Chroniqueuse culture à « Marianne », Valérie Abécassis livre un portrait douloureux, marqué du sceau de la trahison, de la photographe juive américaine Nan Goldin. D’Arles 1987 à Arles 2025, l’égérie de la contre-culture new-yorkaise s’est muée en une ardente militante pro-Gaza, qui n’a pas eu un regard pour les victimes du 7 octobre.
Dans les années 80, c’est elle, entre autres, qui nous a ouvert les yeux. Dans cette France sous Mitterrand qui commençait à miser sur la vertu et l’humanité, la petite rousse du Massachusetts nous révélait les marges, les corps non normés, les genres fluides, les visages ou les yeux tuméfiés, la violence faite aux femmes, aux gays, aux transgenres. Elle nous montrait les dépendances et les toxicos et, derrière son objectif, ce monde moche était beau.
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En 1987, à Arles, Nan Godin présentait The Ballad of Sexual Dependency, œuvre sur l’amour, le sexe, la drogue et la perte, à travers une Amérique marginale qu’elle portait à bout de regard. Elle était juive, fille de survivants de la Shoah, des grands-parents qui avaient fui les pogroms en Russie, élevée, dixit, dans la conscience de l’Holocauste. Une juive trash, qui a été pute, serveuse, addict, lesbienne. Quel bonheur pour nous tous, aspirants rebelles.