, avec l’intention d’aller vers un style plus épuré.

« Avec le pianiste de jazz Baptiste Trotignon, j’ai fait un album de reprises (intitulé Piano voix) de grandes chansons françaises, du Brel, du Ferré, du Barbara. En entrant vraiment dans la fabrication des morceaux, j’ai découvert à quel point ils étaient simples, dans leur structure et leur écriture. ça m’a un peu troublé parce que je les écoute depuis l’enfance. Et je n’avais jamais réalisé à quel point cette simplicité pouvait mener à la profondeur. L’âge, le fait d’avoir des enfants et l’époque m’ont fait dire que j’avais envie d’aller à l’essentiel, d’exprimer les choses plus directement. Pour moi qui aime écrire de manière sophistiquée, par plaisir et par pudeur, c’était un vrai enjeu. »